Le Club de la presse Bretagne fête ses 50 ans avec le festival Regarder hier, regarder demain, du 15 au 16 novembre 2024. Plusieurs conférences et ateliers se focaliseront sur les évolutions de la presse depuis 50 ans et sur son futur. La première journée est dédiée aux professionnels, la seconde s’ouvre au grand public. Rencontre avec Carole André, journaliste et coprésidente de l’association.
Le Club de la presse est une association créée en 1974 par un groupe de journalistes indépendants qui discutaient et se faisaient un réseau après le travail. Depuis, l’association est restée un lieu de rencontre et les actions du club se sont multipliées et professionnalisées. « Petit à petit, ils se sont rendus compte qu’il y avait des besoins, que le Club pourrait être un lieu qui accueille des conférences, qui permet d’organiser des rendez-vous, des interviews », explique Carole André, coprésidente de l’association aux côtés d’Hélaine Lefrançois. Assez vite, des formations ont été mises en place pour les journalistes et, ces dix dernières années, le Club de la presse a voulu devenir un vecteur de la défense de la liberté d’informer et de l’éducation aux médias. Il est aussi le premier bureau de coworking à Rennes, dédié aux journalistes, créé en 2006 par Carole André, Audrey Guiller et Nolwenn Weiler.
« Nous pensons que la liberté d’informer et la liberté d’expression sont des sujets importants peu connus du grand public », Carole ANdré
Pour les 50 ans, le Club de la presse a tenu à créer un événement à la fois pour les membres du club et pour le grand public. « La profession de journaliste est assez décriée, pourtant elle repose sur beaucoup de clichés », constate Carole André. Plusieurs projets ont été montés afin de présenter le travail des journalistes sous différents axes. En premier lieu, l’exposition Report’Images, présentée dans le métro B à Rennes du 2 septembre au 12 octobre 2024, désormais visible jusqu’au 8 décembre 2024 aux Ateliers des Capucins à Brest (voir notre article). Le film Les Algues vertes de Pierre Jolivet sera quant à lui de nouveau diffusé au cinéma Arvor le 4 novembre 2024. La projection se fera en présence d’Inès Leraud, journaliste qui a inspiré le film.
Un programme pour les professionnels et le grand public
Le festival du 15 au 16 novembre 2024 viendra clôturer les événements des 50 ans du Club de la presse. « Raconter hier, raconter demain » se déroule sur deux journées, la première s’adresse aux professionnels, elle est ouverte à toutes les personnes qui s’intéressent à l’information et à la manière d’informer (journalistes, professionnels de la communication, associations concernées). La journée se déroulera à la salle du Jeu de Paume et débutera à 9h par un accueil café suivi d’une présentation en présence de Nathalie Apérée. La matinée est ensuite consacrée à deux plénières : « IA et journalisme, je t’aime moi non plus ? » et « Comment mettre la fiction au service du réel ? ». Dans l’après-midi, six ateliers sont proposés autour des questions de protection des sources, de l’éducation aux médias, des ruralités ou encore de la concurrence entre nouveaux médias et médias traditionnels. Tous les événements sont gratuits sous inscription. (Programmation complète et lien d’inscription).
La seconde journée (samedi 16 novembre) s’adresse au grand public et se déroulera aux Champs libres. Deux tables rondes sont proposées dans l’auditorium : la première « La télévision est-elle has been ? », en présence de Jean-Michel Apathie (quotidien), Aurélie Rousseau (TV Rennes) et Nisrine Manaï (Réel média) sera animée par François Quinton (INA) ; la seconde « Faut-il prendre l’info au sérieux ? » sera animée par le duo drag Freak Adelfe et Marie Babette et aura pour invité·es Marine Slavitch (Médianes), Sébastien Liebus (Gorafi) et Marine Baousson (humoriste, France Inter). Des ateliers sont aussi proposés en continu de 14h à 19h dans le hall, certains d’entre eux sont aussi accessibles aux enfants. La journée est entièrement gratuite et en libre accès dans la limite des places disponibles.
Une soirée « Radio bamboche » aura également lieu le soir du 15 novembre à la Salle de la Cité, retransmis en direct sur la radio C-Lab. En partenariat avec Radiolab, elle débutera sur une fausse matinale d’info passée au mixeur de la troupe de théâtre d’impro Slap!, avec Benoît Hamon (DG Singa Global et président d’ESS France), Fabienne Sintès (journaliste et productrice du 18/20 sur France Inter) et le duo de drags Freak Adelfe et Marie Babette. L’idée est de traiter avec dérision les problèmes du journalisme et de l’information aujourd’hui. « Nous sommes beaucoup de professionnels de l’information, de journalistes à être conscients que nous faisons partie des problèmes de confiance avec le public [fake news, vérification des sources…], on ne veut pas rester les bras ballants et c’est aussi l’idée principale de l’événement », précise Carole André. La soirée se poursuivra avec un DJ set. (Prix libre, sous inscription)
Quelles évolutions en un demi-siècle ?
Concernant les évolutions majeures de la presse depuis 50 ans, Carole André revient sur la féminisation du métier de journaliste. « Dans les années 70 c’était un métier d’hommes qui venaient de famille aisées ou intellectuelles ». Depuis, « ce sont majoritairement des femmes qui sortent diplômées des écoles de journalisme, alors même si on peut exercer sans le diplôme, ça finira forcément par se voir », conclue-t-elle.
D’autres évolutions sont notables, comme l’arrivée de la radio libre dans les années 80 qui a bouleversé le paysage médiatique français. « C’était des jeunes qui montaient leur petite radio avec quatre bouts de ficelle, ils ont commencé par diffuser de la musique puis de l’info. » Un type de média qui diffusait l’information différemment de la presse papier classique et qui parlait à un autre public.
« L’arrivée d’internet a aussi provoqué beaucoup de changements, et c’est toujours le cas, ça a beau faire 30 ans, la presse ne s’en est pas encore sortie. ». L’information est désormais bien plus diffuse, les médiums se sont multipliés et les informateurs aussi. « Il y a une concurrence du citoyen lambda sur la remontée d’information, certaines personnes sont en mesure de proposer du contenu de qualité », selon Carole André. Si ce n’est pas le cas de toute l’information web, certains utilisateurs des réseaux sociaux proposent des contenus informatifs riches, une concurrence qui n’a pas été résolue par les médias traditionnels.
La prochaine étape, toujours amenée par internet, est l’Intelligence Artificielle qui sera abordée pendant le festival. « Ce système commence déjà à faire des ravages en termes de fake news, mais on espère pouvoir tirer du positif », la technologie des IA pourrait largement permettre de faire remonter de vrais informations et « elle pourrait aider la recherche scientifique aussi, il faut l’utiliser avec un peu de bonne volonté ». Beaucoup de réflexions découlent de ces avancées, sur les possibilités de régularisation de ces systèmes qui reposent entièrement sur des volontés politiques et économiques. « Ce sont aussi des réflexions passionnantes sur la démocratie, sur la liberté d’expression, sur les libertés individuelles et sur la protection des personnes », conclut Carole André.
Concernant son futur, il y a quand même un constat positif, « de plus en plus de personnes sont prêtes à payer des journaux et des sources d’informations qui leur paraissent fiables ». Ce qui démontre un possible changement des pratiques des usagers vis-à-vis de l’information.
INFOS PRATIQUES
Festival Raconter hier, raconter demain du 15 au 16 novembre 2024
Programmation et liens d’inscription (journée pro et soirée bamboche)
Lieux : Rennes. Journée pro au Jeux de Paume ; journée grand public aux Champs Libres ; soirée bamboche à la salle de la Cité