L’année 2024 commence sous les meilleurs auspices, au moins au rayon littérature. Selon une étude américaine, les personnes qui lisent des livres vivent plus longtemps que celles qui ne lisent pas. Alors, voici une petite ordonnance pour que cette nouvelle année vous apporte santé et bonheur.
Remarqué après la publication de son premier roman, Les Cormorans (Rivages, 2020), Edouard Jousselin confirme son talent avec un roman audacieux et addictif de six cent pages, La géométrie des possibles (Rivages, 3 janvier 2024). Des brumes du Morvan aux plages de Californie, des profondeurs du Darkweb aux paillettes d’Hollywood, espaces et temps se télescopent, selon les lois d’une énigmatique géométrie des possibles. En entrecroisant les destins de personnages qui n’avaient aucune chance de se rencontrer, l’auteur déploie une œuvre monde, remarquable chronique de notre époque.
Après avoir mis en scène le personnage de sa mère dans Fugitive parce que reine (Gallimard, 2018, feuilleter), Violaine Huisman se penche sur celui de son père, figure hors norme des Trente Glorieuses dans Les Monuments de Paris (Gallimard, 4 janvier 2024). Mais elle nous parle aussi de son grand-père, haut fonctionnaire juif, directeur des Beaux-arts et initiateur du Festival de Cannes en 1939. De cette enquête familiale, l’auteure conjugue avec beaucoup de sensibilité, intimes souvenirs et destins oubliés de l’Histoire. (Feuilleter).
Autres destins exceptionnels trop méconnus avec le nouveau roman d’Abnousse Shalmani. J’ai péché, péché dans le plaisir (Grasset, 10 janvier 2024) met en regard la vie de deux poétesses. A Téhéran en 1955, Forough Farrokhzad (1934-1967), jeune égérie des milieux littéraires iraniens, découvre les poèmes de Pierre Louÿs (1870-1925) et son amour pour Marie de Régnier (1875-1963), fille de José-Maria de Heredia. La poétesse iranienne, cloîtrée par une éducation rigide, admire la liberté de celle qui fut une des reines de La Belle Époque. Une ode très contemporaine à la liberté artistique et à celles qui ne renoncent jamais, en Occident comme en Orient. (Feuilleter).
En cette rentrée de janvier, vous retrouverez aussi des auteurs très appréciés comme David Foenkinos (La vie heureuse, Gallimard, feuilleter), Nicolas Matthieu (Le ciel ouvert, Actes Sud, feuilleter) ou Philippe Besson (Un soir d’été, Julliard).
En littérature étrangère, le récit de Colum McCann s’impose, American Mother (Belfond, 4 janvier 2024). Avec Diane Foley qu’il a accompagnée lors du procès des bourreaux de Daech qui ont torturé et décapité son fils, l’auteur irlandais nous plonge dans une enquête vibrante sur les intégrismes religieux. Un roman choc.
Liliana Lazar, auteure roumaine dotée d’une plume et d’un univers remarquables, écrit peu. Carpates (PLON, 11 janvier 2024) est son troisième roman depuis Terre des affranchis paru chez Gaïa en 2009. Piégés par la neige au cœur de la montagne roumaine, Jeanne et Boris, un couple de Français, trouvent refuge dans un étrange hameau – la Colonie – dirigée par des femmes. Alors qu’ils se croient sauvés, débute une plongée vertigineuse dans le monde des vieux – croyants, une communauté aux lois archaïques, qui protège un impensable secret. À ne pas rater et à savourer.
Littérature anglaise avec Claire Fuller. Terre fragile (Stock, 10 janvier 2024, traduit par Mathilde Bach) est l’histoire de deux jumeaux cinquantenaires et sauvages qui se retrouvent désemparés à la mort de leur mère. Les menaces les assaillent et les secrets familiaux refont surface. Un portrait saisissant de la marginalité et de la précarité dans l’Angleterre rurale et un magnifique roman sur la trahison, l’amour et la résilience.(Feuilleter)
À signaler aussi la traduction du dernier roman de Russell Banks (Le royaume enchanté, Actes Sud, traduit par Pierre Furlan) et un nouveau titre de Jón Kalman Stefánsson (Mon sous-marin jaune, Christian Bourgois, 4 janvier 2024, traduit par Éric Boury).
À mi-chemin vers le roman noir, Joseph O’Connor nous emmène dans La maison de mon père (Rivages, janvier 2024, traduit par Carine Chichereau). Inspiré de l’histoire vraie de Hugh O’Flaherty, le prêtre irlandais rattaché au Vatican qui a défié les nazis et sauvé plus de 6000 juifs et soldats alliés de l’enfer de Rome en 1943, ce thriller implacable mêle Histoire et fiction. Un récit haletant à l’intrigue parfaitement maîtrisée.
Plus légèrement, Dominique Sylvain nous emmène au Pays Basque avec Lola Jost et Ingrid Diesel. Elles vont enquêter sur la mort d’un berger. Si tout le monde croit au suicide, les deux enquêtrices soupçonnent un groupe de maisons de retraite. Périlleuses Pyrénées (Robert Laffont, 18 janvier 2024) vous emmène vers les sommets d’un duo de choc.
En version poche, le menu commence par un émerveillement au monde, continue avec un regard géopolitique et finit sur un divertissement noir.
Jean-François Beauchemin, auteur canadien, publie chez Québec Amérique, deux nouveaux livres en cette rentrée 2024 : Le vent léger et Archives de la pluie. Mais vous pouvez aussi retrouver son précédent roman en version poche, Le roitelet (Folio, 4 janvier 2024). Avec une indicible pudeur, l’auteur décrit une relation unique entre un homme et son frère schizophrène. Un livre magnifique et rare.
De la guerre en Tchétchénie à la crise ukrainienne, Le mage du Kremlin (Folio, 4 janvier 2024) dévoile les dessous de l’ère Poutine et s’impose comme le grand roman de la Russie contemporaine. Giuliano da Empoli a obtenu le Grand Prix de l’Académie française pour ce titre. (Feuilleter – lire la chronique de Jacques Brélivet)
Et enfin, Camilla Grebe, figure incontournable du polar nordique, joue avec le mystère de la chambre jaune dans L’énigme de la stuga (Le livre de poche, 31 janvier 2024, traduit par Anna Postel).
L’équipe Littéraire d’Unidivers vous souhaite une très belle année 2024.
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