Ant-Man, un film de superhéros petit mais décomplexé

Vous rêvez de vous faire tout petit afin de disparaître ou de jouer les espions  ? Mais savez-vous que se faire ant man, devenir homme-fourmi, vous destine au statut de super-héros drôle décalé ? Ant-Man non plus n’y croyait pas trop. Au début. Et pourtant, il y parvient dans une comédie honnête et musclée. Un petit nouveau décalé et bienvenu dans l’univers des super-héros aseptisés.cinéma film critique

 

Après Iron Man, Hulk, Thor, Captain America, Les Avengers, les Gardiens de la Galaxie et autres héros de bandes dessinées tout aussi épiques et baraqués les uns que les autres… C’est Ant-Man que les studios Marvel ont choisi cette fois-ci de porter sur grand écranant-man-affiche-thor-. Oui, vous avez bien lu : Ant-Man. L’homme-fourmi. Sans blague, c’est un superhéros ? Puisqu’on vous le dit !

Certes, il n’a pas la carrure de ses collègues, mais cela ne l’empêche pas de se confronter à plus grand et plus fort que lui, et avec brio. Créé par Stan Lee et Jack Kirby dans les années 60, et même si cela fait presque trente ans que le projet a été évoqué, le personnage n’avait encore jamais été adapté au cinéma. Il aura donc fallu attendre 2015 pour qu’Ant-Man et les fourmis, ses alliées, investissent les écrans. Un épisode de plus dans la série des productions Marvel aux codes déjà bien établis, mais dans le genre des films de super-héros, Ant-Man est plutôt un OCNI, un Objet Cinématographique Non Identifié, qui joue avec les codes du genre, et s’en affranchit avec succès au profit d’une comédie, loin, elle, d’être diminuée. Malgré une production mouvementée (Le film avait d’abord été confié à Edgar Wright ; lequel a finalement renoncé au projet quelques semaines avant le tournage), le parti pris par Peyton Reed de réaliser un blockbuster qui ne se prend pas au sérieux aura ainsi réussi à ne pas faire d’Ant-Man le super-héros de trop.

Ant-Man, c’est Scott Lang (Paul Rudd), ex-taulard et cambrioleur récidiviste. Tout juste sorti de prison, il est recruté par le Docteur Hank Pym (Michael Douglas) pour enfiler le costume qu’il a lui-même inventé et qui lui permet de réduire sa taille à celle d’une fourmi. Entrainé à manipuler le costume et à communiquer avec ses nouvelles compagnes de mission par le Docteur et sa fille (Evangeline Lilly), il devra empêcher que l’invention de Hank ne soit détournée à des fins militaires et vendue à l’Hydra, organisation secrète aux intentions funestes.

ant-man-filmAssurément, ce n’est pas par le fond que le film se distingue. Comme dans chacune des productions du studio, on retrouve un schéma narratif classique avec son quota de cascades, d’humanité à sauver et de superpouvoirs à imprimer en 3D dans les rétines des accrocs aux super-héros. De ce point de vue, le film reste dans la continuité des efforts précédents des studios Marvel.

C’est dans la forme en revanche que Ant-Man innove. D’abord en nous présentant un parfait antihéros, un homme dénué de pouvoirs surnaturels, qui n’a pas subi d’expériences scientifiques et qui ne vient pas non plus d’une autre dimension. Non sans talent (de brigand) certes, il ne se démène pas moins avec ses problèmes quotidiens et son passé d’ancien prisonnier. À le suivre dans sa vie, avec ses potes « un peu » barrés et ses problèmes conjugaux, tout de suite, l’univers Marvel se pare de davantage de simplicité, voire même de réalisme, loin du côté mégalo de nombre de ses héros. L’infiniment grand est bien évidemment abandonné à l’infiniment petit, mais surtout il l’est avec modestie et ne cherche pas à reproduire les combats titanesques des Avengers ou des Gardiens de la Galaxie. Une sobriété encore une fois bienvenue, comme un pied de nez rafraîchissant à l’exubérance des épisodes précédents.

Rassurez-vous cela ne veut pas dire qu’Ant-Man est exempt de cascades en tous genres, d’explosions, de luttes, de sacrifices homériques, seulement ils n’empiètent jamais ni sur le récit, ni sur la comédie décontractée et pleine d’humour qui fait d’Ant-Man un film réussi.ant-man-affiche Déjà largement exploité dans Les Gardiens de la Galaxie, le comique imprègne ici chaque scène et fait du film une œuvre transgenre, assumée et décomplexée. Ant-Man n’a pas l’ambition des cadors du genre, loin de là et c’est tant mieux. Le film jouit d’une liberté de ton qu’ont rarement eu les blockbusters ces dernières années. Finie la dramaturgie, terminés « l’iconisation » des héros et les grandes épopées aux ressorts interminables: les codes du genre sautent les uns après les autres. En jouant à fond sur le potentiel burlesque du héros et de ses impayables acolytes, il s’assume en nanar superhéroïque, et tourne en dérision chacun des Avengers qui l’ont précédé. On retrouve l’humour potache et léger des soaps américains, et la patte de Peyton Reed n’y ait certainement pas pour rien. Qui connait un peu le travail du Monsieur ne pourra s’empêcher d’y retrouver les délires stupides, mais drôles des héros de New Girl, série sur laquelle il a un temps travaillé.

Certes, on ne pourra manquer d’observer quelques lacunes et incohérences, mais c’est justement lorsque le film tente de retrouver ce côté tragique propre aux films de superhéros qu’il devient pataud. Les ruptures de ton, tentées ici et là, restent maladroites et déplacées. À se demander parfois si tout cela ne résulte pas de la production un peu houleuse que le film a dû traverser. Quoi qu’il en soit, on ne saurait trop que conseiller les aventures de l’Homme fourmi. Un film petit, mais qui avec le temps devrait devenir grand.

Film Ant-Man réalisé par Peyton Reed avec notamment Paul Rudd et Michael Douglas. Sortie nationale: 14 juillet (1H57)

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Thomas Moysan
Thomas Moysan est rédacteur en chef des Décloitrés, revue biannuelle de Sciences Po.

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