RENNES. L’ÉCRIVAINE INDIENNE MILITANTE ARUNDHATI ROY AUX CHAMPS LIBRES

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Récompensée par le prestigieux Prix Booker en 1997, Arundhati Roy revient avec une fiction politique Le ministère du bonheur suprême. L’écrivaine indienne, militante pacifiste, donnera une conférence aux Champs Libres à Rennes le 17 janvier 2018 à 18h30. À travers sa fiction, l’auteure nous livre un cinglant portrait politique et social de l’Inde d’aujourd’hui.

On ne fera pas un monde différent avec des gens indifférents  – Arundhati Roy

ARHUNDATI ROY PRIX BROOKER

Depuis son premier Prix Booker en 1997, prestigieux prix littéraire anglo-saxon, reçu pour son livre Le Dieu des petits riens (The God of Small Things), Arundhati Roy n’a cessé son combat en faveur des droits humains, de l’écologie et de l’altermondialisme. Elle s’est également engagée en faveur de nombreuses causes en Inde, son pays d’origine auquel elle a consacré de nombreux essais polémiques qui ont suscité de l’animosité voire parfois bien pire …

Dans ce roman (paru aux éditions Gallimard), l’écrivaine dépeint une Inde bien moins édulcorée que l’image relayée par les médias nationaux. Derrière les films bollywoodiens se dissimule une société franchement inégalitaire où le système de caste perdure. Les Intouchables ou Dalits sont au service des classes supérieures et la mobilité sociale reste figée. Comme le précise Mediapart, la quatrième puissance mondiale est un pays très violent : « 2 millions de femmes sont assassinées chaque année, 600 millions de personnes sont malnutries ». La nation de Gandhi se dispute également toujours le Cachemire avec le Pakistan, depuis maintenant près de trente ans. Cette guerre a fait « des dizaines de milliers de morts, principalement des civils » selon La Libre. C’est cette sombre facette de son pays qu’Arundhati Roy a voulu traduire le plus justement possible dans son roman Le ministère du bonheur suprême.

Gaëlle Fonlupt de l’association pour les droits des Dalits (Echoway) indique, en effet, que « 50 % des Dalits vivent sous le seuil de pauvreté contre 30 % pour la population totale ». Concernant le respect des droits des femmes en Inde, il est en train de sacrément fléchir : en 2017, le pays se plaçait au « 108e rang (sur 144) du classement des pays respectant le droit des femmes, selon un rapport publié par le World Economic Forum alors que le pays occupait la 87e position en 2016 (Mashable, France 24). L’Inde compte également 490 000 femmes transgenres (hijras) dont 30 000 à Delhi (Vice). Celles-ci sont 49 fois plus susceptibles de vivre avec le VIH que les autres adultes (WHO). Quant aux hommes transgenres, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) indique que les données sur le sujet sont peu nombreuses. Sur le plan religieux, le pays constitue le troisième foyer de musulmans au monde avec 170 millions pratiquants (Rfi). Leur taux d’emploi est inférieur à celui des Dalits (Patheos). Il est respectivement de 48 % chez les hommes musulmans et 9% chez les femmes musulmanes contre 53 % et 23 % chez les Dalits. Enfin, « les musulmans représentent 11 % de la population indienne et 40 % d’entre eux sont en prison ».

ARHUNDATI ROY

Dans un entretien pour Outlook, la romancière explique : “Au Cachemire par exemple, les reportages de journalistes ou les rapports sur les droits de l’homme ne disent pas vraiment la vérité sur ce qui se passe. Le roman est le seul moyen de dire, ou d’essayer de dire, ce que signifie vivre sous un régime militaire, ce que cela a comme impact sur l’esprit et les sentiments des gens.” Arundhati Roy a donc fait le choix d’utiliser une nouvelle fois la fiction pour décrire le quotidien d’une partie de la population indienne par l’intermédiaire de personnages en marge de la société, opprimés ou en rébellion contre l’État qui vont se rencontrer et se parler.

À travers deux personnages principaux Anjum, hijra, Tilo, universitaire – et de nombreux personnages secondaires, mais tout aussi essentiels au roman –, l’écrivaine emporte le lecteur dans un voyage au cœur des quartiers du Vieux Delhi, dans la vallée du Cachemire, mais aussi des forêts de l’Inde centrale. Les destins des nationalistes hindous, de guerriers maoïstes ou, encore, d’un tortionnaire vont se croiser avec ceux d’une communauté de hijras et d’une universitaire qui évolue dans un univers profondément sexiste…

Les rencontres sont multiples et souvent insolites; les relations furtives ou durables, mais toujours pleines de sens et riches d’enseignement. Elles sont des témoignages fictifs, certes, mais indéniablement représentatifs du quotidien des populations discriminées en Inde, quel que soit le motif de leur différence. Les échanges entre les personnages se déroulent dans un contexte de violence et de guerre à travers lequel l’auteure retrace l’histoire de l’Inde de ces vingt dernières années. Ce roman Le ministère du bonheur suprême n’est cependant pas dénué d’espoir et de solidarité : l’amour vient éclairer le sombre portrait de l’Inde qui nous est présenté.

Alors, pour faire plaisir à Zainab, Anjum commença à se réécrire une vie plus simple, plus heureuse qu’elle l’avait été et, en retour, le processus fit peu à peu d’Anjum une personne plus heureuse et plus simple.

Arundhati Roy s’inspire ainsi d’une réalité qu’elle connaît bien et qu’elle cherche à faire évoluer à travers son action militante. Le ministère du bonheur suprême conjugue avec talent fiction et réalité dans un roman qu’elle revendique comme une véritable « arme politique » (Courrier International).

Le Ministère du Bonheur Suprême, ARUNDHATI ROY, 4 janvier 2018, Collection Du monde entier, éditions Gallimard. 544 pages, traduit de l’anglais (Inde) par Irène Margit.

Titre original : The Ministry of Utmost Happiness

Rencontre à Rennes avec Arundhati Roy Mercredi 17 janvier aux Champs Libres à 18h30, salle de conférences, 10 cours des Alliés. Gratuit. Contact : 02 23 40 66 00.

Autres dates de rencontre :

ARUNDHATI ROY À L’OPÉRA DE STRASBOURG : Le 20 Janvier 2018 de 15h à 17h

ARUNDHATI ROY AU THÉÂTRE GARONNE À TOULOUSE : Le 19 Janvier 2018 à 18h

https://www.youtube.com/watch?v=jic7qWikf4g

Arundhati Roy commence à écrire son premier roman, Le Dieu des Petits Riens (The God of Small Things) en 1992. Elle le termine en 1996 : le livre est inspiré de sa vie et une grande partie est basée sur ses expériences d’enfance au Kerala.

La publication du Dieu des Petits Riens rend Roy célèbre à travers le monde. Le livre reçoit le prix Booker en 1997 et fait partie de la liste des livres remarquables du New York Times la même année. Le livre est également un succès commercial : publié en mai, il est vendu dans 18 pays dès juin et il atteint la quatrième place sur la New York Times Best Seller list pour la fiction indépendante.

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