Installée au Rheu (35) depuis 2016, l’association Jungle réunit une dizaine d’artistes et collectifs, techniciens et constructeurs autour d’un projet de lieu partagé dédié à la création, à la construction et aux résidences. Pour les 3 ans de cette aventure collective, nous avons pénétré en territoire sauvage afin d’en étudier la faune et les projets florissants…. Welcome to the jungle !
Jungle, n.f. – savane touffue où vivent les grands fauves…
Une aubaine
« On était chacun dans notre coin à payer des loyers conséquents pour des espaces pas forcément adéquats », raconte Cédric, directeur artistique de la compagnie Scopitone (théâtre d’objets), implantée à Jungle depuis les débuts de cette dernière, en janvier 2016. Il n’est pas le seul à avoir fait ce constat. Pour faire face aux difficultés ou par simple enthousiasme pour le projet, ils sont une dizaine d’entités à avoir fait ce pari de la cohabitation et à avoir monté ensemble l’association Jungle. Parmi elles, des compagnies artistiques (Scopitone, Niclounivis, Hophophop!, Bakélite,.), des scénographes et constructeurs (Zarmine, Alexandre Musset), des producteurs et bureaux d’accompagnement d’artistes (Hélène Martin, Hectores), un vidéaste (Greg Bouchet) ou encore une musicienne (Elsa André). Certains se connaissaient déjà, d’autres s’ignoraient, mais ils ont décidé de lier leur destin.
Pour les réunir, un lieu. Une ancienne draperie de 1040 m² louée à un particulier du Rheu (35). « On avait d’abord pensé à demander un local à la ville de Rennes, mais l’attente aurait été de plusieurs années. Alors on s’est tourné vers les particuliers. », raconte Alexandre Musset, constructeur-régisseur et initiateur du projet d’association. Le site est désert à leur arrivée. Ils mettent alors tous la main à la pâte pour en faire un espace adapté à leurs activités. « On a fait le tour des besoins de chacun en termes d’espace et d’utilisation, pour diviser le lieu de manière pragmatique », nous explique Lorinne du bureau Hectores ; et Alexandre de préciser « (…) Il fallait un grand lieu de stockage, un espace de plateau pour pouvoir travailler, et puis des espaces d’atelier pour chaque compagnie ».
L’idée est que chacun puisse conserver son autonomie tout en partageant certains lieux communs : cuisine, salon, plateau, entrepôt, jardin… Par exemple, Alexandre a besoin d’un grand atelier pour ses travaux de construction tandis que la Compagnie Bakélite se contentera d’un plus petit pour son théâtre d’objets. Proportionnellement, la part du loyer reversée par la Compagnie Bakélite sera moins élevée que celle d’Alexandre. Pour Cédric de Scopitone, l’intérêt est évident : « On paye moins cher qu’avant et on a plus d’espace. (…) Tous nos décors sont stockés ici. On a un plateau de répétition, chose qu’on n’avait pas avant. » Un grand espace d’entrepôt est, lui, divisé en parts égales.
Favoriser la coopération
L’intérêt de Jungle n’est pas que pécuniaire. Les trois premières années de vie du lieu semblent avoir démontré que la proximité spatiale occasionne le rapprochement professionnel des différentes entités présentes. En plus de se prodiguer des conseils et enseignements précieux – Alexandre a par exemple enseigné la soudure à Nito de la compagnie Niclounivis – nombre d’entre elles (si ce n’est toutes) partagent désormais, occasionnellement, des projets communs. « Je travaille avec tout le monde ici », nous assure même Cédric.
Les informations, les idées ou les matériaux peuvent circuler rapidement et à toute heure de la journée entre les différents protagonistes. « Ce qui est bien avec ce lieu c’est qu’il est poreux. Tous les corps de métiers se croisent » confirme Marine, du Collectif Zarmine. Il suffit de passer dans l’atelier d’à côté, d’en discuter à la pause midi ou de l’évoquer à la réunion collective mensuelle. Du simple coup de main au projet co-monté, cette coopération fluide et économique est promesse d’efficacité et de qualité, dans des domaines professionnels où le temps et l’argent manquent constamment.
Dès lors, la diversité des profils n’est plus un frein au lien entre les membres, mais représente au contraire un atout pour chacun. « Je reçois des conseils précieux pour créer mes spectacles », affirme Nito, dont le castelet a été fabriqué par Alexandre, tandis que Cédric nous décrit sa collaboration avec Greg Bouchet (MicMac Factory) qui a réalisé des affiches pour ses spectacles. Leurs ateliers ne sont séparés que par le plateau de répétition. Mais Lorinne insiste sur la liberté et l’indépendance des membres de Jungle : « Ce sont des participations pas forcément sur du long terme et c’est surtout pas obligatoire. Chacun en fonction de ses envies et de ses besoins va aller chercher les compétences qu’on a ici, s’il en a envie. Chacun reste libre de son projet. »
Jungleland
Au-delà des projets individuels et parfois partagés, Jungle organise ponctuellement des événements communs. Par exemple les Safaris.
Lorinne nous en parle ainsi : « C’est ce qui fait l’identité de Jungle aujourd’hui. Ce sont des rendez-vous que l’on propose au public. Il vient y découvrir des propositions artistiques, mais aussi le lieu en général, sous une thématique particulière. » L’occasion pour les habitants du Rheu de passer un après-midi entre spectacles, activités et moments conviviaux, là où la « zone » environnante n’offre habituellement rien d’aussi (ré)créatif.
Et si cette « zone » devenait justement un nouveau pôle attractif ? Une ressourcerie prévoit déjà d’ouvrir ses portes dans la même rue que Jungle (rue de la Haie de Terre). L’occasion peut-être de tisser les liens d’un nouveau maillage, d’inventer de nouvelles coopérations.
A noter que l’association Jungle reçoit également des artistes en résidence dans ses locaux, et héberge parfois des événements culturels. Pour en savoir plus, les contacter ou consulter leur site internet…
La Jungle
Atelier.jungle@gmail.com
8 rue Haie de la Terre – 35 650 Le Rheu