Les Bancs voyageurs de Marion Desjardins explorent Granville et ses âmes

Les Bancs Voyageurs Marion Desjardins

Dans Les bancs voyageurs (2024), Marion Desjardins nous invite à un voyage singulier, immobile et humain, au cœur de Granville, une ville portuaire de la Manche qu’elle connaît bien. Ce livre, publié en janvier 2025 aux éditions Cité des Livres, prend la forme d’un carnet de route méticuleusement structuré autour de soixante histoires, chacune se déroulant sur un banc de la ville. Ce récit, d’une belle sensibilité, nous plonge dans les recoins cachés de la ville tout en explorant les facettes de l’âme humaine à travers des rencontres parfois inattendues.

Marion Desjardins est parti à la rencontre des habitants de Granville, un endroit familier qui lui réserve pourtant des trésors d’histoires à découvrir. Aînés, solitaires, amoureux, travailleurs fatigués, tous ces « voyageurs » du quotidien deviennent les protagonistes d’un récit où chaque banc devient un point de rencontre, un lieu de réflexion, mais aussi un microcosme des vies qui s’y croisent.

Marion Desjardins
Marion Desjardins

Le livre est une invitation à prendre le temps d’observer, de s’arrêter et de prêter attention aux petites histoires que recèlent les lieux que l’on traverse tous les jours sans y prêter une attention particulière. Les bancs, ces objets urbains à première vue anodins, se transforment sous la plume de Marion Desjardins en des espaces de contemplation et de partage. À travers ces rencontres, qu’elles soient fertiles ou silencieuses, l’auteure capture l’essence même de Granville, tout en esquissant une fresque intime de ses habitants et de ses paysages.

La démarche de l’écrivaine consiste à aller à la rencontre de l’autre sans préjugés, avec un désir sincère de comprendre et de s’enrichir des vies qui l’entourent. Et lorsqu’elle n’a pas de témoin humain pour ses réflexions, elle s’adonne à l’observation silencieuse, détaillant l’environnement, les bruits, les gestes, qui parfois en disent plus long que les mots eux-mêmes. C’est une forme de voyage intérieur, un aller-retour constant entre le monde extérieur et ses propres pensées.

Les bancs, dans ce contexte, ne sont pas de simples objets de mobilier urbain, mais des points d’ancrage, des témoins de l’histoire, des espaces d’intimité où chacun peut déposer ses pensées, ses émotions. Chaque banc devient le théâtre de petites scènes de vie, et à travers chacune d’elles, l’auteure s’épanouit dans une exploration des rapports humains et de la mémoire collective.

Ce « voyage immobile » que Marion Desjardins entreprend montre qu’il n’est pas nécessaire de partir loin pour découvrir le monde. Il suffit parfois de prendre le temps de s’arrêter, d’écouter, de regarder autour de soi pour ouvrir une multitude de fenêtres sur l’autre et sur soi-même. Les bancs deviennent alors des espaces d’échange où se tissent les liens invisibles de l’existence humaine.

À travers ces soixante récits, l’auteure parvient à capter des instants fugaces, mais d’une jolie puissance émotive. Le livre est à la fois une chronique du quotidien et une exploration de l’intime. Marion Desjardins ne se contente pas de raconter des rencontres, elle nous plonge dans la texture même de la vie, dans ses silences, ses bruits, ses pauses.

Enfin, Les bancs voyageurs est une belle réflexion sur le voyage lui-même, non pas dans sa dimension géographique, mais dans sa capacité à nous transformer. Chaque rencontre, chaque instant passé sur un banc, devient une forme de cheminement, une invitation à l’âme de la ville, mais aussi à celle du lecteur. Et si, au bout du compte, ces bancs étaient les véritables destinations ?

À travers cet ouvrage, Marion Desjardins rappelle que le voyage n’est pas toujours une question de distance, mais de regards et de rencontres. Granville, à travers ses bancs, devient un lieu d’infinité de possibles, un espace où l’on peut se perdre pour mieux se retrouver. Le tout avec légèreté et profondeur.

Les bancs voyageurs de Marion Desjardins, 2004 pages, septembre 2024, 20 euros, ISBN : 9782494831162

Marion Desjardins est l’auteure de trois ouvrages aux Éditions Gallimard : Les mouches noires (1987), Surtout ne me raconte rien (1989), Portrait d’un absent (1994). Elle a également publié Un accident aux Éditions Anne Carrière (2024).

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Rocky Brokenbrain
Notoire pilier des comptoirs culturels, Rocky Brokenbrain pratique avec assiduité depuis des années une danse alambiquée et surnaturelle. Zazou impénitent, il aime le rock'n roll, la guimauve, les grands fauves et, entre deux transes, écrire à l'encre violette sur les romans, musiques et danses qu'il aime... ou pas.

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