Trois BD qui incitent à philosopher, ce n’est pas de trop quand il s’agit de donner des conseils pour diriger votre vie selon vos envies profondes. Leçons simples de philosophie magnifiquement illustrées.
Clémentine est une jeune femme transparente. Elle laisse passer son tour à la boulangerie. Elle rate « l’heure de la salutation au soleil ». Elle « est nulle ». Du moins c’est ainsi qu’elle se voit. Aussi s’est elle engagée à méditer dans un groupe, car un groupe cela facilite la méditation. Surtout si c’est Jean Eudes qui est le gour…, qui l’anime. Vraiment nulle, Clémentine rate le bus et se retrouve avec Antoine (c’est mieux que Jean Eudes non ?). Et en trois albums, le jeune épicier provisoire va faire prendre à une nouvelle Clémentine des chemins de traverse pour l’inciter à quitter sa vie quotidienne, à réaliser ses aspirations les plus profondes comme celle d’ouvrir une librairie-café, à ouvrir les voix du possible en suivant non pas le chemin de Saint Jacques de Compostelle mais celui des « CM », les « chemins des moutons ».
Éloge de la méditation individuelle, les scénarios de Beka prônent à Clémentine un « sois toi-même, toujours simplement ». Impossible de ne pas faire le lien avec le succès immense de tous les ouvrages actuels, qui promettent à tous, moyennant quelques « recettes », le bonheur individuel. Quand Frédéric Lenoir fait appel à Epicure, Tchouang-tseu ou Spinoza, Beka nous livre des préceptes, des leçons ou des contes zen, qui illustrent ses propos et gardent à la BD un caractère ludique et une lecture aisée et didactique.
Ces histoires sont belles et parlantes lorsqu’elles illustrent le talent d’un peintre privé de ses mains et qui réussit à exercer son art en confiant ses pinceaux au vent qui les agite sur la toile. Ou lorsqu’elles démontrent l’esprit de résistance à l’interdiction de la musique quand des hommes ingénieux dotent leurs cerfs-volants de sifflets. Pour égayer ces panneaux indicateurs d’interdiction de stationner devant lesquels il convient de faire une révérence, car ils nous invitent à ne jamais s’arrêter, il fallait des images légères, poétiques, des images symboles de bien être.
Marko remplit ce cahier des charges en nous transportant de châteaux forts en maisons japonaises, d’aurores boréales en sommets pyrénéens. Images sublimes qui confortent le message de joie et de réalisation de soi même offert par un texte parfois touffu. Clémentine sur la couverture de Le jour où le bus est reparti sans elle… a la bouche serrée, le corps en retrait. Le jour où elle a pris son envol, Clémentine lève les yeux vers le ciel regardant l’avenir avec optimisme. Dans le dernier volet, Le jour où elle n’a pas fait Compostelle, Clémentine ferme les yeux, sereine devant la beauté du monde. La boucle est bouclée.
Des sillons dans le sable des temples japonais tournent souvent indéfiniment comme un serpentin autour des pierres. Dans les histoires de ces BD, les vagues courbes tracées par les hommes contournent les rochers et poursuivent leur chemin comme si ces pierres n’avaient aucune importance. Une manière de signifier qu’il vaut mieux poursuivre sa route au lieu de tourner autour des problèmes et des obstacles. Une morale facile et désuète ou un précepte précieux ? À chacun de juger selon sa sensibilité et …. sa morale. Mais un peu d’optimisme cela est toujours bon à lire par les temps qui courent.
Tome 1 : Le jour où le bus est reparti sans elle.
Tome 2 : Le jour où elle a pris son envol.
Tome 3 : Le jour où elle n’a pas fait Compostelle.
Scenario de Beka. Dessins de Marko. Couleurs de Cosson.
Ces trois ouvrages sont édités chez Bamboo Édition.