Le kilt ou tartan, porté en Ecosse depuis le XVIe siècle, aurait été porté en Bretagne à la même époque, soit la première fois en 1548 ; ce qu’aucun document historique n’atteste. En réalité, son adoption est bien tardive, elle date de la fin du XXe siècle. C’est en 2000 qu’un Morbihannais crée le premier tartan aux couleurs de la Bretagne. Aujourd’hui, on en aperçoit de plus en plus chaque année dans la région, notamment au moment du Festival Interceltique de Lorient dans le Morbihan. On en voit aussi dans les fêtes, dans les rues et les pubs des cinq départements. Il existe même le festival Intercelt’kilt. Pourquoi un tel engouement pour ce vêtement ? Pourquoi le kilt est-il devenu culte en Bretagne ? Entre recherche d’identité et appropriation culturelle, Unidivers apporte un début de réponse.
Au XVI e siècle en Écosse, le kilt, appelé belted plaid ou « laine ceinturée » en français, était un vêtement long dont la moitié supérieure pouvait être portée comme une cape, relevée sur la tête ou drapée autour de l’épaule. Cette cape pouvait être de couleur unie ou faite de divers motifs à carreaux selon la richesse du porteur. Au cours du XVIe siècle, la laine devient plus disponible et cette cape commence à être rassemblée et ceinturée : c’est le début du grand kilt. Le grand kilt est le vêtement du guerrier écossais qui lui fournit une excellente protection contre le froid et les intempéries, car il est conçu dans une pièce de laine à carreaux appelée tartan. Il sert aussi à cacher les armes portées à la taille, les mousquets par exemple. Retiré, le kilt est aussi utilisé comme couverture pour dormir dans les bois et les huttes. Les Highlanders, qui vivent dans les landes sauvages, estiment que le grand kilt est trop lourd et trop encombrant, alors vers la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle, le petit kilt fait son apparition avec une seule pièce de tissu porté autour de la taille dans sa moitié inférieure.
Dans la suite de l’émergence du grand fantasme d’une Bretagne prétendue celtique au XIXe siècle (voir notre article), le bruit court à partir de 2000 le bruit que le privilège du port du kilt aux Bretons aurait été accordé en 1548 par Marie Stuart ou Marie première d’Écosse (1542-1587), reine d’Écosse et future reine de France, en remerciement d’avoir été secourue par des marins bretons… Aucune trace historique n’atteste d’un tel fait ni aucune concernant des tartans en Bretagne au XVIe siècle pas plus qu’après, jusqu’à ce qu’un Morbihannais crée ce premier tartan breton en 2000.
Le Kilt, vêtement de guerrier à l’origine, est composé d’une pièce de laine à carreaux faite de lignes horizontales et verticales entrecroisées de multiples couleurs, appelé tartan. Son motif est unique et représente à chaque fois un clan. La tenue est composée de dix accessoires et il faut compter quinze à vingt minutes pour l’enfiler : la chemise Ghillie est une chemise traditionnelle avec un laçage en cuir croisé sur le devant ; le Kilt Hose, ce sont des chaussettes en laine repliées sous le genou et portées avec des fixe-chaussettes ; le Sporran est une sorte de pochette qui pend autour de la taille à partir d’une chaîne ou d’une lanière de cuir ; le Ghillie Brogues sont des chaussures sans languette avec de longs lacets qui s’enroulent autour de la jambe au-dessus de la cheville et s’attachent sous le mollet ; la ceinture est le plus souvent en cuir avec une boucle en relief ; le Kilt Pin est porté sur le coin inférieur du tablier extérieur du kilt : il empêche le tablier de s’ouvrir en lui ajoutant un poids supplémentaire. Il est aussi décoratif et parfois il est le symbole d’un clan ; le Sgian-dubh est le petit couteau noir porté dans la chaussette ; la veste Prince Charlie est la veste généralement réservée aux occasions plus formelles.
En 2000, un Morbihannais crée le premier tartan aux couleurs de la Bretagne. Le kilt devient un symbole de la Bretagne, un acte militant pour promouvoir une culture bretonne qui aime se rêver celtique bien que le fantasme d’une identité celte continue de la Bretagne né à la fin du XVIIIe siècle, avant un revival dans les années 1970 puis 2000, ne repose sur aucun fondement historique. Voir notre article :
Cela étant, ce mouvement est poussé par plusieurs créateurs et plusieurs associations militantes bretonnes. Des Bretons se mettent alors à porter le kilt pour les grandes occasions et affichent leur identité (celto-)bretonne en montrant à tous leur appartenance à un clan. On peut en voir notamment à la fête de la Bretagne, dans des concerts de musique bretonne avec des groupes de rock celtique, tels que Jim Rowlands ou les Kilt Brothers, et même dans les mariages. Au Festival Interceltique de Lorient (56), ils sont 400 représentants. De plus en plus d’associations et de clubs se créent autour de la même passion, celle de porter un kilt. Le Club Kilt du pays de Lorient a été fondé en 2017 et regroupe 90 adhérents.
Un festival a également été créé, l’Intercelt’kilt. Le dimanche 9 avril 2023 avait lieu le premier rassemblement de porteurs de kilt sur l’île de Groix dans le Morbihan. Cet événement était organisé par l‘association Tartan de Groix et son président Gwénaël Mahé qui avait participé à sa création avec sept de ses amis. L’île de Groix, avec ses 200 porteurs, s’est animée aux couleurs des Tartans et des musiques bretonnes. Le tartan de l’île de Groix est composé de six couleurs : il reprend les fondamentaux de l’île : le violet pour les grenats et la bruyère ; le jaune pour l’ajonc et le genêt ; le blanc et le noir pour le Gwenn Ha du, le drapeau de la Bretagne ; Le bleu pour l’Armor, la Bretagne littorale et le vert pour l’Argoat, la Bretagne intérieure.
Tous les tartans sont référencés en Écosse. Il en existe 18 000 différents au monde : en Écosse, en Irlande, en Amérique du nord, notamment dans des provinces du Canada, en Angleterre, en France, etc. La Bretagne en compte 27.
Le samedi 7 octobre 2023, ils étaient 200 adeptes à défiler dans les rues et sur les plages de Dinard en Ille-et-Vilaine vêtus en kilt.
Il existe même une boutique spécialisée en vente de kilts : Le Celtic Corner. Après avoir tenu une boutique-atelier de maroquinerie à Pornic (44), et parce qu’il se sont rencontrés au Festival Interceltique de Lorient il y a longtemps, Mélanie Colin et Léo Vouyoux ont ouvert leur boutique à Lorient (56) en juillet dernier : ils vendent du kilt traditionnel et de la jupe écossaise. Parmi leurs clients de tous les âges, Ewen et Jérémie se sont installés en Bretagne, il y a 3 et 5 ans, et ont décidé ensemble depuis l’été dernier de s’habiller en kilt quasiment chaque fin de semaine. Erwan, lui explique, qu’il trouve le kilt “rebelle”, un peu comme les punks dans les années 80, mais avec l’imaginaire et le système de clans écossais en plus. “Porter le kilt c’est une Liberté que rien ne peut égaler, je trouve dans ce vêtement a quelque chose de romantique, de chevaleresque, et porter “son tartan” – celui qui correspond à son origine celte procure encore plus de satisfaction.” explique un adepte, Reun Jezegou.
En fait, tous les férus de kilts donnent la même réponse : leur besoin et objectif est de faire partie d’une communauté, car ils sont à la recherche d’une appartenance dans un monde où la mondialisation gomme les identités. Alors, ils ont choisi l’identité écossaise, dite celtique. “Et tant pis, si c’est de l’appropriation culturelle qui fait sourire ou grincer les Ecossais. A chacun son cosplay communautaire.“ concluent Ewen et Jérémie en riant.
Bonsoir
Un bel article, mais quelques erreurs.
Je n’ai pas créé le tartan Eusa de l’île d’Ouessant, mais avec sept amis j’ai participé à la création du tartan de Groix.
D’autre part la légende de la photo le tartan de Groix n’est pas la bonne, ceux sont nos amis des Loups de Glencoe à l’Intercelt’kilt 2023 à Groix.
Merci pour ce coup de projecteur sur notre association.
Amicalement