RENNES. CAMILLE SCUDIER ANIME UN POÈME D’ANDRÉE CHEDID EN STOP MOTION

Camille Scudier, 31 ans, fait partie des treize jeunes réalisateurs et réalisatrices choisi.e.s pour la 8e édition d’En sortant de l’école, une émission à destination des 9-12 ans produite par Tant Mieux Prod. Cette année, les réalisateurs ont dû choisir un poème d’Andrée Chedid à animer dans un court-métrage de trois minutes. Camille Scudier met ainsi en image « Regarder l’enfance » grâce la technique du stop motion.

Après ceux de Jacques Prévert ou Paul Verlaine, c’est au tour des poèmes d’Andrée Chedid d’être adaptés en courts-métrages d’animation. Andrée Chedid est la première femme mise à l’honneur dans En sortant de l’école, dont la saison 8 est diffusée en mars 2021 sur France 4. Les treize jeunes réalisateurs et réalisatrices de cette édition se sont installé.e.s dans les studios « Personne n’est parfait ! » à Rennes, attachés à la société de production Vivement lundi !. Camille Scudier a utilisé le stop motion, ou l’animation en volume, afin d’adapter le poème « Regarder l’enfance ».

camille scudier en sortant de l'école regarder l'enfance
Camille Scudier avec une partie des décors utilisés dans son court métrage

Unidivers – Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Comment en êtes-vous arrivée à participer à En sortant de l’école ?

Camille Scudier – J’étais dans un lycée de graphisme à Aurillac et ensuite j’ai fait un DMA Décors et traitements de surface à l’école Boulle, une école de métiers d’art à Paris. C’est un diplôme plutôt porté sur le traitement et la recherche des couleurs et des textures. J’ai suivi une année supplémentaire en sculpture sur bois et j’ai fait pas mal de stages en matériaux de synthèse, donc tout ce qui est moulage, modelage ou sculpture avec des silicones et des résines. Que des produits pas terribles… Puis, j’ai travaillé pendant trois ans dans une boîte de communication. Je faisais des recherches de couleurs pour faire des maquettes et des prototypes de flaconnage de parfum.

J’ai arrêté ce travail, car j’en avais un peu fait le tour et ça faisait un petit moment que je voulais faire du stop motion. J’ai fait des tests seule afin d’essayer de développer un portfolio. Par le biais de festivals, j’ai démarché et commencé à rencontrer des gens et j’ai réussi à faire un stage à Vivement lundi ! sur le film d’Emmanuel Gorgiard qui s’appelle Dorothy la vagabonde. J’ai continué à faire des trucs chez moi, mais je ne trouvais pas trop de boulot parce que je n’avais pas beaucoup d’expérience. J’ai donc suivi la formation Start Motion pendant 9 mois à Lorient. J’ai pu faire des stages à l’étranger, l’un au Danemark, l’autre en Angleterre. Ensuite, j’ai été embauchée à Vivement lundi ! sur le long métrage Interdit aux chiens et aux italiens d’Alain Ughetto dont la fabrication s’est déroulée ici et le tournage à Valence. J’ai enchaîné sur la fabrication de décors pour un court métrage et un teaser, toujours pour Vivement lundi !. J’ai postulé à En sortant de l’école et me voilà.

Unidivers – Qu’est-ce qui vous plaît dans le stop motion ?

Camille Scudier – Je trouve que c’est un métier où il faut une grande variété de compétences, surtout en fabrication. On touche un peu à tout et il y a tout le temps besoin de se renouveler, de réfléchir à comment faire les choses. Je trouve ça super intéressant. Ça fait maintenant quelques temps que j’en fais, même si ça reste une très petite expérience, mais à chaque fois c’est différent. Les projets sont très variés. Il faut toujours trouver des solutions aux problèmes en fonction du design des personnages, selon les choix du réalisateur, etc. Il y a toujours des contraintes techniques qui rentrent en compte en même temps que les contraintes artistiques. Mais en même temps, tout est possible…

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Les personnages principaux du court métrage de Camille Scudier

Unidivers – Quand vous êtes-vous intéressée au stop motion ?

Camille Scudier – Dans mon lycée à Aurillac, on avait des profs au top qui nous projetaient pas mal de vidéo clips, dont certains en stop motion. Je m’y suis intéressée et, pour mon diplôme de bac pro, j’ai fait un tout petit clip en stop motion avec mes piètres connaissances.

Unidivers – Vous avez dit surtout apprécier la fabrication. Y a-t-il quelque chose qui, au contraire, vous déplait ?

Camille Scudier – La fabrication, c’est ce qui m’attire le plus, je me suis focalisée sur cette partie dès le début. Il n’y a pas vraiment de choses que j’aime moins, c’est juste différent. Sur En sortant de l’école, c’était intéressant d’avoir toutes les étapes du film, même si je les avais déjà vues sur des projets à Start Motion. Là, je suis vraiment confrontée à chaque étape et je dois savoir quoi faire et vers où je vais, cette casquette de réalisatrice est intéressante.

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Des décors en cours de fabrication

Unidivers – Dans le cadre d’En sortant de l’école, vous avez donc tout fait de a à z. Pouvez-vous détailler le processus de création d’un court métrage en stop motion ?

Camille Scudier – Pour En sortant de l’école, j’ai choisi le poème parmi une quarantaine. Dans un premier temps, il a fallu analyser le poème. Qu’évoque-t-il ? Quel sujet veut-on traiter ? Il faut bien comprendre le poème afin que ce soit clair pour les enfants. Il faut alors imaginer un scénario, une histoire ou un déroulé du poème.

L’étape suivante, c’est de faire le storyboard et l’animatique avec une tablette et un ordinateur. Ça permet de voir les plans avec des durées et de voir si l’idée fonctionne. Ce dessin animé un peu grossier permet d’avoir une base au travail. La recherche de design et de style graphique pour le court métrage se fait parallèlement. À partir de l’animatique, j’ai fabriqué les marionnettes et les décors. Et après, c’est le tournage. Il faut installer les plateaux, mettre en place les lumières, les cadrages, etc. Il faut faire l’animation pendant le tournage. Parfois, on se rend compte qu’il manque des choses et il faut les fabriquer. Une fois le tournage terminé, on retourne devant l’ordinateur. On exporte les images et on passe à l’étape de la postproduction. Il faut nettoyer toutes les petites imperfections qu’il peut y avoir et effacer les rigs, les bras articulés qui permettent de ternir les marionnettes quand elles sautent par exemple. Tout au long des étapes, on a travaillé avec des musiciens professionnels pour la partie bruitage et musique. La famille Chedid a fait les voix off des poèmes.

Enfin, il faut faire l’étalonnage et normalement c’est fini. Aujourd’hui, je fabrique une boîte pour faire une petite exposition avec une partie des décors utilisés.

 
 
 
 
 
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Unidivers – Comment créez-vous une marionnette ?

Camille Scudier – Personnellement, je ne passe pas trop par l’étape dessin, je suis plus à l’aise sur le modelage et la sculpture. Je préfère trouver les volumes de cette manière, je peux casser et refaire. Au début, je crée la tête de mon personnage principal et après je réfléchis au fur et à mesure. Je fais des recherches de photos ou de choses qui m’attirent ou m’évoquent le thème que je traite. J’utilise l’animatique afin de savoir comment la marionnette va bouger, les actions qu’elle a besoin de faire. Ça permet de savoir comment je vais la fabriquer, de me demander si je dois ajouter des éléments dans les mains afin qu’elle puisse être fixée au sol ou si elle doit attraper quelque chose. Il y a toute une réflexion sur la manière de la fabriquer suivant les mouvements qu’elle doit faire. Par exemple, un danseur ne va pas avoir la même armature qu’un gros monsieur sur un canapé en train de lire son journal, ça dépend de ses actions.

Unidivers – Combien de temps vous prend la création d’une marionnette en moyenne ? Quels matériaux utilisez-vous ?

Camille Scudier – Ça dépend des marionnettes et des projets, mais je dirai un bon mois pour en créer une. La marionnette de Regarder l’enfance est un mix de matériaux. La tête est en résine, il y a de la mousse, du fil d’aluminium, de la silicone… un peu de tout.

Unidivers – Pourquoi avez-vous choisi ce poème « Regarder l’enfance » ?

Camille Scudier – J’ai découvert les poèmes d’Andrée Chedid en travaillant sur ce projet. Ce poème me rappelait un peu mon grand père et ces moments où l’on sent que les personnes âgées ont gardé leur côté enfantin. Certaines personnes peuvent parfois oublier leur âme d’enfant au milieu de leur vie, mais ça revient.

camille scudier vivement lundi en sortant de l'école décors
Camille Scudier prépare une boîte pour exposer une partie des décors et les personnages créés pour son court métrage

Unidivers – Vous avez passé beaucoup de temps avec les autres réalisateurs. Qu’est-ce que cette expérience vous a apportée ?

Camille Scudier – C’est une expérience très riche. Lors de la résidence à Fontevraud, on se découvrait. C’était un peu particulier d’être plongée avec douze autres personnes pendant un mois. On était treize dans une abbaye, c’était un peu improbable. On a appris à se connaître, mais c’est vrai que l’expérience aurait été différente s’il n’y avait pas eu le contexte de la Covid-19. Pouvoir se réunir et aller boire un coup le soir manquait un peu. Mais c’était vraiment une super expérience où l’on découvre les univers de chacun, on se rend compte de la manière dont chacun travaille et voit les choses. Je trouve que c’est humainement riche.

Unidivers – Quels sont vos projets après En Sortant de l’école ? Vous avez un projet de rêve pour le futur ?

Camille Scudier – J’ai été appelée pour aller travailler à Valence sur un long-métrage. Et plus tard, j’aimerai peut-être faire un autre film, je ne sais pas vraiment. C’est déjà un peu le rêve de faire du stop motion, d’être employée et d’en vivre…

Regarder l’enfance, court métrage réalisé par Camille Scudier à partir d’un poème d’Andrée Chedid

L’émission En sortant de l’école – saison 8, produite par Tant Mieux Prod, sera diffusée sur France 4 à partir du dimanche 21 mars 2021 à 16h40

Compte Instagram de Camille Scudier

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