Janol Apin a sillonné toute l’Armorique, d’Est en Ouest, du Nord au Sud, comme un chercheur de trésor pendant cinq ans. Il a posé son matériel et déroulé des câbles au cœur de longues nuits d’hiver dans des clairières, en bord de mer, pour mettre en scène la beauté d’édifices qui sont l’héritage de l’âge d’or de la Bretagne. Rencontre avec Janol, photographe breton au long cours.
C’est à l’AFP que Janol Apin fait ses débuts à Paris en 1988, après avoir suivi une double formation de photographe pour explorer les techniques du laboratoire et de la prise de vue. Passionné très jeune par l’écriture, c’est finalement dans l’image que ce breton originaire de Pontivy trouve son champ d’expression, avec une touche qui lui est très personnelle. Si l’image révèle l’instant, le caractère éphémère ou intemporel d’une présence, Janol aime à se lancer dans des projets parfois démesurés, et cela prend du temps, un vrai luxe de créateur. C’est le cas de sa dernière aventure avec les chapelles bretonnes, dont les clichés sont actuellement exposés à l’Abbaye de Bon Repos.
Le projet Chapel Noz est né suite au retour de Janol en Bretagne, à Guern, en 2010. Comme il l’explique dans un livre d’artiste magnifique sorti l’hiver dernier, l’idée est née « un jour », sur les traces de l’enfance, à Guern justement, en retournant voir la chapelle de Locmeltro, là même où son père l’entraînait avec sa sœur pour jouer à se faire peur à la lueur d’une lampe torche. À l’époque, Locmeltro n’est qu’une ruine, mais la chapelle a retrouvé depuis sa splendeur d’antan. Le métier est là, l’enfant devenu photographe repense à l’un de ses maîtres, Michel Séméniako, qui l’initia à Paris au light painting. Et Janol a de suite su qu’il tenait son sujet.
« La prise de vue de nuit a ses règles : dans l’obscurité tu cadreras, la chapelle en 30 secondes tu éclaireras. Trente secondes après, la photo tu regarderas. Trente secondes plus tard, tu recommenceras » Janol, Chapel Noz
La production en elle-même commence à l’automne 2011 avec un assistant de choix, Jean-Yves Saindrenan, alias Disco, du Faouët, passionné par la matière de Bretagne, faune, flore, géologie, topologie, musique, science et bien sûr patrimoine local, tout est prétexte à nourrir son savoir.
Si Janol Apin n’avait pas prévu un tel engagement sur plusieurs années, il met le paquet et s’immerge complètement à l’occasion de ces retrouvailles avec sa terre natale. De Guern, il rayonne pour visiter plus de 2500 chapelles pour ne retenir que 350 sites pour ses prises de vue. A raison de deux à trois chapelles par nuit, deux à trois heures par chapelle et une vingtaine de clichés pour chaque lieu, on imagine la prouesse technique que représente ce travail de création dont le résultat nous ouvre les portes du merveilleux. Ambiances féériques rendues par la seule force d’une mise en scène sobre liée aux éclairages, à l’intérieur comme à l’extérieur des chapelles.
Dans le silence baigné par un clair de lune et le ciel étoilé, le photographe s’appuie sur son équipe pour mettre en lumière les pierres endormies. Il cadre à l’aveugle aidé par ses assistants qui éclairent tour à tour qui le haut du clocher, qui le calvaire au premier plan, qui la mer toute proche. Il fait froid et humide, mais les photos elles dégagent une vraie chaleur. Ici et là, un élément de notre monde contemporain s’invite dans un des 92 clichés sélectionnés pour le livre : les feux d’une voiture, un vol Paris-Brest, la balise d’une éolienne.
Janol ne recourt à aucun trucage numérique, il laisse la magie du monument et de son environnement opérer. Pas besoin de magnifier, ces lieux sont par essence magnifiques et magnanimes. Autre trace du long travail de repérage et de documentation qu’a nécessité Chapel Noz, les textes du livre, eux aussi très sobres et respectueux d’une histoire locale qui invite chacun à aller plus loin dans sa découverte, s’il le souhaite.
À travers ses clichés oniriques, c’est comme si Janol nous invitait à feuilleter un dictionnaire amoureux de la Bretagne, où la pause l’emporte sur la prose. Un vrai travail de joailler de la lumière, où le diamant n’est autre qu’une architecture de pierre séculaire qui dicte sa loi au créateur, simple artisan d’une mise en scène nocturne éphémère. C’est à l’Abbaye de Bon Repos (Saint-Gelven) que vous pouvez admirer en grand format jusqu’au vendredi 23 décembre ce travail d’inventaire et de sélection, si inspiré, si inspirant.
Avec ces images, le cliché numérique conquiert la grâce qu’avait la photographie aux plus beaux temps de l’argentique, la puissance de la révélation. (Extrait de la préface d’Irène Frain)
Janol Apin expose également un de ses projets, plus récent, aux Anges à Quelven (Guern) durant les deux prochains mois. Avec « Un dernier pour la route », il renoue avec un de ses sujets de prédilection, l’humour, sans jamais lever le pied sur la qualité photographique, un des secrets de fabrication des Éditions Lacarothe qu’il a créées suite à Métropolisson, gros succès de librairie.
Janol Apin Chapel Noz est une exposition photo qui se tient du 18 au 23 décembre 2016 à l’Abbaye de Bon-Repos
– Exposition Chapel Noz –
En utilisant la technique du light painting, l’artiste Janol Apin vous propose avec ses photographies, de (re)découvrir les chapelles bretonnes.
L’accès à l’exposition est compris dans le tarif d’entrée du monument (5€).
Ouverture : Du 1er juillet au 31 août, tous les jours 10 h-19 h. Du 1er sept. au 30 nov. 10 h-12 h / 14 h-18 h (fermé le samedi) et dimanche 14 h-18 h
Chapel Noz exposition à l’abbaye de Bon-Repos
L’ouvrage Chapel Noz de Janol Apin, préface d’Irène Frain, éditions Lacarothe, est diffusé par Coop Breizh, 25 €
Pour contacter Janol Apin ou commander
des photos ou livres :
Tél. : (+33) 6 10 08 49 60
Email : lacarothe[@]gmail.com
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Au bord du canal de Nantes à Brest, l’abbaye cistercienne de Bon-Repos vous accueille pour une halte réparatrice, culturelle et historique dans un superbe environnement : forêt de Quénécan, gorges du Daoulas, allées couvertes de Liscuis datant de 3000 ans av. J.-C.
Fondée en 1184 par Alain III de Rohan et Constance de Bretagne, elle connut des siècles de prospérité et périodes de crise auxquels la révolution mit un point final. Vendue comme bien national, elle tomba peu à peu en désuétude, jusqu’à devenir carrière de pierres. C’est en 1986 qu’une poignée de passionnés fondent l’association des compagnons de l’abbaye de Bon-Repos pour relever ce bâtiment du 18e siècle et lui redonner sa place culturelle en Centre-Bretagne.
Aujourd’hui, l’abbaye de Bon-Repos accueille plusieurs milliers de visiteurs pour découvrir les bâtiments restaurés mis en valeur par de nombreuses expositions d’art contemporain et sur le patrimoine ainsi que de nombreuses animations toute l’année.
Depuis le 5 janvier 1940, l’abbaye est inscrite dans l’inventaire des monuments historiques.
En ce qui concerne les dépendances et les vestiges environnants, ils ont été à leur tour inscrits monuments historiques le 23 février 1990.
L’abbaye est devenue propriété départementale en septembre 2014. Le Conseil départemental des Côtes-d’Armor est dorénavant, propriétaire du monument et du site de Bon Repos.
Abbaye de Bon Repos
Bon Repos, 22570 Saint-Gelven
Téléphone : 02 96 24 82 20
abbaye.bon-repos[@]wanadoo.fr