LA COLONNE VENDÔME. DÉCOUVREZ UN GRAND RÉCIT DE BRONZE

La colonne Vendôme a connu plusieurs restaurations de grande envergure, entre 2014 et 2016, et de nouveau en 2020, afin de freiner l’endommagement de ses bronzes. La colonne Vendôme. La grande armée de bronze, ouvrage collectif publié aux Éditions Norma, retrace le récit de l’édifice et dévoile des images exceptionnelles signées David Bordes. Replongez dans l’histoire d’un des monuments français emblématiques du XIXe siècle !

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© David Bordes

À l’image des nombreuses places parisiennes investies par le pouvoir politique et devenues des symboles pour la royauté, la place Vendôme n’échappe pas à la règle. Elle fut commandée par Louis XIV dans le but d’être une vitrine du pouvoir centralisé de la monarchie. Bien qu’abandonné, le projet laissera cependant place à la construction d’hôtels particuliers, avec au centre une statue équestre de Louis XIV comme sur la place des Victoires, rappel de la prédominance royale. Cette même statue équestre se verra détruite sous la Révolution française pour être remplacée en 1810 par la colonne Vendôme, sous l’impulsion de Napoléon.

Devenue incontournable dans le paysage parisien, la place Vendôme est aujourd’hui le centre de la joaillerie et du luxe, bien connue pour la grande colonne qui en ordonne le centre. La restauration de cette dernière, entre 2014 et 2016, aura permis de revivre l’histoire de sa construction et celle de ses motifs iconographiques.

La colonne Vendôme. La grande armée de bronze est une invitation à un voyage architectural, sculptural et historique inédit ! Publié par les Éditions Norma, l’ouvrage collectif a été préfacé par Jean Tulard. Il est accompagné d’un récit littéraire de l’épopée de la Grande Armée par Antoine de Meaux et illustré d’un corpus photographique exceptionnel réalisé par David Bordes.

La conception de la colonne Vendôme

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Colonne de la place Vendôme Photo © RMN-Grand Palais (MuCEM) / Jean-Gilles Berizzi

Le collectif d’auteurs débute l’ouvrage en faisant la lumière sur la naissance de la colonne Vendôme, un monument commémoratif hors du commun, et en raconte la naissance, l’élaboration et la construction.

Tout commence en 1800, lorsqu’un décret signé le 21 mars 1800, annonce la création « dans chaque département, sur la plus grande place, [d’]une colonne à la mémoire des braves du département, morts pour la défense de la patrie et de la liberté ». La colonne Vendôme fait partie de cette campagne de reconstruction dédiée à la reconnaissance de la Nation envers les soldats tombés au front. Elle sera témoin des nombreux soubresauts et rebondissements politiques et sociaux du XIXe siècle. Si au sommet devait trôner l’effigie de Charlemagne, c’est finalement la représentation du Premier consul, devenu empereur entre-temps, qui va prévaloir, dans la logique de l’arrêt consulaire du 1er octobre 1803, souhaitant  » une colonne à l’instar de celle érigée à Rome en l’honneur de Trajan « .

Dès 1805 c’est Dominique-Vivant Denon qui prend la direction du projet en proposant à Napoléon l’érection de ce monument de bronze qui serait réalisé avec les canons pris aux Autrichiens à l’issue de la bataille d’Austerlitz. Les 400 bas-reliefs dessinés sur les 44 mètres de hauteur de la colonne seront bel et bien fondus à partir de ce butin de guerre, en commémoration de la campagne de 1805 et de l’éclatante victoire des armées napoléoniennes.

Architecture et iconographie

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Jacques Gondoin, Projet pour la colonne Vendôme, dessin, 1805-1806, Paris, © Musée Carnavalet, Histoire de Paris

L’architecture de ce monument est conçue par Jean-Baptiste Lepère et Jacques Gondoin, choisis par Vivant Denon. Lepère dirige la fonte des 1200 pièces de canons ou de couleuvrines (canons à tube long et fin) pris aux Russes et aux Autrichiens. Une inscription est gravée sur le tailloir du chapiteau : « Monument élevé à la gloire de la Grande Armée par Napoléon le Grand, commencé le 25 août 1806, terminé le 15 août 1810 ».

Le récit se poursuit par la présentation de l’architecture de la colonne et sa genèse, du dessin aux 76 bas-reliefs en passant par la version antique dont elle est inspirée : la colonne Trajane. Cette dernière voyait s’étendre sur sa longueur les récits de la campagne victorieuse de Trajan sur les Daces.

Consacrés à la Grande Armée, les 250 mètres linéaires des 425 plaques de bronze de la colonne Vendôme livre un récit grandiose de la campagne d’Austerlitz ainsi que de la vie de cette armée. Parmi les scènes innombrables, difficilement visibles et lisibles depuis la terre ferme, émergent les représentations de bataille, de vie quotidienne des troupes, des costumes de militaires, des paysages et villes. Autant d’éléments qui constituent le  » décor foisonnant de ce récit enlevé « . Les détails des plaques auront permis d’étudier avec précision la vie des différents corps de la Grande Armée (armes employées, la vie au front, le rôle de la musique, des femmes et des enfants). Au total environ 2000 personnages sculptés animent la colonne dans sa verticalité. La troisième partie de cet ouvrage est entièrement consacrée à la Grande Armée de Napoléon et à l’iconographie qu’il en est fait sur la colonne Vendôme.

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La colonne Vendôme. La grande armée de bronze soulève des questions clés quant au monument. D’abord, au sujet de la qualification de son style, qui reste problématique : s’agit-il d’une frise académique, néoclassique ou déjà romantique ? L’ouvrage évoque également l’extraordinaire programme iconographique fixé par Dominique-Vivant Denon, surintendant des beaux-arts sous l’empire. Il ne faut pas oublier qu’en marge de ce chantier colossal, ce dernier est aussi en charge de la construction de l’arc de triomphe du Carrousel, de l’arc de triomphe de l’Étoile ainsi que de la direction du musée central des arts, c’est-à-dire le Louvre.

Il charge Pierre-Nolasque Bergeret de réaliser le dessin complet de la frise, avec deux grandes contraintes. Tout d’abord, il se voit dans l’obligation de prendre exemple sur le système narratif de la colonne trajane. Il doit donner un système d’unité à l’ensemble, une condition sine qua non à la réalisation d’une telle oeuvre par un nombre aussi élevé de sculpteurs attelés à la tâche. Les sculpteurs sont au nombre de 32, parmi lesquels Boizot, Bosio, Bartolini, Ramey, Rude, Corbet, Clodion et Ruxthiel.

Cet ouvrage apporte des clés de lecture quant à la complexité d’ébauche, de création et de construction d’un monument d’une telle envergure. S’appuyant sur un ensemble de photographies contemporaines totalement inédites et exceptionnelles, qui montrent la colonne telle qu’elle n’avait jamais été dévoilée, ainsi que sur des photographies anciennes, des dessins, des gravures et des documents d’époque, ce livre revient sur sa genèse, ses nombreux créateurs, ses aménagements successifs, sa destruction, sa reconstruction puis sa récente restauration. La colonne Vendôme reçut d’abord le nom de colonne d’Austerlitz, puis colonne de la Victoire avant de devenir colonne de la Grande Armée.

Transformations, démolitions et restaurations

Inaugurée en 1810 par Napoléon, la colonne Vendôme connaîtra rapidement de nombreux désagréments, à commencer par sa déportation en 1814 sur l’ordre du marquis de Maubreuil. Un oriflamme en fleur de lys est alors dressé à sa place. En 1833, la Monarchie de Juillet succède à la Restauration, et la statue de Napoléon présente un regain d’intérêt. La représentation de Napoléon en empereur est cependant échangée contre une autre effigie qui le représente en tenue de caporal. En 1863, Napoléon III exige l’enlèvement de la statue et charge Auguste Dumont de reproduire la statue initiale de Napoléon en empereur romain.

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© Bridgeman Images /RDA

Arrive alors la Commune en 1871. Associée à une idée de de dictature et de violence, la colonne est décriée par le peuple français et la Commune de Paris. Sous l’impulsion du peintre Gustave Courbet, la colonne est abattue le 16 mai 1871. C’est seulement deux ans après que le maréchal de Mac-Mahon entreprend une campagne de restauration du patrimoine. Bien qu’elle incarne la tyrannie et l’autoritarisme du pouvoir, la colonne constitue un monument d’intérêt historique majeur. La restauration de la colonne est achevée en 1875.

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Reconstruction de la colonne Vendôme en 1873

Autant d’épisodes et de péripéties que relate l’ouvrage La colonne Vendôme. La grande armée de bronze grâce à de nombreux documents, dessins, gravures d’époque.

Un chapitre entier est dédié à la restauration de la colonne Vendôme en 2014-2016, avec des photographies d’une très grande qualité. De nombreuses altérations étaient présentes à la surface des plaques ainsi que sur les joints de plomb et certaines fixations. Sur les surfaces étaient visibles des patines vertes, bleu-vert et vert-blanc ainsi que des encroûtements. Les parties basses présentaient des traces d’encrassement. Un effacement visuel du monument dans le paysage urbain parisien, de même qu’un effacement des scènes de bas-reliefs qui rendaient nécessaire la restauration. Construite à partir de bronzes destinés à l’artillerie, d’une qualité inférieure à ceux dédiés à la sculpture, la colonne a présenté dès sa construction de nombreux défauts de coulée.

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La restauration de la colonne Vendôme est réalisée par l’Atelier Chevalier, une intervention historique, puisque la première opération de restauration sur la colonne depuis sa réédification en 1875, par l’Architecte Alfred-Nicolas Normand. L’étude menée par le Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques (LRMH) a permis d’identifier les pathologies des bronzes et de comprendre l’origine des importantes variations chromatiques de la colonne.

Les archives font état de problèmes d’approvisionnement en bronze, que le fondeur Jean-Baptiste Launay a résolu par l’adjonction de plomb à l’alliage lorsque la fourniture de matière première était trop faible. La restauration réalisée durant l’opération de 2014-2016 a permis d’adoucir les variations de teintes. Mais quatre ans plus tard, les oxydes de plomb semblent responsables de nouvelles variations de teintes. 

L’Atelier Chevalier accompagne toujours à ce jour la DRAC Île-de-France, l’Agence 2BDM et le LRMH dans l’allègement des oxydes de plomb par microsablage et la réalisation de nouvelles patines au sulfate de cuivre. L’histoire de cette restauration est à retrouver également dans cet ouvrage.

Le récit d’un monument et de sa restauration est à découvrir en détail dans l’ouvrage collectif La colonne Vendôme. La grande armée de bronze, aux éditions Norma. Les images d’une qualité exceptionnelle illustrent avec grande précision l’histoire de ce monument parisien ainsi que de sa restauration.

La colonne Vendôme. La grande armée de bronze

Éditions Norma

Ouvrage collectif, photographies de David Bordes, préface de Jean Tulard

Format : 240 x 360 mm, 304 pages, 350 illustrations

Prix : 75 €, parution le 19 novembre 2021

Les auteurs

Jean Tulard, historien, professeur émérite à l’Université Paris-Sorbonne, spécialiste de Napoléon Ier.

David Bordes est photographe indépendant spécialisé dans le patrimoine artistique et architectural

Jean-Paul Nerrière, membre de l’Académie de Marine.

Antoine de Meaux, romancier, journaliste et réalisateur de Secrets d’histoire de Stéphane Bern.

Claire Maingon, maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université de Rouen, directrice de la revue Sculptures, auteur de L’œil en rut, Norma 2021.

Laurent Baridon, professeur d’histoire de l’architecture à l’université Lumière-Lyon II, Coauteur de Jean-Jacques Lequeu, Bâtisseurs de fantasmes, BnF-Editions Norma, 2018

Les éditions Norma

Fondées en 1991 par Maïté Hudry, les Éditions Norma s’attachent à faire découvrir l’architecture et le patrimoine français du XXe siècle à un public aussi large que possible, spécialiste ou néophyte. Une centaine d’ouvrages, souvent bilingues, remarquablement documentés, auxquels ont contribué plus de 200 auteurs prestigieux, historiens de l’art ou architectes, a été publiée à ce jour.

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