Livre photos. Michael Blann, les cols mythiques ou l’école de la vie

De magnifiques photos suscitent parfois des passions ou des envies. Avec ces Cols Mythiques, le photographe Michael Blann va vous donner envie de côtoyer les plus hauts sommets routiers d’Europe. Et de monter sur votre vélo. Vertige de bonheur garanti.

 

cols mythiquesC’est un livre à offrir aux rêveurs. Ou plus exactement à ceux qui aiment réaliser leurs rêves. Les espaces montagneux sont bien destinés à tous ceux qui ont envie de voir au-delà de l’horizon. Pour cela il faut grimper à pied sur les chemins escarpés. Ou grimper au sommet sur un vélo pour devenir ce petit point minuscule perdu dans l’immensité, mais qui ose se confronter à plus grand que soi. Avancer mètre par mètre en vainquant la pente, au rythme de ses pulsations cardiaques, lever le regard pour deviner ce qui pourrait être une fin, souffler pour emmagasiner l’air de l’altitude, sentir ses jambes répondre à l’effort, transpirer de bien-être, se sentir vivant, ce sont ces sentiments que connaissent tous les cyclistes amoureux de l’ascension des cols. Pour eux, mais aussi tout simplement pour les amateurs de beaux paysages, ce livre de photos prolonge le bonheur estival de la route.

Col du Tourmalet
Col du Tourmalet

La joie de gravir ces cols est aussi une joie visuelle et les pratiquants découvrent avec un réel plaisir que tel rocher à la forme particulière est bien un morceau de la Casse Déserte dans l’Izoard. Ou ce bout de toit de chalet est celui du début du Plan Lachat dans la montée du Galibier, côté Télégraphe. Un langage pour initiés qui ne demande qu’à être partagé. Aucune portion de route ne ressemble en effet à une autre pour celui qui la grimpe par ses propres moyens physiques. En montant doucement, mais sûrement, on mémorise le paysage pour très longtemps comme si l’effort activait la mémoire. Le parti pris du photographe Michael Blann est de coller à cette mémoire et de privilégier l’esthétisme à l’exploit sportif. Bien sûr pour élargir le lectorat potentiel on fait appel à des témoignages de champions cyclistes tant les cols français notamment sont indissociables du Tour de France et de sa légende. Mais l’étendue géographique des cols retenus (Italie, îles espagnoles, Asturies), et parfois leur caractère confidentiel, démontrent que cet aspect sportif est secondaire le sujet ayant déjà été traité souvent par de nombreux ouvrages au titre parfois identique. Les photos de compétitions présentes sont des photos où les coureurs professionnels sont anonymes là encore perdus dans la nature, sujets secondaires.

Col d'Aubisque
Col d’Aubisque

Le photographe s’attache plus aux jeux d’ombre et de lumière sur la crête d’une cime. Des photos sont en noir et blanc pour intensifier le caractère intemporel et parfois hostile des lieux. La corniche du Cirque du Litor, dans la montée de l’Aubisque, source de frayeurs avec ces tunnels de pierre où séjournent des ânes, et son à pic impressionnant, prend ainsi une dimension mythique, justifiant pleinement le titre de l’ouvrage. Souvent en regardant l’image avec attention, on découvre un petit point perdu dans l’immensité, une puce qui ose braver la grandeur des lieux : un cycliste monte. Avec la prise de vue on domine la montagne et on s’amuse à rechercher les lacets, parfois en zigzag quand l’homme a pris son temps pour créer la route cherchant à adoucir la pente comme dans les lacets spectaculaires récemment découverts du Montvernier, parfois en pentes brutales à 20 % ou 25 %, comme si l’architecte routier avait décidé par fainéantise intellectuelle d’aller au plus court, ignorant les efforts futurs des cyclistes.

Le Gothard
Le Gothard

À ce titre les « petits » cols espagnols dominant les plaines ibériques figurent parmi les plus spectaculaires. Ces images vues du ciel ou de sommets avoisinants, en dehors des images de champions, sont d’ailleurs souvent celles qui créent des vocations de grimpeurs. C’est étonnant comme une route en serpentin telle celle du Stelvio ou du Gavia dans les Dolomites italiennes, suscite des envies et des vocations ; changer de bord pour aller plus haut éveille des désirs qui se concrétisent par des virages à la corde où il faut se dresser sur les pédales. À droite puis gauche puis droite, puis gauche, alternance qui rappelle celle des premiers pas, le mouvement pour avancer sur la route et dans la vie. Pour se grandir.

cols mythiques
Mont Ventoux

La fin de l’ouvrage présente très utilement les cartes positionnant les cols retenus et les relevés de dénivelés appris par cœur par les cyclistes qui savent la différence énorme qui existe entre un kilomètre à 7 % de moyenne et un col à 9 %.

Si après cette lecture, vous ne vous sentez pas l’envie de monter rapidement sur un vélo, c’est que vous n’êtes vraiment pas fait pour cela. Mais rien ne vous empêchera de rêver tout simplement. De vous prendre pour Bahamontés ou Gaul. Ou plus prosaïquement pour Monsieur Toutlemonde s’approchant comme jamais des nuages et du ciel.

Cols Mythiques : dans la roue des grands cyclistes,  Photos de Michael Blann, Éditions du Chêne, 224 pages, 35 €.

Le col du Galibier, l’Alpe d’Huez, le col de la Bonette, le mont Ventoux, le col du Tourmalet, le col du Gothard… Ces cols sont les moments forts des tours de France, d’Espagne ou d’Italie. Synonymes de grandeur et de splendeur, mais aussi d’effort et de dépassement de soi, ils représentent des défis pour les cyclistes amateurs ou professionnels. Romain Bardet, Ivan Basso, Lizzie Armitstead, Stephen Roche, Greg LeMond ou encore Andy Hampsten racontent leur passion pour la montagne et leurs expériences intenses lors des ascensions de ces cols mythiques.

 Crédits photos : © Michael Blann

 

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Le duel Anquetil Poulidor sur les pentes du Puy-de-Dôme en 1964, les photos de Gilles Caron dans le Quartier latin en Mai 68, la peur des images des Sept boules de cristal de Hergé, les Nus bleus de Matisse sur un timbre poste, Voyage au bout de la Nuit de Céline ont façonné mon enfance et mon amour du vélo, de la peinture, de la littérature, de la BD et de la photographie. Toutes ces passions furent réunies, pendant douze années, dans le cadre d’un poste de rédacteur puis rédacteur en chef de la revue de la Fédération française de Cyclotourisme.

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