Nous vous parlons d’amour est la nouvelle création de la compagnie Kali & Co, avec Jeanne Benameur au texte et Laetitia Shériff à la musique. Second volet du projet initié par Massimo Dean, la pièce nous plonge dans la douceur et la douleur de notre société avec des textes poétiques puissants et un jeu d’acteur désarmant d’authenticité. Le TNB accueille le spectacle du 26 février au 1er mars 2025, mais toutes les représentations sont malheureusement complètes.
Depuis 2018, le metteur en scène Massimo Dean a laissé le théâtre au plateau classiquement contemporain au profit de projets plus atypiques dans lequel il travaille avec des personnes dites « à la marge », sans formation théâtrale. Dans ses créations, il met en lumière des profils totalement différents. Parmi les interprètes, Asma H. et Katy B.. Toutes deux sont comédiennes dans Nous vous parlons d’amour, nouvelle création de la compagnie Kali & Co et sont aux côtés du metteur en scène depuis le début de son projet. Si Asma avait envie de faire du théâtre depuis petite, Katy ne connaissait pas le milieu et n’avait jamais assisté à une pièce de théâtre. La première a rencontré Massimo Dean en 2020, grâce à des éducateurs, alors que Le Rance n’est pas un fleuve, premier volet du projet, était en cours de création. La seconde a commencé grâce à Myriam, qui était elle-même dans le projet. « Je ne savais pas comment la connaître, elle m’a proposé le théâtre donc j’y suis allée. »
Dans une salle enveloppée de l’univers musical de Laetitia Sheriff, le public découvre une œuvre théâtrale forte et sincère, créée à partir du livre de poésie Nous vous parlons d’amour de Jeanne Benameur (éditions Bruno Doucey). La compagnie Kali & Co présente le second volet du projet initié avec Le Rance n’est pas un fleuve – Les Épiphaniques (à partir d’un texte d’Yvon Le Men). Alors que ce premier abordait des parcours de vie individuels, le deuxième volet prolonge la thématique en nous parlant des liens qui nous lient et nous animent. On y découvre autant de tranches de vie personnelle que des voix qui s’élèvent collectivement. « Jeanne parle beaucoup du collectif, des guerres et de ce qu’elle a vécu pour que chacun puisse se reconnaître dans le public, mais une partie de nous est par moments dans les textes aussi », déclara Asma.
C’est dans la rencontre et dans la discussion que l’auteure a trouvé l’inspiration pour cet ouvrage écrit spécifiquement pour la scène, une première pour elle. « Elle nous a regardés jouer ses textes [NDLR : création Le poulpe peuple la ville, création réalisée à partir de trois textes de Jeanne Benameur] et, au fil de l’eau, elle a tissé des liens dans des moments hors scène », développe Katy. Elle s’est nourrie de sa propre histoire et de celles des interprètes et a écrit 22 poésies qui donnent à voir l’état de notre société. Si le panorama n’est pas des plus glorieux, révélant un monde meurtri par les guerres, une lueur d’espoir éclaire ces zones d’obscurité.
« C’est une femme très douce et apaisante », exprime Asma. Cette douceur se retrouve au plateau, dans des textes ordonnés et mis en scène de manière à créer une narration. Nous vous parlons d’amour donne la parole à des « personnes malmenées » qui, ensemble, créent une cohésion et trouvent un chemin. « On a lu le texte ensemble en septembre [2024] et chacun a réagi différemment. Des textes m’ont fait pleurer parce qu’ils faisaient écho à ma vie. Ça parlait d’une grand-mère donc je pensais à la mienne. À d’autres moments, j’étais plus concentrée sur la lecture, dans la découverte », souligne Asma. Katy confie : « La lecture de ces textes a déclenché le départ de Myriam, parce que c’était trop violent pour elle. Elle n’a pas pu rester dans le projet. »
« On vit les mots qu’on est en train de dire », Asma
La force du texte est accompagnée par celle des comédiennes et comédiens sur scène. Le jeu est authentique, loin d’être formaté par une école : les bras bougent d’émotion, les visages s’expriment sincèrement. Les corps parlent autant que les mots, se mettent à nu. Impulsés par la musique immersive de Laetitia Shériff qui englobe l’ensemble, certains passages rappellent les spectacles de slam, dans la diction d’un texte poétique contemporain et l’impact des mots.
Au fil des tableaux qui se jouent devant nos yeux se dessine le lien qui s’est créé entre les comédiens et comédiens de la troupe. Il habite le plateau dans une sincérité parfois désarmante. « Massimo distribue les textes en fonction de nos personnalités puis il nous raconte des histoires, mais il nous laisse extrêmement libres de notre interprétation », informe Katy. Chaque interprète s’est nourri de sa propre expérience. Le metteur en scène les a accompagnés sans les brider, en les laissant s’exprimer scéniquement. Asma révèle : « À force de dire les mots, tu écris ta propre histoire. C’est ce que j’ai fait, je me suis raconté la mienne. J’ai laissé parler mon corps et j’ai aussi écouté ce que mon cœur disait à mon corps. » À l’instar d’Asma, on sent une volonté collective de se donner corps et âme au plateau et de faire collectif, ensemble. La compagnie Kali & Co nous parle d’amour et donne de l’espoir sur le pouvoir des liens que nous créons.
Du mercredi 26 au samedi 1er mars 2025 (complet : s’inscrire sur la liste d’attente)
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