L’urbanisme à Rennes est au coeur d’un débat houleux depuis des années. En question, la bétonisation et la dévégétalisation de la ville mises en place sous le règne d’Edmond Hervé, puis la densification de la ville entreprise sous les mandats de Nathalie Appéré. Une aseptisation de la ville qui sera allée si loin que la municipalité, se mettant tardivement à l’écoute de ses administrés et des acteurs sensibles à l’environnement et l’écologie, commencera il y a dix ans à faire machine arrière en s’efforçant de revégétaliser la ville. Pour autant, en ce qui concerne la densification, la doctrine est toujours d’aller de l’avant. La raison invoquée : une arrivée continue de nouveaux habitants dans Rennes métropole (qui caracole en tête des villes où il fait bon vivre et étudier indépendamment de l’explosion de l’insécurité dans certains quartiers). Un argument qui est déroulé par Marc Hervé, premier adjoint à la maire de Rennes : densifier la ville en la rehaussant constitue le seul moyen eu égard à la quasi-absence d’espace constructible restant. Le collectif COUDURR (Collectif Uni pour une Densification Urbaine Rennaise Raisonnée), qui s’est constitué il y a cinq ans, y reste farouchement opposé en avançant d’autres arguments. Pour aider nos lecteurs à mieux comprendre situation et points de vue, Unidivers publie le communiqué reçu ce jour par ledit collectif ainsi que l’entretien avec Marc Hervé que notre rédaction avait réalisé en octobre 2022, lequel reste d’actualité.
COUDURR – Communiqué de Presse du 24/02/2025
« Aujourd’hui hélas, les récentes inondations subies sont un bien cruel rappel à la raison concernant la bétonisation des sols et les constructions à outrance.
Et pourtant, demeurent des projets urbains tous contestés par les résidents et notre collectif :
- – Les projets immobiliers d’extension de la ZAC Armorique / rue de la Motte Brûlon, où l’on voit bien hélas, que les les aménagements faits par la mairie afin de rendre ces zones constructibles et les protéger d’un niveau de crue centennale sont clairement insuffisants. Le PPRI 2024 classant d’ailleurs cette zone comme « Zone à risque très fort », un contentieux étant donc en cours avec les riverains.
- – L’îlot à l’angle de l’avenue Patton et du Boulevard d’Armorique, entre maisons individuelles, petits collectifs et coulée verte, avec des immeubles R+7 et R+9, retirant ainsi aux résidents leur qualité de vie, sans parler de la congestion du carrefour Patton/Armorique/Rochester déjà établie et d’une éventuelle modification du PLU d’une zone UG2a en zone UO1.
- – Le projet site Motte Baril qui va amplifier l’effet de densification d’un quartier déjà saturé par le trafic de véhicules. Il est dénombré plus de 1000 logements en projet, en cours de construction ou déjà réalisés dans ce secteur (rue de châteaugiron / av Mgr Mouézy / Bd Villebois Mareuil). Avec à la clé une modification proposée du PLUI contre l’avis des habitants, autorisant à remplacer le R+6 par R+9 étages !
- – Le renouvellement urbain sur la Rue de Vern/ Bd Desgrées, avec également une modification du PLUI dictée par la volonté de porter à R+12 les constructions, une incongruité au vu de l’environnement fait de petits immeubles et de pavillons …
- – Les projets sur Rennes Métropole tels que « Les Gérauts » à Mordelles (projet de construction d’une résidence de 37 logements collectifs dans une zone exclusivement pavillonnaire) ou encore les projets de densification toujours plus nombreux à Noyal-Châtillon-sur-Seiche, durement touchée par les débordements de la Seiche, avec notamment la « ZAC Cœur de Ville/Orson » de hauteur de construction libre (R+2 ? R+4 ? R+17 ?), sans contrainte de végétalisation dans une zone actuellement riche en végétaux. Cela alors même que les caves du cœur de ville, en hauteur et loin de la Seiche, sont gorgées d’eau avec leurs pompes qui tournent sans arrêt …
Face à ces projets, COUDURR s’interroge : les récentes inondations seront- elles enfin le déclic nécessaire pour reconsidérer ces projets ? L’accumulation d’immeubles de grande hauteur, les pannes d’ascenseur récurrentes dans des tours comme Les Horizons (30 étages), la construction de parkings souterrains inondables et la disparition des espaces verts précieux pour l’absorption des eaux pluviales impactent directement la qualité de vie des habitants.
COUDURR en appelle à la raison et demande instamment l’ouverture de véritables discussions entre résidents de la Métropole et responsables de cette urbanisation galopante. Il est temps de cesser d’imposer une vision erronée de l’urbanisme et d’écouter ceux qui vivent ces transformations au quotidien. »
Vous pouvez retrouver ici le point de vue de la municipalité de Rennes, pris en la personne de Marc Hervé, premier adjoint, au sujet de la densification de la ville :

Merci de votre réactivité et de votre impartialité dans ce dossier, en proposant deux versions sensiblement contradictoires de ce que pourraient devenir Rennes et sa métropole.
Restent à mesurer maintenant l’écoute et l’envie de dialoguer des élus municipaux et métropolitains en charge de l’urbanisation … les habitants représentés entre autres par le Collectif COUDURR mais bien au delà, espèrent enfin ce déclic …
Ces choix d’urbanisation (densification, hauteurs ..) pourraient en absence de véritables échanges avec les rennais être un des éléments importants développés par les uns et les autres, lors des prochaines élections municipales …
Le Collectif COUDURR
Bonsoir,
Notre collectif rennais est mobilisé depuis 6 ans contre un projet immobilier porté par un bailleur social et soutenu par la majorité municipale, sans la moindre consultation des habitants. Il s’agissait initialement d’un programme comportant une tour de 17 étages dans un quartier de pavillons et de petits collectifs de 4 étages maximum. Nos études d’impact ont démontré des ombres portées désastreuses pour tous les bâtiments environnants et une densité incohérente par rapport aux infrastructures du secteur. Les riverains ont été caricaturés en NIMBY refusant de nouveaux voisins alors que nos pétitions rassemblant plus de 1000 signataires ont toujours défendu une densification modérée, en harmonie avec l’existant. Après plusieurs actions en justice, seule voix audible pour les porteurs du projet, et une mobilisation sans faille, nous avons obtenu une parodie de concertation dont les conclusions sont en contradiction totale avec les intentions du promoteur et les hauteurs annoncées par celui-ci depuis. La concertation à Rennes est de la poudre aux yeux, un argument de communication. La ville de Rennes et les communes proches comptent pas moins d’une vingtaine de collectifs mobilisés contre la surdensification depuis 2018 et de nouveaux se créent chaque année. Quand on construit une ville sans prendre en compte l’expertise des habitants déjà installés, quand la fluidité fait place à la saturation, le « vivre en intelligence » perd tout son sens. Quant à l’argument de la préservation de la ceinture verte, cette dernière est promise depuis bien longtemps aux promoteurs (voir les zones 2AU du PLUI actuel).
Merci pour la publication de cet article, il permet de mesurer la contestation grandissante des Rennais et des Métropolitains qui ne reconnaissent plus leur cadre de vie quand, il y a encore peu de temps, il faisait bon y vivre.
Le Collectif NANSSA