En service civique à l’association Des idées plein la terre, Soline Tilly et Mathilde Scordia encadreront un atelier de peinture au principe quelque peu surprenant à Dol-de-Bretagne, en Ille-et-Vilaine, ce mercredi 26 avril 2023. Pendant cet atelier, enfants, adolescents et adultes seront conviés à peindre avec… des déchets. Rencontre avec Soline Tilly et Mathilde Scordia les organisatrices à l’origine du projet.
Ce projet un peu fou et très original est né pendant le confinement, comme il en a émergé beaucoup d’autres, inspirées par cette trêve d’activité forcée. Le principe ? Peindre avec des peintures issues de déchets végétaux, ceux que l’on a tous chez soi et qu’on jette le plus souvent sans les utiliser.
” L’idée est de récupérer et venir avec des légumes flétris, abîmés, impropres à la consommation ou encore leurs épluchures et d’en faire des sortes de pigments à peindre“, déclare Soline Tilly, en service civique à l’association Des idées plein la terre, avant de se souvenir : “Une amie de ma mère pratiquait déjà ce type de peinture. Pendant le COVID je me suis lancée aussi.” S’ensuit de nombreuses recherches sur internet et expérimentations plus ou moins fructueuses. Quand en mars dernier, Soline débute son service civique aux côtés de Mathilde à l’association Des idées plein la terre, elle doit, dans le cadre de son contrat, être force de proposition et animer un atelier par mois. Des idées plein la terre a ses bureaux à Dol-de-Bretagne, dans une Zuut, Zone d’Utopies Utiles à la Transition.
Assez naturellement, l’idée s’est imposée d’approfondir collectivement l’expérience de cette peinture particulière au cours d’un des ateliers, dont la seule consigne est qu’il respecte la philosophie et l’engagement écoresponsable de l’association. Soline propose de codiriger cet atelier avec Mathilde qui se joint volontiers à l’aventure, mettant à profit son savoir très important en herbologie et botanique.
“J’ai fait des études d’art, cet atelier est donc la continuité logique de mon intérêt. Mathilde, elle, connaît énormément de choses en botanique et elle pratique aussi l’aquarelle. On a toutes les deux pu nous retrouver dans cet atelier”.
Soline
Aquarellables, les peintures issues de végétaux produites dans le cadre de l’atelier, le sont presque toutes assez facilement. Au programme, des peintures d’Hibiscus, de Colza, de betteraves, d’épinards, de cacao, curcuma, brou de noix, etc. L’atelier s’est préparé en deux phases, la phase d’expérimentation et la phase d’organisation. Pour éviter de tout découvrir collectivement pendant le temps d’atelier et risquer qu’aucun des végétaux amenés par le public ne fonctionne, Soline et Mathilde ont expérimenté une matinée durant différents légumes, fleurs et épices pour retenir la sélection citée. L’organisation de l’atelier a quant à elle duré deux semaines. “Cela servira de base à l’atelier pour qu’ils ne repartent pas les mains vides. Le but n’est pas d’encadrer et diriger le groupe, en donner des marches à suivre strictes, mais d’expérimenter ensemble. Nous ne savons pas tout. Nous évoluons avec le public” explique Soline refusant l’idée d’être une enseignante.
“On a utilisé que de l’eau pour lier les pigments, c’est une méthode perfectible, mais on voulait quelque chose d’écologique et qu’on puisse faire facilement chez soi, sans nécessité de technique ou d’argent” explique Soline soucieuse de rendre accessible l’atelier. Luttant contre cette sélection du public sur critère économique, l’atelier est libre d’accès, gratuit et les marque pages sur lesquels le public peindra sont issus de dons exposé dans la zone de gratuité de la Zuut, siège de l’association. “Ce type de discrimination qui élitise l’art est encore trop présente de nos jours. On veut au contraire que tout le monde puisse venir à l’atelier peu importe son âge, sa pratique artistique ou les pièces dans son portefeuille.”
Le public peindra avec cette base de secours un marque page coloré. Les deux fleurs d’hibiscus et de colza sont infusées et c’est l’infusion qui est utilisée comme peinture. Mouillé, l’hibiscus rend un marque page de couleur rose qui devient violet une fois sec. Le Colza est jaune pâle si aquarellé et prend une couleur plus soutenue s’il est utilisé à sec comme un pastel. Dans le cas de la betterave et de l’épinard, les légumes sont tous deux râpés, mis dans un torchon avec de l’eau puis pressés pour qu’ils rendent l’eau désormais colorée. La peinture de betterave est rose profond et celle de l’épinard verte foncée. Les épices comme le cacao, le curcuma ou le curry sont étonnamment moins mêlés à l’eau, la colorant ainsi facilement. Le sel ou bicarbonate peuvent aussi être utilisé pour ajouter du contraste et faire des effet de couleur. Ainsi, l’épinard devient bleu aux contact de ces cristaux. A vous de jouer avec vos déchets !