En attendant la rave, Astropolis ne s’ennuie pas. L’iconique festival brestois de musiques électroniques ne pouvait se résoudre à un nouvel été absent. Il propose du 2 au 17 juillet une série d’événements qui font la part belle aux performances scéniques rares et audacieuses et aux coproductions entre acteurs culturels. En tout, ce sont 12 rendez-vous musicaux pointus et à taille humaine qui vont animer certains des plus beaux sites de Brest et ses alentours.
Astropolis, le festival de musiques électroniques, va une nouvelle fois agiter Brest cet été. Du 2 au 17 juillet, l’équipage brestois propose une série de 12 événements en petit comité, une édition hors-série et revisitée, intitulée En Attendant La Rave. Car la rave si chère à Astropolis, c’est un peu le Godot de cette année passée… Après un an et demi d’absence, d’espoirs renouvelés puis déçus, de sempiternel report, Astropolis ne pouvait pas se résoudre à ne rien faire.
Astropolis dans la tempête, une lueur à l’horizon
L’équipe d’Astropolis ne s’est pourtant pas tourné les pouces depuis qu’on l’a quittée en février 2020 pour l’édition d’hiver du festival, mais l’année a été éreintante. « L’annulation du festival d’été l’an dernier a été coup de massue », raconte Jessica Bert, responsable de l’action culturelle et de la communication. « Toute l’année, il a fallu faire et défaire. Chaque fois qu’on se lançait dans l’organisation d’un projet, on était vite rattrapés par la situation sanitaire ». Néanmoins, ancré comme il est dans le paysage brestois, le navire Astropolis a tenu la marée, et Jessica souligne tout de même les points positifs de cette année : « On a la chance d’avoir une activité plurielle : l’action culturelle, l’accompagnement artistique, les labels. Se concentrer là-dessus nous a permis de tenir ».
Et malgré les nombreuses incertitudes qui ont pesé sur les festivals d’été depuis six mois, l’équipe d’Astropolis était bien décidée à retrouver son public. Elle a pu compter sur le soutien de la ville et de la région pour trouver des lieux adaptés à des rencontres plus intimes et travailler en bonne entente avec la sous-préfecture pour obtenir les autorisations nécessaires à la tenue de rassemblements conviviaux et festifs. « La plupart des événements ont une jauge de 1000 personnes. Il faudra porter un masque pour se déplacer et consommer assis. Au fort de Penfeld, on demandera un pass sanitaire pour pouvoir alléger ces conditions », précise t-elle.
Astropolis a l’habitude d’essaimer dans Brest et ses environs. Surtout connu pour ses grosses soirées toute la nuit au manoir de Kéroual ou à celui de Kériolet, le festival propose chaque été des animations dans la ville et invite des collectifs bretons à investir l’espace public le temps d’un week-end. On retrouve cette même volonté de décentrement cette année, accentuée par les conditions sanitaires : la programmation est étalée sur douze événements dans six lieux. Inaugurés les 2 et 3 juillet, deux de ces sites sont complètement inédits pour Astropolis : le fort de Bertheaume à Plougonvelin et la nouvelle promenade du Polder. Quatre soirées se tiendront au fort de Penfeld à Guilers, où ont d’habitude lieu les soirées Fortress d’Astropolis. Deux après-midi se sont déroulées aux Ateliers des Capucins, dimanche 4 juillet et mercredi 7. La salle de musiques actuelles La Carène accueille quant à elle trois soirées de concerts, les 8, 9 et 10 juillet, et le musée d’art contemporain Passerelle une sieste électronique le 10 juillet également.
Ce programme d’été si riche a été rendu possible grâce aux nombreuses collaborations qu’a tissées Astropolis avec un réseau culturel plus large. Qu’ils s’agissent de partenaires brestois anciens (La Carène, Passerelle) ou nouveaux (la scène nationale Le Quartz, Les Ateliers des Capucins), mais aussi des initiatives féministes comme le festival Les Femmes s’en mêlent ou l’association de sensibilisation aux violences sexuelles Consentis. Reflet de cette diversité, la programmation de cette année se révèle pointue et portée sur des formes à la fois plus contemplatives et plus spectaculaires de musiques électroniques.
Se réinventer sans se dénaturer, le dilemme des festivals d’été
Yann Tiersen au fort de Bertheaume, Jeff Mills en duo avec le jazzman Jean-Phi Dary un dimanche après-midi, ou encore de grands noms de la techno française en live audiovisuel immersif : Astropolis semble avoir bien changé de visage cette année. « Quand on a commencé à travailler sur la programmation, on ne savait absolument pas si on pourrait proposer des événements debout. On a cherché des projets plus contemplatifs que d’habitude, d’autres formes scéniques qui impliquent d’autres formes d’écoute. C’était l’occasion de montrer les musiques électroniques sous un jour différent », explique Jessica Bert.
Les concerts Immersion à La Carène en sont un bon exemple : lauréats d’un appel à projets visant à favoriser la reprise de l’activité artistique, Astropolis et La Carène coproduisent la création de quatre spectacles audiovisuels en son spatialisé à 360 °. On y retrouvera les producteurs techno chevronnés Electric Rescue, Zadig et Kmyle, le jeune trio NZE NZE, la Rennaise Pidoom (alias KnappyKaisernappy) et les artistes visuels Daff et Florence Bioulac.
Une autre particularité de cette édition est le retour sur le devant de la scène de l’héritage pop rock d’Astropolis. Dans les années 90, l’association s’était lancée par l’organisation de concerts, avant leur coup de foudre pour les musiques électroniques. Cet été, comme un retour aux sources, le festival démarre par une soirée avec le groupe pop Lesneu et le pianiste Yann Tiersen. L’après-midi Les Femmes s’en mêlent, en partenariat avec ce festival itinérant actif depuis 1998, a fait la jonction entre pop et electronica avec deux étoiles montantes de la scène française, Lucie Antunes et Tryphème, l’étonnante musicienne nantaise Anneth Penny et Aasana et Lizzie, DJs du collectif nantais Zone Rouge. De plus, la soirée du 10 juillet au fort de Penfeld sera consacrée à des groupes de rock avec le couple canadien suisse qui forme Peter Kernel, le groupe français Horsees et le duo rennais Gwendoline.
Mais que les amateurs de musiques électroniques dansantes ne s’inquiètent pas. Si Astropolis ajoute des cordes à son arc, le festival ne délaisse pas pour autant son cœur de cible. Au fort de Penfeld sera proposée une soirée aux sonorités mécaniques et industrielles avec de grands noms du genre et habitués du festival, Manu le malin, Electric Rescue & Zadig, et la Rennaise Vanadis (9 juillet). La soirée du 16 juillet sera dédiée à l’electro avec le duo de Detroit Dopplereffekt, l’Allemand Anthony Rother et le Breton d’origine Shelter. Enfin, le closing du festival le 17 juillet mêlera house et techno avec la Parisienne Marina Trench, la Hollandaise Nicky Elisabeth et la Brestoise Swooh.
Malgré les conditions difficiles qu’on connaît, Astropolis est donc parvenu une fois de plus à imposer sa pâte : faire le pont entre les références d’hier et les artistes pointus d’aujourd’hui, croiser les publics en élargissant le spectre des musiques électroniques et mettre en avant une famille d’artistes bretons et français qui sont à la fois le passé, le présent et l’avenir du festival.