Entretien avec Grégoire Lagger, Guérir du diabète

Guérir du diabète de Grégoire Lagger, physiologiste, biochimiste, éducateur de patients, travaillant au sein de l’équipe d’Éducation thérapeutique de Genève, est un ouvrage scientifique grand public de vulgarisation, axé sur la guérison du diabète de type 2. Une maladie qui touche 3 millions de personnes en France et presque 400 millions de personnes de par le monde. Un ouvrage qui s’adresse à tous ceux qui peuvent profiter des récentes découvertes, rendues ici accessibles : ceux qui ont un projet de perte de poids, pour une prévention du diabète de type 2, et puis ceux qui recherchent une amélioration de leur condition physique générale et une meilleure santé métabolique.

 

« C’est une étonnante maladie que ce diabète de type 2. Paradoxale. Elle nous surprend un jour, mais cela fait longtemps qu’elle s’est installée en nous. On dit d’elle que c’est une maladie de civilisation, de plus en plus fréquente, due aux problèmes de la vie moderne, et dépendant fortement de nos comportements de tous les jours. Le diabète nous confronte à la complexité, aux contradictions apparentes. Il nous prend à rebrousse-poil. C’est une maladie qui ne fait pas mal, que l’on ne sent pas, et pourtant elle est très sérieuse et entraîne souvent des complications sur la durée. Il s’agit d’une maladie chronique, c’est-à-dire qui dure longtemps. Il est parfois possible d’en guérir. Les professionnels de santé peuvent nous y aider, mais ne peuvent pas faire le chemin à notre place. Mais au fait, quel chemin ? Y aurait-il une solution miracle ? Nous faut-il tout changer ? Remettre en question toute notre vie ? Ou s’agit-il plutôt de petites modifications à opérer dans notre quotidien ? De prendre conscience d’autres manières de voir les choses, de comprendre et de faire différemment ? Comme tout chemin de vie, le vôtre est unique, original, c’est à vous seul d’écrire les pages de votre propre histoire. Quelques propositions contenues dans ce livre pourraient vous y aider » 

Unidivers – Pourquoi cette maladie est-elle une maladie dite de « civilisation » ?

Grégoire Lagger – C’est une maladie de civilisation parce qu’elle révèle carences et failles de la vie moderne, des changements du monde en tant que « revers » des progrès : urbanisation, mécanisation, sédentarisation, déculturation, dérégulation sociale, et augmentation de la longévité. Elle remet en cause et en partie tous nos comportements de tous les jours : Ainsi, le manque de condition physique, la mauvaise alimentation ou carencée, l’obésité (parlons aussi des personnes en surpoids – + 1 million de personnes), sont les causes premières du diabète. En terme de progression de maladie, les Pays du Sud ont malheureusement rattrapé les Pays du Nord.  On compte désormais près de 400 millions de diabétiques dans le monde. Les patients sont avant tout des victimes. Le diabète de type 2 – prédisposition au diabète – survient quand on est plus intolérants à l’obésité et que la vie est marquée par la sédentarité. Cette maladie potentiellement réversible dépend donc, elle aussi, de certains comportements de tous les jours. Des pistes concrètes pour comprendre, apprendre et amplifier sa motivation à changer sont proposées dans cet ouvrage autant scientifique que pédagogique.

 Pourquoi cette méthode dite de « l’éducation thérapeutique » autour des différents chantiers de recherche ?

guérir du diabèteL’éducation thérapeutique est émancipatrice et à visée humaniste. Elle permet d’accroître l’empathie des médecins pour leur permettre de dépasser la seule prescription et mieux expliquer à leurs patients comment guérir. Elle est une invitation à collecter des savoirs. Ce que ce livre tente de faire, c’est d’offrir des perspectives intéressantes par l’approche de l’éducation thérapeutique du patient afin de permettre à celui-ci grâce au diagnostic du diabète de changer de priorités, de modifier son comportement alimentaire et sa vision du futur. Cet ouvrage d’« Education thérapeutique » repose principalement sur des notions de physiologie humaine et de savoirs issus de différents champs de recherche et d’observations cliniques. Parmi lesquels : « Sciences du sport/Métabolisme musculaire », « Les conditions pour améliorer sa sensibilité à l’insuline », et « Le Biomédical/Diabétologie ». Avec l’Education thérapeutique, on rejoint les approches globale, complexe, humaine, holistique du soin, tout en gardant la rigueur scientifique et le soutien de la technique sans en être esclave, client forcé ou victime.

 Pourquoi un livre « vulgarisé » autour du diabète ? Est-ce pour sortir des schémas, des perceptions habituelles autour du diabète ?

À côté des ouvrages scientifiques, livres précieux qui condensent des années de recherches déjà publiées, il manquait quelques ouvrages de vulgarisation scientifique médicale grand public qui transmettent la complexité de cette maladie chronique, directement liée à une résistance à l’insuline. Le plus souvent, et jusqu’à présent, soit on est dans l’académique, soit on est cernés d’assez près par les vendeurs de poudre de perlimpinpin, aux discours trompeurs. Entre ces deux extrêmes, il me semble qu’il manquait des ouvrages pour aider les gens à comprendre leur maladie. Et en l’occurrence, à propos du diabète, j’avais l’impression qu’il y avait un vide sur la question. J’ai souhaité transmettre l’idée de la complexité, parmi tous les éléments qui interagissent les uns avec les autres. Pour fuir également les réponses simplistes. Car la réalité est différente et moins simple qu’il n’y paraît… face à la maladie.

 Guérit-on du diabète ?

Y aurait-il une solution miracle ? Nous faut-il tout changer ? Remettre en question toute notre vie ? Ou s’agit-il plutôt de petites modifications à opérer dans notre quotidien ? De prendre conscience d’autres manières de voir les choses, de comprendre et de faire différemment ? Tout le monde ne guérit pas du diabète, et pas n’importe qui. C’est une maladie du corps, et par extension, une maladie, « symbolisant certaines « mémoires du corps» avec des contextes physiologiques… On constate que ceux qui sont très bien accompagnés guérissent plus rapidement ou plus facilement que les autres. Certes, pour guérir, il faut avoir les ressources : il est nécessaire aussi que la maladie ne soit pas trop avancée, et que des choses n’aient pas été négligées. Certaines personnes peuvent en guérir grâce à la mise en place de changements qui peuvent en même temps augmenter la qualité de vie et le bonheur. Pour ceux qui n’en guérissent pas, les changements ont de grandes chances d’être bénéfiques : ils diminuent grandement les risques de complications, augmentent le bien-être, l’espérance de vie et d’années de vie en bonne santé. Rappelons que la recherche vers la guérison diabétique repose beaucoup sur les découvertes issues de la chirurgie bariatrique, la chirurgie de l’obésité.

  En quoi ce livre est-il important ?

Ce livre est important, car il met l’humain au premier plan. Il est une approche motivante pour aider les gens – malades ou non. Il aide à se sentir mieux et donne des raisons d’espérer aux patients atteints d’un diabète de type 2 tout en contribuant à la prévention pour les autres. Il note l’évolution des mentalités, propose une perspective plus réjouissante face à cette maladie chronique, et invite à prendre ses précautions de façon à ce que nous n’ayons pas à en subir les effets pervers dans 30 ans. Il redonne également un pouvoir aux gens dans la manière d’aborder leur maladie. Et leur vie. Il offre un projet de vie en proposant d’améliorer le diabète, il suggère de  l’expliquer à ses enfants.  Il est un guide pratique qui propose des pistes de réflexion, donne des éléments d’action et livre des suggestions, ou voies à explorer. Il sert à faire les liens avec le médecin référent et à avoir de bonnes relations avec lui. Enfin, en aidant à dépasser certaines idées préconçues, il permet de gagner en estime de soi et des autres.

Propos recueillis par Laurence Biava

Grégoire Lagger Guérir du diabète de type 2, Editions Ovadia, juin 2014, 22€

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Laurence Biava
Écrivain et chroniqueuse littéraire, Laurence Biava contribue à plusieurs revues culturelles. Elle a créé, en 2011, l’association Rive gauche à Paris afin de créer et de soutenir des événements culturels liés au milieu littéraire ainsi que deux Prix littéraires. Le premier, le Prix Rive gauche à Paris, rend hommage à l’esprit rive gauche parisienne depuis le 19e siècle, et récompense une œuvre littéraire en langue française, qui privilégie la fiction. Le second, le Prix littéraire du Savoir et de la Recherche, est tourné vers tous les savoirs et les sciences.

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