Waterproof à Chartres-de-Bretagne. Les Souffles de LAC Project au centre culturel Pôle Sud

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Photo de Laurent Czaczkes Fontaine/LAC Project

Les Souffles du collectif LAC Project est à découvrir au centre culturel Pôle Sud de Chartres-de-Bretagne samedi 10 février 2024. Dans le cadre du festival de danse Waterproof, en partenariat avec le festival de musiques contemporaines Autres Mesures, une symphonie musicale et chorégraphique explore le lien entre l’humain et la machine et interroge, in fine, la rencontre d’un inconnu et la vie en collectif.

En 2016, le chorégraphe et musicien Mathieu Calmelet et l’artiste visuelle Ludivine Large-Bessette fondent le collectif LAC Project suite aux collaborations régulières sur les projets de l’un et de l’autre. C’est ensuite grâce à Maud Cosson, l’actuelle directrice du centre culturel Pôle Sud à Chartres-de-Bretagne, que le duo rencontre le plasticien sonore Octave Courtin, qui rejoint le collectif, à l’occasion de la Biennale de la Jeune Création à Houilles, dirigée justement par Maud Cosson à l’époque. À la fois collaboration artistique et structure de production, LAC Projet est une forme hybride qui explore les usages sociaux du corps à travers divers médias et s’ouvre aux collaborations à trois selon les projets, à l’instar de Les Souffles. La création est présentée dans le cadre des festivals Waterproof et Autres Mesures, samedi 10 février 2024. 

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Mathieu Calmelet, Ludivine Large-Bessette et Octave Courtin © LAC PROJECT

Unidivers – Comment l’idée de la pièce Les Souffles est-elle venue ? 

Ludivine Large-Bessette Les Souffles réunit nos trois univers et spécificités : le plasticien sonore Octave Courtin crée des sculptures sonores, mais est aussi luthier de clarinette baroque. Mathieu Calmelet a une formation de danseur contemporain et est également musicien électronique et membre de Angle-Mort & Clignotant, groupe d’électro-rap. Quant à moi, je viens du cinéma et je suis artiste plasticienne. Je m’occupe davantage de la mise en scène, de la dramaturgie et ce qui touche à l’art visuel. 

Généralement, le système culturel français aime bien mettre les gens dans des cases, mais même si on a chacun nos spécificités, toute la construction du spectacle s’est faite à trois. Chacun possède un regard particulier et une forme artistique qui sont mis au service du collectif. Octave a par exemple l’expertise technique dans la fabrication d’instruments de musique, mais il ont été construits à trois, de même pour la musique et la mise en scène.  

Unidivers – Avant Les Souffles, il y a eu la forme courte Prélude au souffle en 2020. L’idée d’une forme longue était-elle déjà présente ? Et pourquoi avoir choisi la thématique du souffle ? 

Ludivine Large-Bessette – On avait vraiment envie de créer une pièce dans laquelle la musique et la danse sont au même niveau pour repenser notre lien à la machine. Avant de se plonger dans ce projet expérimental un peu fou, on a mis 4 ans à le créer, nous voulions voir comment on fonctionnait à trois, on a donc amorcé les premières réflexions avec Prélude au souffle en 2020. La proposition de jouer dans un festival à saint Jean de Luz a été l’occasion de fabriquer une première sculpture sonore avec laquelle nous avons créé une performance de 15mn. Ironiquement, cette sculpture n’est finalement pas utilisée dans Les Souffles.

Le souffle est un geste primitif et naturel, qui est autant visuel, corporel que sonore : il y a le mouvement de diaphragme de va et vient et le son du souffle, mais aussi toute la métaphore de la vie.

Dans Les Souffles, au fur et à mesure de la narration, les machines prennent vie, de manière autonome ou en étant activées par les interprètes. Elles entrent en dialogue avec eux et interrogent un lien entre humains et machines qui ne soit pas seulement basé sur l’efficience, la rentabilité ou l’amélioration de notre corps. On place notre propos plus dans une rencontre, que l’humain puisse être touché et influencé par la machine sans forcément être dans la recherche d’une efficience, plus dans la reconnexion, peut-être, à ses émotions et dans l’acceptation de la vulnérabilité, pour ne pas être toujours dans la force et la puissance. 

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Photo de Laurent Czaczkes Fontaine/LAC Project

Unidivers – À l’image des sujets traités par le collectif dans ces précédentes créations, la thématique choisie résonne avec l’actualité, notamment le développement de l’intelligence artificielle. Un sujet qui inquiète une partie de la population, notamment les artistes, et fascine l’autre. 

Ludivine Large-Bessette – Dans les premières pièces déjà, avec Mathieu [Calmelet], il y avait cette réflexion sur le corps. Dans la société actuelle, en tout cas occidentale, il y a ce rapport au corps qui nous embête un peu. D’un côté, on valorise l’esprit et dévalorise le corps, de l’autre, on valorise un corps puissant, sportif, efficace au travail. On aime jouer sur des dispositifs dans lesquels le corps ne peut pas tricher. Le collectif n’est pas dans des chorégraphies où le geste est ornemental, même si j’adore en tant que spectatrice, d’où notre intérêt pour la manipulation d’objets pour que le corps soit placé dans un dispositif dans lequel il est engagé. Ça nous intéressait aussi d’utiliser ce geste a priori utilitaire qui devient finalement plus. L’intelligence artificielle fait partie des choses qui nous préoccupent, d’où le fait de voir si les machines pourraient être vues comme autre chose que des objets qui nous remplacent. Peut-être aussi pour repenser nos modes relationnels aussi.

Il y a cette idée derrière la pièce de l’humain qui essaie de dompter la machine, mais qui est dépassé, car après tout, nous ne sommes pas le centre du monde. Dans Les Souffles, la machine est un objet, mais aussi un environnement qu’on découvre. En tant qu’humain, on ne peut pas s’empêcher de vouloir la dompter et la conquérir, mais il faut accepter qu’on est au sein d’un espace qui nous entoure plus vaste que nous. Il s’agit de se demander comment apprendre à dialoguer avec lui sans chercher à savoir qui est le plus fort.

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Photo de Laurent Czaczkes Fontaine/LAC Project

Unidivers – Se servir de la création artistique pour aborder des sujets sociaux et sociétaux, particulièrement autour du corps, était quelque chose que vous développiez déjà séparément avant la formation du LAC Project ou est-ce né avec sa création ? 

Ludivine Large Bessette – Cette réflexion m’anime aussi dans mes projets individuels et je pense qu’il en va de même pour Octave et Mathieu de manière différente. Elle amène une ligne spéciale à notre création collective. 

La manière dont on a vécu la pièce est liée à la création et au fonctionnement en collectif. Il y a toujours cette idée de savoir comment l’autre peut nous changer dans le bon sens du terme et comment, en s’ouvrant à l’autre, il est possible d’aller dans des directions dans lesquelles on n’aurait pas osé y aller seule. Je pense que c’est pour ça que la création en collectif nous plaît tant. Et le sujet de la pièce, cette rencontre avec un autre, c’est un peu la même idée : comment une rencontre avec quelque chose d’inconnu, si on accepte d’être dans la rencontre et pas dans le conflit, peut nous déplacer pour le meilleur. 

Unidivers – Les arts sont de moins en moins cloisonnés et on sent une volonté des artistes de ne plus être mis dans une case au profit de la transdisciplinarité. Vous-mêmes, vous explorez différents médiums – danse contemporaine, musique, art numérique, performance -. Selon vous, qu’apporte la multiplication de ces médiums dans le discours artistique ?

Ludivine Large Bessette – J’ai envie de dire qu’être transdisciplinaire fait partie de nous, et c’est aussi intéressant dans le rapport au public. On a fait énormément d’ateliers avec Les Souffles, avec des enfants et des adultes. Avoir plusieurs médiums permet de faire découvrir un médium à une personne qui aurait peut-être peur de l’aborder indépendamment de l’autre. La manipulation d’objets peut être une porte d’entrée à la danse pour celles qui n’osent pas aller explorer cette discipline. Pareil pour la musique, elles rentreront peut-être par le biais du corps, de la danse. Il y a parfois des idées reçues par rapport à des disciplines ou à notre capacité à faire et à apprécier certaines choses. Quand on casse ses codes et ses préconçus, des gens peuvent découvrir d’autres pratiques. 

Unidivers – Vos mots résonnent beaucoup avec le fait d’être programmé dans un festival de danse, notamment contemporaine (Waterproof), en partenariat avec un festival de musiques contemporaines (Autre Mesures). Ces deux disciplines traînent encore leur lot de préjugés. 

Ludivine Large Bessette – Complètement, mais ça va permettre que deux publics qui ne se croisent pas forcément se rencontrent. On adore faire des ateliers pour ça justement. On voit des enfants peu enclins à essayer la danse contemporaine, mais par le biais de la manipulation d’objets, ils se rendent compte qu’en fait elle peut être ludique et amusante. 

Unidivers – La création Les Souffles est terminée depuis peu, mais réfléchissez-vous déjà à la prochaine ? 

Ludivine Large Bessette – On développe tout juste la création suivante, Saltation. La première devrait être a priori à la saison 2025. On va continuer les liens entre danse et musique, mais cette fois il se jouera plus au niveau des interprètes, le cœur du sujet, qui seront tous.tes danseurs.ses et musiciens.nnes électroniques. C’est la réflexion de Les Souffles qui se poursuit : comment on compose quand on a un certain corps ou une certaine manière de bouger, qu’est-ce-qui joue dans le corps quand on réagit à une musique particulière faite par nous-même ou par d’autres personnes. 

Unidivers – Je vous remercie Ludivine Large Bessette.

sam. 10 février à 17h00 (durée 50 min). Dès 7 ans.
Centre culturel Pôle Sud, Chartres-de-Bretagne
1, rue de La Conterie.
BP37604
35176 Chartres de Bretagne

Site Internet LAC Project

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