Film Aimons-nous vivants : Jean-Pierre Améris ou l’art fragile de l’émotion contenue

Film Aimons-nous vivants

Il y a dans Aimons-nous vivants quelque chose d’irrésistiblement désuet, comme un refrain qu’on aurait fredonné autrefois sans se souvenir de l’avoir aimé. Cette comédie romantique signée Jean-Pierre Améris, en salle le 16 avril 2025, rassemble Gérard Darmon, Valérie Lemercier et Patrick Timsit autour d’un postulat touchant : celui d’un homme qui, ayant décidé de quitter ce monde (injection en Suisse), trouve sur son chemin une vivante raison d’y rester.

Le pitch semble cousu de fil blanc : Antoine (Gérard Darmon), ancienne gloire de la chanson en ruine physique et morale, monte dans un train pour Genève avec le projet funèbre d’en finir dans une clinique helvétique. Il y croise Victoire (Valérie Lemercier), passagère exubérante, excessive, et un brin fantasque, dont la simple présence fissure le vernis de sa résignation.

Jean-Pierre Améris tisse cette rencontre improbable sur un canevas mille fois déroulé, celui du choc des solitudes, du hasard sauveur et des résurgences de la tendresse. Si le film Aimons-nous vivants ne surprend guère, c’est dans sa capacité à ménager des instants d’émotion discrète qu’il convainc le plus.

Le duo doux-amer fonctionne grâce à la précision des nuances. Darmon, dans un registre crépusculaire, offre une belle palette d’ambivalence : son Antoine est tout à la fois las, caustique, et secrètement en attente. Lemercier, elle, joue une partition connue — celle de la femme borderline au grand cœur — mais parvient à éviter la caricature, injectant à son personnage une sincérité qui finit par toucher.

Leur relation s’écrit en pointillés, avec une pudeur que le film Aimons-nous vivants respecte, jusqu’à un dénouement presque trop moral, comme si l’amour ou la vie devaient inévitablement triompher pour justifier l’existence même du récit.

AIMONS-NOUS VIVANTS I Bande-annonce

La réalisation, sobre, évite les effets de manche. Améris filme ses personnages dans des cadres propres, lisibles, souvent confinés, où l’espace du train devient métaphore d’un entre-deux existentiel. Mais cette rigueur formelle manque parfois de relief. On aurait aimé plus d’audace, de désordre, de trouble. Une mise en scène moins classique, des dialogues moins inégaux.

De fait, les dialogues oscillent entre fulgurances tendres et répliques attendues. Quelques moments brillent (notamment une scène nocturne dans une gare déserte, émouvante sans emphase), mais l’ensemble peine à sortir du moule de la comédie romantique hexagonale.

Aimons-nous vivants ne bouleverse pas. Il rassure. Il caresse plutôt qu’il secoue. Et c’est peut-être là sa limite : en s’attachant à ne pas heurter, le film manque d’élan. L’émotion est réelle, mais sans vertige. On sourit, parfois on s’émeut, mais rarement on est emporté.