Finistèrestes 29, la coopérative qui revend les écarts de tri

Karim Vincent-Viry a ouvert les portes de sa coopérative bretonne Finistèrestes 29 en novembre 2021 et depuis, il a vu éclore près de soixante points-relais à travers toute la Bretagne. La coopérative lutte contre le gaspillage alimentaire et collecte quotidiennement les indésirés du marché : ces fruits, légumes et autres viandes qui ne seraient pas calibrés au format sélectif de la grande distribution. Si l’habit ne fait pas le moine, il ne faut pas se fier à l’apparence policée de vos courgettes ou de vos navets, elle n’en garantit pas leur qualité.

Karim Vincent- Viry crée la coopérative Finistèrestes 29 il y a près d’un an et place sous le feu des projecteurs les fruits, légumes, viandes et poissons mal aimés par le grand commerce, ceux qui ne rentrent pas dans les cahiers des charges. La coopérative compose des paniers avec ces produits laissés pour compte qu’il distribue ensuite en points-relais, présents dans toute la Bretagne,pour qu’ils soient vendus à petits prix.

Finistèrestes 29 se fournit auprès de 800 partenaires producteurs bretons qui offrent un très large choix d’aliments de toutes sortes. De ce fort afflux de produits résulte un quota quotidien de plusieurs milliers de paniers, de quoi approvisionner une grande partie de la population !

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Dans l’industrie alimentaire, la formule “les écarts de tri” désigne les produits qui ne possèdent pas les mensurations de top modèles établies par la grande distribution. Des normes qui préconisent « de la couleur de l’artichaut jusqu’à la courbe des feuilles », se scandalise Karim Vincent-Viry. Avec une expérience de 30 ans dans la grande distribution, le fondateur de Finistèrestes connaît bien les rouages de l’industrie, ainsi que ses défauts.

C’est pendant un apéro que lui vient l’idée de récupérer les légumes mis sur le carreau pour les revendre à prix coûtant : « J’ai 50 ans, j’ai envie de m’amuser un peu et faire ce qui me plait ». Il partage alors son idée à sa fille de 15 ans, qui, emballée par le projet, lui crée une page Facebook dédiée à cette initiative : « À cet âge, ce sont toutes des Greta Thunberg en herbe ». Karim constitue un échantillon test d’une cinquantaine de paniers de légumes qu’il vend 5 € l’unité. Faute d’un fonds de commerce, il part avec sa camionnette distribuer ses paniers. « J’en ai vendu 50. J’ai répété l’expérience les jours suivants et j’en ai vendu 150, puis je me suis rendu compte que ce n’était pas un coup de chance et que les gens en voulaient. » L’affaire était lancée. « Aujourd’hui, nous vendons près de trois mille paniers par jour. »

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La Bretagne étant une grande région productrice légumière, Karim Vincent-Viry s’est d’abord concentré sur la vente de légumes mais après une forte demande de la part de la clientèle, la coopérative s’est mise à vendre des fruits.

Finistèrestes 29 a continué à conquérir de nouveaux terrains et, en collaboration avec un producteur de Lorient, a également commencé à vendre du poisson. En effet, le pavé que nous cuisinons, agrémenté de citron et quelques herbes, ne représente en réalité que 40% de la chair consommable. Les 60% restants ne rentrant pas dans les normes de calibrage des cahiers des charges de la grande distribution, ils passent à la trappe…

Plus récemment, Finistèrestes 29 s’est attelée à la viande. La Bretagne possède beaucoup d’élevage porcin, or « en été, les gens font des côtes de porc au barbecue, ce qui n’est plus le cas en hiver ». Ces écarts de tendance laissent des invendus, récupérés dorénavant par la coopérative. D’autres collaborations sont prévues, notamment avec l’industrie laitière. Et là encore, la problématique du calibrage émerge : « Une grande surface ne peut pas vendre un camembert Président s’il ne pèse pas 300g ». Et s’il pèse 250g ? C’est râpé. Un nouveau butin pour Finistèrestes 29 !

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En plus d’un impact écologique, la récupération de ces marchandises a aussi un impact économique et social. En effet, qui dit production jetée dit production non rémunérée. La réinsertion dans le circuit économique de ces produits induit une rétribution plus juste des producteurs sur leur travail global.

Par ailleurs, les points-relais constituent également un levier d’action. Il en existe deux sortes. D’une part, ceux installés dans des entrepôts inutilisés et entièrement dédiés à la vente des paniers. Ces enseignes sont tenues par des personnes en difficulté ou « cassées par la vie », comme les qualifie Karim. Ce sont des SDF, des retraités ou encore des étudiants à qui il donne la possibilité d’obtenir un travail stable, en CDI. D’autre part, les points-relais peuvent également se situer chez des commerçants ou producteurs locaux, « tous ceux que vous alliez voir et applaudissiez pendant le Covid, les mêmes que vous avez laissés quand les grandes surfaces ont rouvertes ». Finistèrestes 29 les soutient en leur donnant l’exclusivité sur la vente des paniers sur laquelle ils touchent une commission et leur offre ainsi une meilleure visibilité par la clientèle.

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La coopérative Finistèrestes 29 engage un travail au développement exponentiel, et s’est d’ailleurs vue gratifiée du trophée AGRICA en faveur de la lutte contre le gaspillage. L’organisation regorge de nouvelles idées afin d’approfondir son impact à la fois écologique et social. Karim Vincent-Viry aimerait développer un système de point-relais chez les particuliers : « Un jour, j’ai reçu un mail d’une mamie, veuve depuis un an et sans enfants. Elle m’a dit qu’elle avait envie de vendre des paniers pour aider des gens et pour créer du lien social. Je n’ai pas pu rester insensible à cette idée ».

Avec les conditions actuelles difficiles, et celles à venir, la population cherche d’autant plus à optimiser ses dépenses alimentaires tout en conservant un mode de consommation sain. N’en déplaise à Boris Vian, nous mangerons tous les affreux !

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