Avec Evariste François-Henri Désérable nous livre le roman d’une vie. Celle du mathématicien Evariste Galois. Loin d’être grise et terne, cette vie se révèle sous la plume du jeune écrivain, fulgurante et flamboyante.
À propos du mathématicien Evariste Galois, génie de l’algèbre, il y eut des essais, des témoignages de contemporains, quelques articles et thèses. Le livre de François-Henri Désérable est le premier roman sur cet individu hors du commun. C’est un roman, oui. Et non une biographie, bien que le texte et son contenu en présentent tous les aspects. Le livre raconte le destin fulgurant et flamboyant de cet Evariste, ses travaux, et met l’accent sur la fougue, la détermination et le talent précoce – à quinze ans, il découvre les mathématiques, à dix-huit, il les révolutionne – du jeune homme. On apprend beaucoup de choses dans ce récit, notamment qu’il meurt en duel à l’âge de 20 ans et que ses équations révolutionnaires sont conservées à l’Académie française.
François-Henri Désérable, en suivant son héros à la trace, raconte l’histoire d’un homme aussi tourmenté que mature, incompris de ses coreligionnaires, très en avance sur son temps, et dont la reconnaissance sera posthume (tout de même). Le roman se déploie avec une vivacité légère ; l’auteur semble passionné par son modèle en lui empruntant sa grâce et ses hauteurs. Avec habileté et nuances, Désérable raconte la fronde et le courage de ce révolté surdoué, depuis son enfance jusqu’à la prison de Sainte-Pélagie. Il est souvent question d’apprentissages, de disciplines et l’on entend aussi quelques résistances… Tout est affaire de contexte, nous sommes en juillet 1830.
Ainsi fasciné par les propositions mathématiques de Galois, l’auteur fait scintiller son texte de quelques révérences et savantes comparaisons, aussi bien avec Mozart qu’avec Rimbaud. D’ailleurs, le livre est ceint d’un bandeau rouge qui annonce : « Le Rimbaud des Mathématiques » ce qu’on pourra toujours contester… Toujours est-il qu’attentif et généreux, Désérable déploie avec vivacité et lyrisme de grands effets de manche pour saluer l’Histoire dans toutes ses largeurs et la précocité de son artiste en devenir.
Si on est sensible à la densité et à la luxuriance d’un tel texte (on goûte volontiers la maîtrise du détail, la belle ardeur, les formules qui tintent, la richesse et l’intelligence de la narration), on aime moins les sophismes assez nombreux, les redondances et autres phrases curieusement ampoulées. Mais ce ne sont que des détails, car le projet romanesque est ample et bien abouti. Evariste est intéressant en ce qu’il plonge au cœur d’une époque tumultueuse et féconde. Et le roman vaut avant tout parce qu’il rappelle l’existence de ce héros romantique, de ce génie. Tout simplement.