Le feuilleton lié au sort réservé au Grenier des Grands Augustins semble enfin trouver son épilogue. En effet, un accord qui concilie les intérêts des différentes parties a été trouvé. La résidence hôtelière de luxe deviendra réalité, mais elle cohabitera avec un espace spécifique aménagé dans ces fameux derniers étages.
L’affaire semblait dans une impasse et la lutte durait depuis 2 ans maintenant. Si, comme nous vous l’avions annoncé, le CNEA ( Conseil national pour l’Education artistique) et les défenseurs du lieu avaient remporté une précieuse victoire, la bataille n’était pas encore gagnée. La menace pesait encore sur ce haut lieu du patrimoine parisien: ce n’est plus le cas depuis un accord juridique entre Maya Picasso, la fille du plus célèbre occupant de ce lieu, Pablo Picasso, et Helzéar, responsable de la réalisation de la résidence de luxe. Le Grenier semble sauvé, pour le moment.
En effet, Maya Picasso a trouvé un accord avec la société pour assurer la pérennité du lieu cher à son père dans lequel elle a elle-même vécu quelques années. Cet accord permet donc une cohabitation entre les différents acteurs du lieu. La mairie de Paris a ainsi accepté le permis de construire qui autorise donc la transformation de l’ancien Hôtel de Savoie en résidence hôtelière. La mairie, plutôt réticente, n’a donné son autorisation qu’avec la garantie du respect de certains aspects fondamentaux: Helzéar doit prendre en compte et respecter les façades et étages supérieurs classés à l’inventaire des Monuments historiques, de plus le projet signé avec la fille du peintre pour la partie culturelle convient à la mairie. La ville et le Ministère de la Culture souhaitant en effet conserver une « dimension de mémoire dans ce lieu ».
Cet accord prévoit 2 principaux aspects. Tout d’abord, une Fondation Maya Picasso sera créée et disposera du rez-de-chaussée. Cette fondation à vocation éducative aura pour but d’organiser « des activités liées à la connaissance de la vie de l’œuvre et de l’artiste ». Helzéar en contrepartie aménagera les étages supérieurs en chambres et suites. Le grenier sera lui aussi touché par cette rénovation, cependant il ne sera pas transformé en vue d’être exploité de manière hôtelière.
C’est-à-dire à priori plus d’occupation continue par le CNEA, occupant historique et surtout rénovateur des lieux. Cet acteur reconnu avait réussi à les remettre sur le devant de la scène et les rendre accessible au plus grand nombre. Cependant ce grenier ne restera pas exclusivement dans le giron de la résidence hôtelière. Il sera « régulièrement » prêté (ou loué) à des professionnels afin d’organiser « des conférences d’hôtes privilégiés, experts et chercheurs en relation avec l’œuvre de Picasso ». Reste à savoir ce que régulièrement veut dire bien entendu. Le CNEA reste donc vigilant et demande un plan d’occupation précis et non de simples paroles.
On peut donc se réjouir qu’un tel lieu ait pu être sauvé, en partie, d’une exploitation purement commerciale. On se réjouira aussi que des acteurs prestigieux du monde culturel se soient mobilisés pour sauver notre patrimoine, mais également qu’un accord par négociation ait été possible et que le bon sens ait pris le dessus. Il reste cependant quelques interrogations. En effet, cet accord concerne uniquement Picasso. Quid des autres occupants prestigieux de ce lieu ? Seront-ils aussi mis à l’honneur ? Le peintre espagnol semble occuper toute l’attention alors même qu’il existe déjà un musée dédié à son oeuvre. On peut aussi observer que le Grenier perd sa vocation culturelle exclusive. Un recul qui peut inquiéter, on ne peut en effet que redouter que ses évènements (expositions, concerts, soirées théâtrales ou accueil de milliers d’élèves d’écoles, de collèges et de lycées) se fassent de plus en plus rares au fil du temps.
Il s’agit indéniablement d’une bonne nouvelle pour le monde de la culture et il ne faut pas faire la fine bouche. La mobilisation importante et la détermination de quelques acteurs ont permis d’obtenir ce résultat salvateur, maintenant il faut que tout se mette en place dans les meilleures conditions possibles. Le lieu s’est maintes fois réinventé, il doit le faire une nouvelle fois, en espérant qu’il réussisse.
Actualités CNEA: Le 7 juillet 2015, six mois jours pour jours après l’attentat contre Charlie, a été
inaugurée, sous la présidence de M. Jean-Paul Delevoye, président du Conseil économique, social et environnemental, l’exposition de Guernica à Charlie, au Groupe IGS, nouveau siège du CNEA. Cette exposition sera présentée à Lyon en octobre prochain. Les établissements scolaires pourront bénéficier de visites à titre gracieux. Des informations relatives aux dates et lieux seront diffusées en septembre.