Brest : du 13 au 19 juillet 2016, 1 050 navires se sont réunis lors des fêtes maritimes. L’Hermione a connu un grand succès auprès des visiteurs. Adèle, étudiante de 22 ans, revient sur son expérience de volontaire à bord de la célèbre frégate et sur son escale à Brest 2016
« Pour que vive la liberté, il faudra toujours que des hommes se lèvent et secouent l’indifférence ou la résignation ». Gilbert du Motier, Marquis de La Fayette
Pour cette 7e édition, les fêtes maritimes ont réussi à attirer plus de 700 000 visiteurs, autant que lors de l’édition précédente qui marquait leurs vingt ans. Tous les quatre ans depuis 1992, le port de Brest donne rendez-vous aux passionnés et aux curieux pour l’un des plus gros rassemblements de navires de France. Venus du monde entier, les voiliers, frégates et autres goélettes s’ouvrent aux visites, manœuvrent dans le port, avant de conclure la semaine par une grande parade maritime de Brest à Douarnenez.
Cette année, l’incontournable Hermione y a fait escale. La réplique de la frégate utilisée par La Fayette lors de la guerre d’indépendance en Amérique est le fruit de l’association Hermione-La Fayette, qui s’investit dans le projet depuis 1997. Elle relève un véritable défi technique en assemblant plus de 400 000 pièces de métal et de bois, dont un mât de 54 mètres, à Rochefort. Une fois achevé, le navire s’engage en 2015 dans une traversée de l’Atlantique, direction la côte Est des États-Unis. Un voyage de 7 500 miles marin, soit 13 000 km, qui dure quatre mois.
Adèle, étudiante à Sciences Po Rennes, nous raconte son expérience de volontaire à bord de L’Hermione.
Unidivers : Comment t’es-tu retrouvée à bord de L’Hermione ?
Adèle : Quand j’ai appris en 2014 qu’ils cherchaient des volontaires, j’ai envoyé ma candidature le soir même. C’est un projet tellement énorme ! J’ai été acceptée et j’ai reçu une formation de trois jours à Rochefort. Je suis revenue comme bénévole sur le chantier de mars à août 2014 : de cette manière, j’ai appris à connaître le bateau. En septembre ont eu lieu les essais en mer, pour tester l’équipage et le bateau. Puis en 2015, le voyage inaugural aux États-Unis. J’ai embarqué fin juin à Philadelphie et je suis restée deux mois à bord. On a fait escale à New York, Boston, Saint-Pierre et Miquelon… Cet hiver je suis retournée sur le chantier pour l’entretien du navire. Et le 4 juillet j’ai rembarqué à Saint-Malo pour trois semaines, avec des escales à Brest et à Rochefort.
U : Quel est ton rôle dans l’équipage ?
A : On est un équipage de 80 personnes : 20 marins professionnels et 60 volontaires comme moi, qui ne sont pas forcément marins. Moi je suis « gabier ». C’est le matelot qui monte dans la mâture pour entretenir les voiles et qui les manœuvre depuis le pont. Il faut connaître le nom, l’utilité et la place exacte de chaque cordage… Et il y en a 150 ! On fait chaque jour deux quarts de quatre heures, un pendant la nuit et un pendant la journée. C’est difficile de sortir à minuit prendre son quart alors que le vent est très fort, qu’il pleut… On galère à faire notre travail, mais après on est content, on l’a fait tous ensemble.
U : Quelle est l’ambiance à bord ?
A : On travaille en groupe de vingt personnes, donc on veille les uns sur les autres. Ça crée des liens très forts. C’est obligé vu les conditions de vie et de travail, la promiscuité. On est tous liés par une même passion alors qu’on est issus de milieux très différents. Lors de la traversée de l’Atlantique, il n’y avait aucun contact possible avec sa famille ou ses amis, seuls les officiers envoyaient un mail et une petite vidéo par jour. Mais c’est génial aussi de ne pas capter, on partage beaucoup plus avec les gens qui nous entourent ! Lors des escales, l’ambiance à bord est très différente. On devient guide et on peut accueillir plus de 3 000 visiteurs par jour…
U : Que t’a apporté ton expérience à bord de L’Hermione ?
A : Ça m’a vraiment changée. J’ai appris beaucoup de choses au niveau technique, à travailler dans des conditions extrêmes, à vivre en collectivité. J’ai l’impression d’avoir appris plus de choses sur L’Hermione que pendant mes deux années à Sciences Po ! (rires) et en mer, tu peux voir des choses dingues ! Une fois, en partant vers le nord des États-Unis, on a traversé un banc de baleines… Je me suis accrochée au bateau, je me disais qu’une baleine allait nous déstabiliser !
U : Que penses-tu de Brest 2016 ?
A : C’est génial, c’est le rassemblement des plus beaux bâtiments d’Europe, voire du monde ! Pour nous c’est l’occasion de visiter d’autres navires, de rencontrer l’équipage, c’est un vrai échange. C’est génial, surtout pour moi qui ne suis pas marin et qui ne connais que L’Hermione.
L’Hermione, Marquis de La Fayette, fêtes maritimes, Brest 2016, Finistère
*******************************
L’Hermione : la Frégate de la Liberté
Un peu d’histoire grâce à l’association Hermione-La Fayette
« Du premier moment où j’ai entendu prononcer le nom de l’Amérique, je l’ai aimée ; dès l’instant où j’ai su qu’elle combattait pour la liberté, j’ai brûlé du désir de verser mon sang pour elle ; les jours où je pourrai la servir seront comptés par moi, dans tous les temps et dans tous les lieux, parmi les plus heureux de ma vie. » La Fayette
Le marquis de La Fayette est né en 1757, il a joué un rôle décisif aux côtés des Américains dans leur Guerre d’indépendance contre le pouvoir colonial britannique, il reste un symbole et est citoyen d’honneur des États-Unis. Reconstruire l’Hermione, la frégate qu’il emprunta pour gagner l’Amérique, c’est lui rendre un hommage authentique et conserver la mémoire d’une grande aventure de solidarité entre les hommes.
Dans la mythologie grecque, Hermione est la fille de Ménélas et d’Hélène, cette dernière étant elle-même fille d’Océan. Hermione serait donc la petite fille d’Océan.
Au XVIIIe siècle, l’Hermione est le nom d’une frégate construite à Rochefort. Rochefort, ville nouvelle du 17e siècle doit sa naissance à la décision de Colbert d’implanter sur les rives de Charente un nouvel arsenal du Royaume de France dans le but de construire, armer, approvisionner et réparer une flotte de guerre capable de résister aux assauts ennemis.
Une frégate est un navire à trois-mâts et un seul pont de batterie. L’Hermione est une frégate de 12, c’est-à-dire qu’elle est armée avec 26 canons de 12 livres (6 kg) et 6 canons de 6 livres (3 kg). En temps de guerre, elle protège le commerce, sert en éclaireur des navires plus gros (les vaisseaux), transmet les signaux et porte secours aux bâtiments endommagés. C’est un navire spécifique du XVIIIe, de dimensions modestes par rapport aux forteresses flottantes qu’étaient les vaisseaux de 80 ou 100 canons. Une décision du 02/11/1778, approuvée par le roi conduira à la construction en 6 mois de l’Hermione. Le 28 avril 1779, l’Hermione est mise à la mer.
L’Hermione en Amérique
Le 10 mars 1780, le Marquis de La Fayette embarque sur la frégate Hermione commandée par Louis René Magdeleine Le Vassor de La Touche. Après 38 jours de mer, le 28 avril, La Fayette débarque à Boston.
S’étant mise à la disposition des Américains, l’Hermione repart le 14 mai pour une mission de surveillance de la côte entre la baie de Boston et celle de Penolscot.
Le 7 juin, l’Hermione croise à proximité de la pointe est de Long Island. La Touche aperçoit quatre voiles. L’une d’elles est celle de la frégate anglaise l’Iris armée de 32 canons. Lors du combat, le gréement de l’Hermione est durement touché. Mais le feu des Français paraît supérieur et les Anglais rompent le combat. L’Hermione a tiré 260 coups de canon en une heure et demie. Il y a 10 morts et 37 blessés côté français. La touche est blessé au bras.
Le 16 mars 1781, la frégate participe à une bataille dans la baie de Chesapeake.
Le 4 mai, le Congrès Américain est reçu à bord de l’Hermione.
Le 21 juillet, l’Hermione tire 509 coups de canon lors de la bataille de Louisbourg (Canada).
Le 25 février 1782, retour de l’Hermione à Rochefort.
L’Hermione va reprendre sa mission d’escorte de navires marchands notamment en Inde.
1793 : 14 ans après sa construction, l’Hermione touche des hauts-fonds au large du Croisic (près de l’estuaire de la Loire). Le Capitaine Pierre Martin fait évacuer l’équipage et l’Hermione sombre quelques heures plus tard.
Depuis juillet 1997, l’Association Hermione-La Fayette s’est lancée dans une formidable aventure, la reconstruction de la frégate Hermione, navire, qui, en 1780, permit à La Fayette de rejoindre les insurgés américains en lutte pour leur indépendance.
Reconstruire l’Hermione, c’est reconstituer un élément de notre patrimoine maritime. C’est engager un grand chantier au service de l’économie et de la culture de toute une région, parce qu’on a besoin de mémoire pour construire l’avenir.
Un navire a jamais lié à la légende de La Fayette
Été 1776, la rupture est consommée entre l’Angleterre et les « insurgents », partisans de l’indépendance des colonies anglaises en Amérique du Nord.
En janvier 1779, de retour d’Amérique où il s’était porté volontaire au service de la cause américaine, Gilbert Motier, marquis de La Fayette, gentilhomme français âgé de 21 ans, s’efforce d’obtenir pour elle le soutien officiel de la France.
Il réussit à convaincre le roi Louis XVI et son état-major d’apporter une aide militaire et financière aux troupes du Général Washington.
Le 21 mars 1780, le jeune major général de La Fayette embarque à bord de l’Hermione. Il part combattre aux côtés des insurgés américains qui luttent pour leur indépendance.
Il débarque à Boston après 38 jours de traversée et rejoint le général Washington pour lui annoncer l’arrivée imminente des renforts français.
Dix-huit mois plus tard, les insurgents américains, auxquels s’est joint La Fayette, remportent dans la baie de la Chesapeake sur mer, puis à Yorktown sur terre des victoires décisives avec l’appui des troupes françaises conduites par Rochambeau et de Grasse.
Association Hermione-La Fayette
Arsenal maritime
Place Amiral Dupont — BP 70177 — 17308 Rochefort Cedex — France
info[@]hermione.com
Tél : + 33 (0) 5-46-82-07-07
Fax : + 33 (0) 5-46-82-07-17