« Toutes les civilisations ont rêvé d’un jardin mythique », assure Michel Damblant en citant ceux d’Adam et Ève, d’Hatchepsout, des Hespérides, de Quetzalcoatl ou de Charlemagne. Le paysagiste a créé le sien près de la Pointe des Poulains à Belle-île. Une expérience magnifique à découvrir sur place ou avec l’ouvrage Le Tour du monde dans son jardin.
Le grand voyageur rappelle d’emblée que les philosophes grecs avaient constaté qu’ils raisonnaient mieux en cheminant sous les rangées d’arbres. Ils en firent donc planter et créèrent l’école péripatéticienne – du grec « déambuler sous les plantes ». Curieusement, Michel Damblant a commencé par en arracher ! Il faut dire que sa parcelle était encombrée de grands pins sous lesquels rien ne pousse. Et puis ceux du voisin suffisaient à former un cadre digne de ce tableau en gestation.
Après avoir vécu longtemps en Afrique, Michel Damblant s’installe paysagiste dans l’île bien-nommée. Il s’offre un petit lopin de terre proche du fort de Sarah Bernhardt où il plante des centaines de végétaux.
« La recherche systématique de leur provenance est devenue une passion, car elle s’est enrichie de l’histoire de son découvreur – qui n’était pas forcément botaniste », précise l’auteur, heureux de constater qu’intuitivement il avait rassemblé les plantes en fonction de leurs origines, « les eucalyptus, callistemons et mimosas (découverts par James Cook) à l’abri du froid. Les lavandes, thyms, cystes et romarins (collectés par Pierre Belon dans le bassin méditerranéen au XVIe sicèle) dans le coin le plus sec du jardin. »
Le jardinier cultivé poursuit en demandant si on sait d’où vient l’hortensia que bien des Bretons croient endémique à leur région. « De l’île Maurice ? » hasarde-t-on. « Et non, ils furent rapportés du Japon, tout comme les camélias, par Angelbert Kaempfer dès 1690 ».
Autant de passion ne peut que se partager. C’est ce que Michel Damblant fait en ouvrant son jardin bellinois à la visite et en publiant cet ouvrage, une somme qui s’apparente à une mini encyclopédie – même s’il réfute le terme –, car elle regroupe par ordre alphabétique les plantes et les découvreurs. De A à Z… enfin presque, car on commence avec les agapanthes pour conclure avec Wuillaumez – celui qui recherchait La Pérouse désespérément.
Chaque double page s’agrémente de sublimes photos de Jean-Yves Guillaume, de cartes géographiques, de planches botaniques et/ou de dessins de Michel Damblant. Outre la carte d’identité de chaque plante, il livre ses conseils de plantation, une riche bibliographie et ses suggestions de visite de parcs et jardins, privés et publics, un peu partout en France, mais aussi en Belgique, aux Pays-Bas… Un sacré voyage dans le monde !
Rien d’étonnant de la part de celui qui pense, comme Michel Foucault, que « Le jardin, c’est la plus petite parcelle du monde et puis c’est la totalité du monde ». Tellement total, son monde qu’il n’oublie pas l’Afrique, continent qu’il évoque dans son ouvrage précédent, Des jardins au Sahara, et vers lequel partent ses bénéfices pour financer des potagers d’écoles et des maraichages. Un regard qui va très au-delà des pâquerettes ! Michel détourne son regard vers l’horizon et murmure : « le jardin est un espace parfaitement défini où l’on se projette à l’infini ».
Michel Damblant Le Tour du Monde dans son jardin, 600 photos et planches, Editions Géorama, 290 p., 39€
Pour lui rendre visite :
Michel Damblant
Jardin Eden du Voyageur
Bordery (face au chemin de la plage)
56360 Sauzon
Pour en savoir plus sur le projet d’Afrique : ici