La 27e édition des Journées nationales Prison (JNP) se déroulera samedi 20 novembre 2021, à l’Espace Beaulieu, à Nantes. Au programme : table-ronde et ciné-débat autour du thème de l’année « Prison : Une communauté à part ? ». Unidivers a rencontré Étienne Hérard, bénévole au sein de l’association Prison Justice 44, pour discuter du programme et des enjeux liés au thème de cette année.
Orchestrée annuellement dans l’Hexagone par le Groupe National de Concertation Prison (GNCP) et organisée à Nantes par l’association Prison Justice 44, la 27e Journée nationale Prison (JNP) sera divisée en deux parties. Dans un premier temps, une table ronde autour du thème de l’année, « Prison : une communauté à part ? », est prévue de 10h30 à 12h30. Dans un second temps, vous pourrez assister à une séance de ciné-débat autour du film Les drapeaux de papiers en présence de son réalisateur Nathan Ambrosioni, de 13h30 à 16h00.
Unidivers s’est entretenu avec Étienne Hérard, ancien éducateur justice et bénévole depuis plus de 30 ans au sein de l’association Prison Justice 44. Découvrez le programme de cette journée, mais aussi les enjeux et réflexions liés au thème « Prison : Une communauté à part ? ».
Unidivers – Pouvez-vous nous en dire plus sur le programme de la 27e Journée nationale Prison (JNP) qui se déroulera le samedi 20 novembre à Nantes ?
Etienne Hérard – L’objectif de la table-ronde sera de confronter un certain nombre d’enjeux autour de la question : « Comment la prison peut-elle freiner le retour d’une ancien détenu au sein de la société ? ». Lorsqu’un individu sort de prison, il a du mal à se retrouver en tant qu’individu, mais aussi à retrouver sa famille, son travail, etc. La prison, même des petites peines, casse des parcours. Nous ne sommes pas des anti-prison, mais nous faisons en sorte que la prison serve exactement à ce qu’elle devrait servir : punir, apaiser la victime, mais aussi faire de la réinsertion. À travers ce débat, nous voulons faire comprendre que la prison a au moins ces 3 missions-là. À noter que l’explication sera sans doute orientée sur les peines alternatives et aménagements de peine. Il serait peut-être important de développer des séquences de formation à l’extérieur, existant déjà en très petit nombre, afin d’aller vers des prisons un peu plus ouvertes.
Quant à l’objectif du film Les drapeaux de papier de Nathan Ambrosioni, il sera de dévoiler certaines réalités sur la prison pour ensuite en débattre. En tant que membres de l’association, nous pourrons témoigner de la difficulté d’être une prison, mais aussi de la difficulté d’être surveillant, car eux aussi sont enfermés dans une espèce de carapace. Ce ciné-débat sera l’occasion de montrer que dans cette communauté à part entière qu’est la prison, il y’a un certain nombre d’acteurs parmi lesquels certains travaillent, d’autres subissent, d’autres vivent et quelques-uns meurent.
Pour faire référence au titre du film, on appelle un drapeau de papier une feuille de papier que le détenu fait passer à travers la porte de sa cellule ou agite lorsqu’il veut appeler un surveillant. Dans l’environnement bruyant d’une prison, avec un surveillant pour 80 détenus, les détenus crient souvent « surveillant, surveillant ! », mais il ne vient pas toujours, car il est occupé à gérer autre chose. Avec ce drapeau de papier, le surveillant peut l’apercevoir de loin.
Unidivers – Quels sont les objectifs de ces Journées nationales Prison ?
Étienne Hérard – Le premier objectif de cette journée est d’essayer de parler de la prison, à ceux qui ne s’y connaissent pas ou qui n’y ont pas correctement réfléchi, en dehors d’un évènement porté par la presse de façon exponentielle. Nous sommes ici pour essayer de faire comprendre à monsieur tout le monde que c’est un sujet beaucoup plus compliqué.
Le second objectif est de faire réfléchir les citoyens sur les thèmes de la prison, la justice, le sens de la peine, mais aussi sur la société.
Unidivers – Pourquoi, selon vous, il est indispensable de parler de la prison à « monsieur et madame tout le monde » ?
Etienne Hérard – La majorité des personnes ne s’intéressent pas spécialement à ce qui se passe en prison, car elles ne se sentent pas concernées. Ce n’est pas grave en soi, mais lorsqu’un évènement ou une infraction grave se produit, les gens sont souvent dans l’excès et réclament la prison à tout prix et la peine la plus forte. Peut-être faudrait-il mettre davantage d’humanité là-dedans. Je ne remets pas du tout en question le fait que la victime réclame la peine la plus forte, cela se comprend et évidemment, il n’est pas question que les détenus soient libres de faire n’importe quoi. Mais l’objectif d’une prison est aussi de préparer un retour dans la société. Ils sont punis, entre quatre murs, et il s’agit de faire en sorte que leur passage en prison soit constructif. L’objectif est de « refabriquer » des citoyens en sortie de prison. Cela permettra de protéger la société, car le jour où les détenus sortiront, le risque de récidive sera plus faible. Essayons de faire en sorte que la prison puisse remplir cette mission-là.
Unidivers – Pour conclure, en quoi est-ce une journée importante ?
Étienne Hérard – Je pense que c’est important qu’au moins une fois par an un certain nombre d’acteurs nationaux puissent réfléchir à un thème à propos duquel les citoyens ferment les yeux, ou auquel ils ne pensent pas naturellement. Au 1er octobre 2021, nous comptabilisions 82000 personnes en prison. Il ne s’agit pas de pleurer sur leur sort, mais ce chiffre représente quand même un petit peu de monde qui mérite que l’on s’occupe de lui.
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Quelques mots sur l’association Prison Justice 44 :
L’association Prison Justice 44 a pour objet principal d’accompagner les familles de détenus. Elle fait partie du Collectif Prison 44, composé de 16 associations, travaillant autour des thématiques liées à la prison et notamment à propos du sujet de la réinsertion.
En 1998, pour les quinze ans de l’association, le président de l’époque – désireux de créer un certain dynamisme – a invité les autres associations du collectif à animer une Journée Nationale Prison à Nantes (la 5e à cette époque). Depuis cette année, les associations souhaitent continuer à assumer la prise en charge de cet évènement, qui fût un grand succès.
En parallèle de cette journée nationale et depuis 2007, l’association réalise tout au long de l’année des témoignages sur le thème de la prison en milieu scolaire.
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Réalisées à l’échelle nationale dans différentes villes françaises, les Journées Nationales Prison sont organisées annuellement par le Groupe National de Concertation Prison (GNCP), qui décide également du thème de l’année. Elles ont pour but de sensibiliser le public sur les problèmes posés par les réponses de la Justice, l’incarcération et la réinsertion en dehors de tout événement ou incident d’actualité.
Samedi 20 novembre 2021, 27e édition des Journées nationales Prison (JNP), de 10h30 à 16h00, à l’Espace Beaulieu, à Nantes.
PROGRAMME
10h30 -16h : forum associatif par les associations du collectif prison
10h30 – 12h30 : Table ronde avec un représentant du contrôleur général des lieux de privation de liberté, Anne-Sophie CHENEVIERE Conseillère Pénitentiaire d’Insertion et de Probation au Centre de Détention de NANTES, Sylvie GRUNVALD (maître de conférence à la faculté de Droit de NANTES) animée par Jacques TREMINTIN (travailleur social, enseignant à ARIFTS, journaliste)
13h30 – 16h : Ciné-débat Les drapeaux de papiers, film réalisé par Nathan Ambrosioni avec Noémie Merlant, Guillaume Gouix, en présence du réalisateur. Animation par Jacques TREMINTIN.
Contact
mail: collectifprison44@gmail.com