Un Livre sans images ? Vous connaissez peut-être B. J. Novak en tant qu’acteur (Ryan Howard dans la série américaine The Office). Mais savez-vous qu’il écrit pour la jeunesse ? Et que son Livre sans images fait un carton aux États-Unis ? Un succès amplement mérité comme l’a bien compris l’Ecole des Loisirs : son album provoque le fou rire des enfants et la joie des parents !
La quatrième de couverture s’adresse aux parents, mais aussi aux enfants. Sans doute est-ce d’ailleurs la force de ce livre, publié à L’école des loisirs : bouleverser la lecture traditionnelle de la littérature jeunesse. « Les enfants, ce livre est un piège ! Débrouillez-vous pour que les grandes personnes ne l’apprennent pas », préviennent l’auteur et sa traductrice, l’écrivain et éditrice Geneviève Brisac. En effet, Le Livre sans images prend un air sérieux. Une couverture sobre, un intérieur sans illustrations. Mais le procédé est hilarant : « tous les mots écrits dans le livre doivent être dits à haute voix par la personne qui fait la lecture. Tous. Sans exception ».
Loin des livres illustrés, souvent choisis par les parents, celui-ci inverse l’autorité du lecteur. Une histoire pour s’endormir ou faire rêver ? Non ! Celui qui lit se voit conduit à dire des phrases désopilantes comme : « Je suis un singe qui a appris à lire tout seul » ou « J’ai une tête remplie de pizzas aux myrtilles ». B. J. Novak bouleverse les codes du conteur avec beaucoup d’humour et rend ce décalage très instructif. L’auteur a porté une grande attention à la typographie : le lecteur est amené à modifier son attitude selon la taille, la couleur des lettres ou le style de police. Un jeu s’installe dans la lecture entre les phrases cocasses et une protestation feinte.
Du reste, la puissance de cet album tient sûrement à son absence d’images : les mots ont une force propre. Leur puissance d’évocation tend à l’iconographie. L’auteur et son éditeur le savent : ils jouent en permanence avec eux, pas seulement graphiquement, mais aussi dans les sonorités. Aïe aïe aïe. Les onomatopées donnent du fil à retordre au lecteur et le rire aux larmes.
En faisant le pari d’un livre purement textuel, B. J. Novak ramène une forme de partage et de rapport actif entre celui qui lit, et celui qui écoute. L’écriture mêlée à la typographie touche ici au théâtre : la bonne humeur est partagée d’un côté comme de l’autre. « Je voulais écrire un livre qui permettrait aux enfants de découvrir que les mots peuvent être leurs alliés, que les mots peuvent être aussi drôles, stimulants et désarmants qu’une image » nous dit son auteur. De quoi rassurer les iconoclastes inquiets : le texte a encore beaucoup à nous dire !