Le village s’appelait Swargahalli. Lors de la première tentative de démolition du bidonville, la pancarte fut arrachée ne laissant que les premières syllabes. SWARGA. En sanscrit, cela veut dire Paradis.
« À quoi ressemble le Paradis, d’après vous ? » Chacun a sa réponse en fonction de ses préoccupations, de ses croyances. Rien à Bangalore n’est construit pour durer. Et sûrement pas le Paradis ! Il y a quinze ans déjà, les habitantes s’opposaient aux ouvriers prêts à détruire le peu qu’elles possédaient. Ce sont aujourd’hui leurs filles qui se battent contre les pelleteuses.
Deepa, Banu, Padma, Rukshana et Joy sont nées la même année, élevées dans ce même bidonville. Nous découvrons ces adolescentes, l’une après l’autre, chacune avec leur caractère, leur ambition. De toutes religions, d’opinions différentes sur la féminité, affirmant la spécificité de leur corps, elles ont la volonté de vivre ce qu’elles sont. Dans les conditions précaires et insalubres du bidonville, elles ont toutes de bonnes raisons de quitter l’école, mais c’est sans compter l’engagement de la directrice, Madame Janaki, une féministe optimiste, prête à tout pour que ces filles réussissent à gagner leur indépendance. La région se modernise, chaque fille doit avoir sa place dans la société, ne plus dépendre d’un père ou d’un mari.
Malgré tous les obstacles, elles gardent le respect envers leurs aînés et surtout cette solidarité qui les unit. Face à un bulldozer venu détruire leur univers, ces cinq adolescentes se mobilisent, se plaçant dans la continuité de leurs mères. Des mères et grand-mère dont nous découvrons aussi le passé. Confrontées aux lois patriarcales, elles ont connu la stérilisation, la répudiation, la pauvreté, l’exclusion. Pour leurs filles, elles veulent un autre monde.
Les toits du paradis est un de ces romans indiens qui laissent éclater le sourire et l’énergie de ses personnages malgré la difficulté des conditions de vie. Mathangi Subramanian axe son récit sur la condition féminine dans ce pays en pleine mutation où le droit des femmes reste précaire. Elle donne à son roman les couleurs chatoyantes de l’Inde en décrivant les tenues vestimentaires, la convivialité des plats indiens, le sourire des amitiés partagées. Un roman réaliste plein d’espoir et d’humanité.
Les toits du paradis de Mathangi Subramanian traduit par Benoîte Dauvergne, paru le 2 janvier 2020 aux Éditions de l’aube, 408 pages, Prix : 23 euros, ISBN : 978-2-8159-3577-7. Existe en version numérique.
Mathangi Subramanian est éducatrice aux États-Unis, où elle est née. Elle a vécu plusieurs années à New Delhi. Les toits du paradis est son premier roman, déjà publié en anglais et en italien.