Jusqu’au 31 décembre 2019, la Maison des Cultures du Monde de Vitré déploie ses forces dans plusieurs villes de France avec la 23e édition du festival de l’imaginaire. Comme chaque année, le festival fait escale en Bretagne, lieu de résidence principale du centre français du patrimoine culturel immatériel. 4 dates à noter dans les agendas !
Il était une fois le patrimoine culturel immatériel (catégorie de patrimoine issue de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel adoptée par l’UNESCO en 2003) et la Bretagne. Le protagoniste principal de cette aventure n’est autre que le poète, romancier et metteur en scène d’origine syrienne Cherif Khaznadar.
Premier à faire entrer la culture bretonne dans des lieux culturels, il introduit les prémices de la Maison des Cultures du Monde avec le festival des arts traditionnels de Rennes (1974-1983). En 1983, Cherif Khaznadar se lance dans une nouvelle aventure à Paris : un lieu dédié à l’accueil des cultures étrangères en France via divers événements (colloques, expositions et spectacles). La Maison des Cultures du Monde est ainsi fondée.
Ce n’est qu’en 2004 que l’équipe permanente s’implante au cœur d’un ancien prieuré bénédictin du XVIIe siècle à Vitré. Un lieu d’histoire où se côtoient aujourd’hui un centre de documentation, une exposition permanente et un espace d’expositions temporaires. « La Maison des Cultures du Monde cherche à promouvoir la diversité culturelle et à faire connaître les différentes formes d’expression à travers le monde, même rares et méconnues. Des traditions porteuses d’identités pour ceux qui les pratiquent », explique Thomas du Mesnil, chargé de communication et des relations publiques à la Maison des Cultures du Monde.
Le 23e festival de l’imaginaire convoque les esprits
Depuis 1997, le festival de l’imaginaire se déploie dans plusieurs villes de France – Montreuil, Lyon, Paris, etc. Chaque édition donne à voir et à découvrir toutes les formes d’expression à travers le monde, la variété des formes du spectacle vivant et la richesse de ces disciplines. 2019 ne déroge pas à la règle !
La 23e édition décline les différents esprits qui font vivre le festival depuis sa création et les multiples formes d’expression mises à l’honneur : musique, danse, théâtre et performances rituels. « Chaque spectacle convoque des esprits que l’on peut trouver dans l’imaginaire de chaque culture et chaque pays », précise Thomas du Mesnil. Sans limite géographique, le maître-mot du festival semble l’imaginaire et la faculté de chaque homme à se représenter, soi-même et ses rêves. « C’est sur ce point que l’on trouve une cohérence dans la programmation. Des spectacles et formes d’expression de pays lointains peuvent paraître difficiles de premier abord, mais peuvent résonner en nous, car c’est finalement ce qui nous unit. L’imaginaire comme trait commun à toute l’humanité », enrichit-il.
Esprit des lieux. En partenariat avec le Centre des Monuments Historiques, le festival de l’Imaginaire révèle les artistes dans des lieux aussi prestigieux que surprenants. Qu’ils soient historiques ou contemporains, le festival convoque l’histoire de chaque lieu afin qu’il entre en résonance avec les spectacles. L’église Notre Dame à Vitré vient notamment d’accueillir Kouban, les grandes voix cosaques (26 et 27 octobre 2019).
L’esprit du merveilleux se matérialisera par la présence de la figure emblématique du mugham (un genre musical traditionnel) d’Azerbaïdjan Fargana Qasimova les 11 et 12 décembre 2019, au Quartz à Brest – dans le cadre du festival No Border. Ce genre musical traditionnel et savant consiste en une performance chantée émotionnelle où l’improvisation y a une place centrale.
Fille du célèbre maître du mugham Alim Qasimova, le timbre de voix haut perché de la chanteuse s’associera aux instruments traditionnels tels que le târ (luth à onze cordes), le kamânche (vièle à quatre cordes) et le qaval (percussion). Entre la délicatesse instrumentale et la puissance scénique, Fargana Qasimova et ses trois musiciens virtuoses livreront un concert d’expressivité bouleversante, un parfait reflet de l’art du mugham.
https://youtu.be/hfU6_LvWTMc
Esprit de transmission. Le festival recroise parfois le chemin de grands maîtres jadis conviés. C’est notamment le cas du chanteur et percussionniste Yé Lassina Coulibaly, invité du 19e Festival de l’Imaginaire (7, 8 et 9 novembre 2015, Théâtre de l’Alliance française, Paris).
Accompagné par les trois balafonistes* du groupe Yan Kadi Faso, les textes d’Yé Lassina Coulibaly s’inspirent de thèmes et récits traditionnels tout en faisant écho aux réalités contemporaines du Burkina Faso comme le respect et la protection de la nature, le rapport aux aînés, l’importance de l’éducation et la liberté. Du 19 au 21 novembre 2019, les chants et balafons polyphoniques de Yé Lassina Coulibaly et l’ensemble Yan Kadi Faso résonneront dans le bâtiment du Tambour à l’université Rennes 2 pour une immersion dans la musique traditionnelle du Burkina Faso.
* Musicien de balafon, un instrument de percussion idiophone mélodique originaire du Mali. Le balafon ressemble au xylophone et comporte généralement entre 16 et 27 notes produites par des lames de bois que l’on percute avec des baguettes. Le son est amplifié par des calebasses disposées en dessous.
Bretagne – Sovatento : Fest-noz à Poullaouen
« Dans la 23e édition, des maîtres déjà invités reviennent et d’autres, de jeunes disciples, sont à découvrir. Ces derniers s’emparent et renouvellent à leur manière les formes d’expression séculaires dans un prolongement de leur art », précise Thomas du Mesnil. Nombre d’artistes et praticiens viennent pour la première fois en France et plus particulièrement en Bretagne. C’est notamment le cas de Joel Cruz Castellanos et les musiciens du groupe de fandango, bal populaire mexicain du sud de Veracruz.
L’esprit de fête planera au dessus de Poullaouen (29) vendredi 1er novembre 2019 pour un événement festif et convivial. Sur l’idée originale d’Erik Marchand, la figure de la musique bretonne actuelle et ses musiciens partageront la scène avec Joel Cruz Castellanos, figure du son jarocho* de Santiago Tuxtla (Mexique), et ses musiciens pour un fest-noz autour de la danse bretonne fisel et la danse mexicaine zapateado. Le temps d’une soirée à la fois traditionnelle et contemporaine, la Bretagne rencontrera le Mexique autour de ces deux pratiques physiques et exigeantes.
Une résidence en amont annonce un travail collaboratif sur deux ou trois pièces à découvrir le jour J…
* Basé sur un rythme importé par les Espagnols et influencé par la musique afro-cubaine des XVIIIe et XIXe siècles, il s’agit d’un son et d’un tempo musical d’origine rurale très répandu.
Une place pour les artistes en exil
« Le festival de l’imaginaire ne programme pas d’artistes français aux inspirations traditionnelles. La Maison des Cultures du Monde invite des artistes étrangers afin de faire découvrir Avec l’exil ces dernières années, on a voulu faire une place à tous ces artistes qui méritent une visibilité », Séverine Cachat, directrice de la Maison des Cultures du Monde.
Héritiers de la musique traditionnelle persane, le duo Mojtaba Fasihi (voix) et Mostafa Taleb (instrument, kamânche) se produiront pour la première fois en France le dimanche 15 décembre au Centre culturel Jacques Duhamel de Vitré. Le premier est né près d’Ispahan (Iran), mais habite en Allemagne, le second est natif de la région du Lorestan (ouest de l’Iran), mais réside en Belgique. « Dans une région où la culture poétique est omniprésente, la voix reste néanmoins l’instrument le plus à même de susciter l’émotion esthétique (hâl) de l’auditeur ».
Le timbre profond du kamâncha (viele à pique) de Mastafa Taleb rencontre la voix de Mojtaba Fasihi pour un concert intimiste qui mêle textes poétiques et improvisations mélodiques.
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