Une épidémie se profile ? N’ayez pas peur… Mais achetez le journal ! C’est le message envoyé par les affichettes jaunes placardées devant les points de vente de Ouest-France. Depuis des années, ces titres « faisaient marrer » Mathieu Renard. Le responsable de Lendroit Editions a décidé d’en faire une publication. Désopilant !
Encore une idée de cadeau pour les fêtes ?
« C’est d’abord un objet de collection », rétorque Mathieu Renard, fier de préciser « complètement local. Imprimé chez Identic à Rennes ». Le tirage ? 50 exemplaires (cocasse quand on compare avec les 800 000 exemplaires du grand quotidien).
« Entre art brut et conceptuel, c’est du pur ready made », lance le fou de papier qui en connaît un rayon en art contemporain. Il y voit aussi de la sociologie et bien sûr, un révélateur de la presse. Car ces courtes phrases indiquent ce qui intéresse les gens. Ou « ce qui est censé les intéresser » précise Mathieu qui se demandent si « les mecs en font exprès ». Car il a réalisé que les deux titres sélectionnés fonctionnent ensemble, ou construisent une poétique singulière.
Pour ne rien rater de ce qui avait motivé son abonnement à la newsletter, il a commencé à photographier ces affichettes. Le projet entamé il y a plusieurs années avait déjà trouvé un écho en étant publié sous la forme d’une longue liste dans la revue suisse Tissu. L’idée d’un projet éditorial est ensuite devenu une évidence au gré des collectages. Quand il a eu 90 affichettes, il a demandé à Marion Caron, stagiaire en design graphique de travailler à la maquette : « on est ultra-fidèle aux proportions, à la typo et à la couleur. Au plus près des originaux. Mais on passe de l’affiche au livre ».
Feuilletons et marrons-nous aussi avec le poids des mots et le choc des collisions sémantiques. Ainsi, la phrase qui fournit le titre : « Rougeole à Rennes : l’épidémie se profile » est associée à : « Rennes, 5 pharmaciens suspendus ». Plus loin : « Escroquerie. 200 000 € volés par amour » suivi de : « Viande de cheval. Un scandale qui s’emballe ». Ou encore : « Libération à Rennes. Sur les traces de leur père soldat » avec « Ille-et-Vilaine. Huit heures de course-poursuite ». Un tantinet glaçant quand on connaît le tragique fait divers : « Rennes. Feu dans le centre ancien » juxtaposé à « Vie étudiante. Rennes dans le Top 5 ». Le summum de l’humour noir est atteint par « Accident mortel : plus de peur que de mal ». Mathieu sourit : « c’est un fake. Celui-là m’a été envoyé par de jeunes artistes nantais qui détournent et exploitent la stratégie commerciale en œuvre dadaïste ». Et il le jure : « tous les autres sont authentiques, même “la drogue était du carambar” ». À prendre au premier degré, au deuxième ou au troisième, rien ne presse.