Ker mobilier, le design breton écoconçu entre terre et mer

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Mobilier KER © Studio Nomades

La marque de mobilier KER est née de l’alliance des architectes d’intérieur Grégoire de Lafforest et Jérémie du Chaffaut. Entre héritage des traditions et modernité de la ligne, univers scandinave et codes atlantiques, le duo promeut une démarche durable et militante du design en proposant du mobilier écoconçu.

De la roche comme arrière-plan, les pieds dans le sable, un sourire aux lèvres, la photo de Jérémie du Chaffaut et Grégoire de Lafforest sent bon l’iode et l’air marin à l’image de la marque de mobilier qu’ils viennent de créer ensemble : KER, « maison, hameau, village » en breton. « Maintenant qu’on a fait la Provence, on pourrait faire la Bretagne, ta région », l’aventure a commencé avec cette invitation de Jérémie du Chaffaut et Grégoire de Lafforest, lancée au détour d’une discussion. Le premier, Marseillais de naissance, est architecte d’intérieur à la tête des éditions Midi – marque de mobilier d’inspiration provençale. Le second, Brestois d’origine, est architecte d’intérieur et designer, et travaille le mobilier pour les collections Hermès. Tous deux se sont rencontrés pendant leurs études à Penninghen, école de direction artistique, de communication et d’architecture d’intérieur à Paris. « Comme nous venons de deux régions opposées, une forme de joute s’est créée à notre rencontre et ce sujet a toujours fait partie de nos discussions et nos échanges », introduit Grégoire de Lafforest. « Depuis 20 ans, on compare les atouts et les qualités de nos régions respectives. » 

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Jérémie du Chaffaut et Grégoire de Lafforest (c)

Après la Provence, la Bretagne donc. Le duo s’est intéressé à la région qui a vu naître le Brestois, à sa terre et sa mer, et à tout ce qu’elle peut inspirer dans les lignes d’un mobilier d’intérieur et d’extérieur ; à l’artisanat et aux traditions, et à tout ce qu’ils peuvent insuffler dans un design contemporain. Bien que le Breton ait participé à la réflexion autour de Midi, le binôme collabore réellement pour la première fois. « On ne se l’était jamais dit, mais il y avait une forme d’évidence, sachant qu’on est assez complémentaires. » Là où Jérémie du Chaffaut a la force de l’entrepreneur, « le côté fonceur et débrouillard », Grégoire de Lafforest possède le volet sensible et artistique. L’un aime particulièrement se lancer dans des aventures et prendre des risques, et avait une vision claire de la cible et du produit. L’autre a été élevé à proximité des savoir-faire artisanaux et de l’univers marin, il avait la connaissance du territoire. « On s’est retrouvé dans les beaux savoir-faire, le travail artisanal et le geste de la main. »

Pour donner corps au projet, le duo est allé à la rencontre de sylviculteurs (professionnel de la sylviculture, qui produit et récolte du bois), de mateloteurs (personne pratiquant l’art du matelotage (nouage et techniques associées)) et de charpentiers de marine afin de trouver les matières et les techniques qui serviront à la conception, et les artisans avec qui ils travailleront. « Certains artisans se contentent de leur savoir-faire et préfèrent ne pas prendre de risque. » L’enthousiasme et la capacité à sortir de leur savoir-faire originel pour expérimenter d’autres ont cependant permis de monter le projet. Installés en Ille-et-Vilaine, Morbihan et Finistère, trois artisans travaillent de concert pour fabriquer le meuble : un tourneur sur bois s’occupe de la partie piétement – partie basse du meuble qui comprend essentiellement les pieds – , un ébéniste des assises et un tresseur de corde de la partie tressage.

Dans un équilibre entre esprit mobilier paysan de l’intérieur des terres et aspect marin de la Bretagne, ces matérielles brutes et naturelles que sont le châtaignier, la corde, le grès et l’ardoise content l’histoire de la région. « Le châtaignier est un bois qui a été beaucoup travaillé en Bretagne. La région était plutôt pauvre alors, quand ils avaient des chênes de qualité qui coûtaient cher, ils préféraient les revendre plutôt que de les utiliser », raconte-il. Les Bretons utilisaient davantage le châtaignier, un bois résistant à l’humidité. Il ajoute : « Ils utilisaient aussi beaucoup le goudron de pain, une technique arrivée avec les Vikings il y a plusieurs siècles. » De teinte brune, le liquide aux allures de mélasse était badigeonné sur le pont des bateaux pour protéger contre l’humidité et éviter les champignons et les maladies. « Puis, c’est arrivé dans les maisons quand elles étaient en terre battue », ajoute le designer. « Toutes ces histoires qui viennent du passé des marins et du mobilier paysan breton ancestral infusent dans les savoir-faire de maintenant et racontent une histoire de la Bretagne. » Les premiers meubles ont ainsi été traités au goudron de pain afin d’obtenir la bonne teinte et ensuite trouver une équivalence avec une huile naturelle végétale teintée. 

Dans le prolongement de la ligne artistique des éditions Midi, on retrouve dans celle de KER la vision contemporaine des artisanats d’exception et la sublimation des traditions qui font la renommée de la maison. « En termes de formes, on souhaitait du léger pour se détacher du rustique et de lourdeur des meubles du début du siècle. » KER s’éloigne du mobilier massif caractéristique de la Bretagne d’antan, qui rappelle notamment les créations du mouvement artistique Seiz Breur, pour une ligne épurée et intemporelle qui résonne avec le mobilier scandinave. Le hasard n’existe pas puisque tous deux ont une passion pour les pays scandinaves, notamment le Danemark où ils y ont séjourné ensemble en Erasmus. 

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« Des lignes pures, pas trop bavardes, avec de petits détails discrets qui donnent une sophistication au meuble. »

Entre héritage et modernité, la touche bretonne donne du caractère à des meubles aux lignes raffinées qui sentent bon l’iode et la tradition marine, à l’image de la chaise, pièce phare qui connaît trois déclinaisons. Premier meuble dessiné, il est né après la visite de la Corderie Royale de Rochefort à l’été 2021, au démarrage de l’aventure KER. Inspiré du pare-battage traditionnel en corde, le dossier tressé a été conçu par un mateloteur du port de Saint-Malo. La table KOKEK renoue quant à elle avec la tradition des tables de ferme bretonnes. Le plateau est constitué de plaques d’ardoise extraites d’une des dernières carrières françaises encore en activité. Exception géographique pour cette matière venue des Hautes-Pyrénées.

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Mobilier KER © Studio Nomades

Cette proposition premium à la démarche durable et militante va agréablement à contre-courant de la dynamique actuelle que l’on peut constater dans beaucoup de foyers : le changement régulier de mobilier et/ou de décoration avec des propositions à bas prix certes, mais de moindre qualité. « C’est venu de l’idée de ces mobiliers d’antan qu’ont réparé pour continuer à faire vivre la pièce, qu’elle soit gardée de génération en génération », informe l’architecte d’intérieur. « On a pensé un produit bien construit et pensé, qui soit robuste et que l’on va pouvoir entretenir et réparer de telle sorte qu’il dure dans le temps. »

Retrouvez la collection KER sur le site Internet

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