Marc Joly analyse brillamment l’apport fulgurant du Norbert Elias dans le domaine des sciences sociales françaises des années 1970. La relation entre rapport entre individus et sociétés est au centre de l’œuvre du sociologue. Pourtant, ses maîtres livres ont été commis dans les années… 1930. Coup de projecteur sur une œuvre qui aura mis 40 ans avant d’être reconnue.
Norbert Elias s’attache à étudier comment l’individu se façonne au regard de l’histoire de la socialisation. L’analyse des dépendances et interdépendances entre éléments d’un même ensemble collectif débouche sur la mise en lumière d’un point d’ancrage : le contrôle des pulsions. Dans un monde composite qu’il a su très tôt décrire, ce processus d’encadrement, de modération, d’endiguement, de refrènement, voire de castration est apparentable à ce processus de domestication. Il été souvent mal reçu.
Cela étant dit, le propos de Marc Joly, à force de dériver aux frontières de son sujet, devient flou, voire hors sujet. Reste une évidente force : faire résonner avec un étonnement naïf, mais pertinent, le caractère tardif de la consécration d’une pensée qui développe aujourd’hui toute sa puissance d’inspiration (dans sa lignée ou en opposition). Il convient de constater la faiblesse de la relation entre la puissance objective de l’œuvre et sa reconnaissance sociale.
Marc Joly, Devenir Norbert Elias, Paris, Fayard, mars 2012, 472 p., 26€