Ce qui définit Olga dès son plus jeune âge sera sa caractéristique tout au long de sa vie. Par regards successifs, Bernhard Schlink dévoile Olga, l’histoire d’une femme exceptionnelle et d’un amour inébranlable dans une Allemagne qui sacrifie toute une génération pour ses rêves de grandeur.
Elle est facile à garder, elle aime avant tout se tenir debout et regarder autour d’elle.
Olga est née en Silésie dans une famille très modeste. Quand ses parents meurent du typhus, la petite fille est envoyée en Poméranie chez sa grand-mère paternelle, une femme acariâtre qui reporte sa haine de sa belle-fille sur l’enfant.
Très vite, Olga se fait des amis à l’école, et notamment Herbert et Viktoria, les enfants de l’homme le plus riche du village. Contre l’avis de toute sa famille, Herbert et Olga vivent une très belle histoire d’amour. Certes, entrecoupée par les longues absences des expéditions d’Herbert, et contrariée par les intrigues de Viktoria.
Alors qu’Olga devient institutrice au nord de Tilsit, Herbert part en Afrique pour soutenir l’Allemagne dans ses souhaits de grandeur, notamment en 1904 dans la guerre contre les Héréros (ndlr : le massacre des Héréros et des Namas perpétré sous les ordres de Lothar von Trotha dans le Sud-Ouest africain allemand (actuelle Namibie) à partir de 1904 est considéré comme le premier génocide du xxe siècle, c’est un programme d’extermination qui s’inscrit au sein d’un processus de conquête d’un territoire par les troupes coloniales allemandes entre 1884 et 1911). Ce n’était que la première expédition d’un Herbert qui cherche à se perdre dans l’immensité, dans le néant. Après l’Argentine, ce sera le rêve de l’Arctique dont il ne reviendra jamais. Olga lui écrit à Tromsø, en poste restante. Elle n’aura jamais de réponse. Sa vie ne sera qu’attente, mélodieuse grâce à la force de son amour. Elle comble l’absence avec son métier et l’attention qu’elle porte à un jeune enfant, Eik.
Les années défilent avec la succession des deux guerres mondiales, mais aussi celle des pertes et des déceptions, comme l’engagement d’Eik dans les SS. Dans les années 1950, devenue sourde, une belle occasion de ne plus entendre la propagande, Olga gagne sa vie comme couturière. Toujours soucieuse d’aider la jeunesse, elle lie une amitié avec le fils de ses patrons, Ferdinand. Comme à Eik, elle lui raconte les expéditions d’Herbert et le soutient dans ses épreuves d’adolescent.
C’est Ferdinand qui nous confie la vie d’Olga dans la seconde partie. Et surtout son regard sur une Allemagne à laquelle elle reproche ses rêves de grandeur.
Trop de grandeur, voilà ce qui lui avait fait perdre Herbert et Eik, voilà ce dont elle rendait Bismarck responsable, et voilà ce qui lui semblait aussi être la tentation menaçant ma génération.
Bernhard Schlink ne livre jamais une intrigue simplement. Les différentes parties du livre enrichissent notre perception de cette femme, intelligente, peut-être trop, pour cette époque où on ne leur demandait que servitude. La dernière partie regroupe la correspondance adressée à Herbert, surtout les vingt-cinq lettres d’Olga envoyées entre 1913 et 1915, plus quelques unes entre 1936 et 1971. Et c’est à la lecture de ces lettres que nous saisissons le passé dans toute sa vérité.
Olga, de Bernhard Schlink – Gallimard – Collection “Du Monde entier” – 272 pages. Parution : 03-01-2019. Prix : 19€.
Bernhard Schlink, né en 1944 à Bielefeld en Allemagne, est un écrivain allemand. Il est notamment connu pour avoir écrit Le Liseur (1995). Traduit dans 37 langues, c’est le premier livre allemand à arriver en première position sur la liste de best-sellers publiée par le New-York Times. Toute l’œuvre de Schlink est publiée aux Éditions Gallimard.