Premier roman, L’Entre-sort est loin de tenir ses promesses. Premier roman, très contemporain, trop contemporain. Roman d’un amour contemporain, roman de l’épuisement indique la quatrième de couverture. Si les premières pages peuvent tenir en haleine en ouvrant des perspectives, la lecture tombe vite dans un pathos assez mal ficelé où le style, travaillé certes, mais mal, devient vite son pire ennemi. Le langage familier qui s’entre-mêlent avec des mots savants (sommairement, gratuitement et sans liens véritables avec les narrateurs) empeste la post-modernité préméditée, un rien faisandée.
Tel Vertumne épamprant ses vignes, tu effrites mes croûtes, patiemment, amoureusement, desquelles ne subsiste sous tes ongles laqués qu’un grêle compost arqué. Tu m’aimes. un peu. Beaucoup. Passionnément. (p.48)
Du coup, le découpage entre les deux pôles du couple, lui-elle, qui pouvait prétendre offrir une vraie singularité, n’est plus vécu par le lecteur que comme un subterfuge assez vain. L’entrelacement des deux voix aurait pu, malgré le décalage chronologique, voire en étant bâti sur lui, suscité l’adhésion. Malheureusement, l’analyse proprement littéraire de la très réelle et contemporaine difficulté de « ne plus faire qu’une seule chaire » se résume au vague récit indécis d’une fin de vie accidentelle, un débat mou sur le suicide assisté, sur une folie morose et bien moins piquante que celle d’une pâle copie d’Emma Bovary de banlieue.
J’étais prise dans cette chambre, lui l’était dans ses chairs, étranglé, étouffé dans ses tissus comme dans un sac (p. 115)
Entre-Sort, subst. Masc. : Baraque foraine dans laquelle on expose des monstres. Roman-baraque, L’Entre-sort donne à voir les monstres de notre société : un homme et une femme simplement. » (4e de couverture)
Nous sommes loin de l’esprit Freaks. Et ce couple est simplement d’une fade tristesse contemporaine. Le roman échoue à le faire « passer de l’autre côté ». Que l’édition doive se plier au règles du marketing est une chose, mais il faut voir, tout de même, à ne pas tromper sur la marchandise. Peut-être serait-il préférable de ne pas laisser les auteurs composer leur propre promo… Si c’était l’objectif, L’Entre-Sort manque la cible.
Bourré de tous les artifices d’une écriture vaillamment post-moderne, le texte ne révèle que ses propres failles. Les deux premières : le traitement des propres personnages et une composition outrancièrement « avant-gardiste ». Dommage…
Olivier Vanghent, L’Entre-Sort, 147 p., L’Âge d’Homme, 2012, 13 €