Covid oblige, la conférence de presse du mois de juin qui annonce habituellement l’intégralité du programme à venir de l’opéra de Rennes, s’est contentée, cette année, de fournir une information limitée à l’été lyrique. Mais, ce matin lors de la conférence de presse de Matthieu Rietzler, directeur de l’opéra de Rennes, nous avons appris avec joie les surprises de la programmation 2020/2021. Résumé attrayant.
Nous sommes donc en mesure de vous communiquer avec précision le déroulement des surprises qui vous sont réservées pour la prochaine saison. Les spectacles seront, comme chaque année, nombreux et variés, mais pour ne pas vous laisser vous consumer d’impatience, commençons par ce qui est le centre même de notre intérêt, les opéras. Le premier à stimuler notre gourmandise est Christoph Willibald Glück. Inutile de s’étendre sur cette œuvre ultra célèbre et tout autant appréciée qu’est « Iphigénie en Tauride ».
Iphigénie en Tauride, fut créé le 18 mai 1779 à l’académie royale de musique. Cette tragédie lyrique bâtie sur un livret de Nicolas-François Guillard nous raconte l’histoire d’une princesse sauvée in extremis par la déesse Diane alors que son père le roi Agamemnon allait l’offrir en sacrifice. Élevée au rang de prêtresse elle doit sacrifier tous les étrangers abordant les rivages de Tauride. Peu de temps après, arrivent Oreste, son propre frère, accompagné de Pylades, son ami le plus proche. En les sauvant, elle trahit son serment, et le trio, protégé par Athéna, retourne en Grèce.
Cette œuvre a bénéficié à travers le temps d’un succès qui ne s’est jamais démenti. À rennes, elle sera portée par une distribution de qualité réunie autour du chef Diego Fasolis, spécialiste de Glück, et du jeune metteur en scène Sarthois Julien Ostini. Le rendez-vous est donc fixé au vingt-neuf novembre ainsi qu’au premier, au trois et au cinq décembre 2020.
La dame blanche, de François-Adrien Boeildieu nous ramènera vers ce que l’opéra peut offrir de fantasque, de romantique en situant l’intrigue dans un château à la Walter Scott, perdu dans d’inquiétantes brumes Écossaises. Bien sûr un fantôme vient jouer les trouble-fête et apporte une ambiance vaudevillesque à ce conte médiéval mettant en scène l’amour courtois. Cette production a déjà connu un grand succès et mérite votre curiosité. Cette œuvre a été jouée pour la première fois à l’opéra-comique, à Paris, en décembre 1825. Divisée en trois actes, elle est portée par un livret d’Eugène Scribe, lui-même inspiré de deux romans de Walter Scott respectivement intitulés Le monastère (1820) et Guy Mannering (1815). Malgré les trois représentations, il sera de bon ton de réserver à l’avance tant l’intérêt pour cette œuvre sera grand. Nous nous retrouverons donc les 10, 11 et 13 décembre pour une œuvre dont Carl Maria von Weber disait : « C’est le charme, c’est l’esprit. Depuis les noces de figaro de Mozart, on n’a pas écrit un opéra-comique de la valeur de celui-ci. »
Les trois contes du compositeur Gérard Pesson nous maintiennent dans le monde de la fantasmagorie, avec la mise en musique de trois histoires bien connues du jeune public ; La princesse au petit pois du très fameux Hans Christian Andersen, Le manteau de Proust de Lorenza Foschint et enfin Le diable dans le beffroi du non moins célèbre Alan Edgard Poe. Une lecture au second degré invite à une réflexion plus personnelle et nous conduit à nous interroger sur notre rapport à l’étranger, avec tout ce que cela suppose d’incertitudes. Gérard Pesson et David Lescot, le metteur en scène, ont truffé, de manière assez facétieuse la partition d’allusions assez explicites à des œuvres lyriques qui nous sont très familières. À vous de les reconnaître ! Alors, venez prêter une oreille attentive les 23, 25 et 26 janvier. Ce sera pour le public rennais l’occasion de retrouver un chef auquel, au cours des années, il s’est réellement attaché, en la personne de Aurélien Azan Zielinski.
Lucia Di Lammermoor de Gaetano Donizetti. Ce très fameux opéra sera sans doute la pièce majeure de la saison qui commence. Célébrissime parmi les grands classiques de l’opéra italien, Lucia trouve son inspiration dans un roman de l’écrivain écossais, Walter Scott, décidément mis à l’honneur cette année. Le livret de l’Italien Salvatore Cammarano, nous conte le drame qui se noue entre deux familles écossaises, les Ashton et les Ravenswood, séparés par une haine insurmontable. Cette œuvre a été créée le 26 septembre 1835 au teatro san Carlo de Naples. Il faudra attendre le 10 août 1839 et une refonte conséquente du livret pour voir la version française de l’œuvre créée au théâtre de la renaissance à Paris. Véritable précurseur du romantisme italien ce chef-d’œuvre fut immortalisé en particulier par l’interprétation qu’en donne l’inoubliable Maria Callas, accompagnée de Giuseppe di Stefano et de Tito Gobbi sous la direction de Tullio Serafin en 1953 à la Scala de Milan. L’opéra de Rennes ouvrira ses portes les 27,28, 30 et 31 mars, ainsi que le 2 avril. Petit clin d’œil amical, on y retrouvera avec plaisir le baryton Marc Scoffoni, grand habitué de la scène locale, parmi une troupe italienne.
La chauve-souris de Johann Strauss II sera à double titre, le bouquet final de la saison 2020-2021. Ultime opéra programmé, ce sera également l’occasion de renouer avec cette agréable habitude qu’est la diffusion de l’œuvre sur grand écran, en simultanée, sur la place de la mairie de Rennes.
Normalement, cette opérette aurait dû se dérouler à la fois dans notre opéra et dans de nombreux lieux publics de Rennes, mais le Covid a fait, à notre grand regret, sauter notre tour et c’est donc à Angers que se déroulera la représentation diffusée. Cette divertissante et facétieuse opérette sera placée sous la direction de Claude Schnitzler, qui signe là un retour apprécié dans des murs qu’il connaît bien et affectionne.
Voilà en résumé le paysage opératique de la prochaine saison, il est appétissant et promet de belles heures de musique. Cette vénérable maison ne se borne pourtant pas strictement aux œuvres lyriques et se souvient qu’elle accueille en résidence deux formations d’un haut niveau de qualité avec l’ensemble de Gildas Pungier, le chœur Mélismes et celui de Damien Guillon, le Banquet céleste. Ce dernier a assuré pendant la période estivale une belle présence à l’occasion de nombreux concerts et mérite toute notre reconnaissance. Nous aurons l’occasion de retrouver les artistes de ce groupe lors de la représentation d’un spectacle intitulé Dreams, à l’occasion duquel le contre-ténor rennais se laisse guider par deux metteurs en scène, Cécile Roussat et Julien Lubeck, qui apportent à sa voix et à la musique de John Dowland et Henry Purcell un cadre onirique et poétique. Un événement à ne pas laisser passer les mardi 10 et mercredi 18 novembre.
Continuant sa redécouverte des cantates de Bach, c’est le dimanche 20 septembre que Damien Guillon vous invitera à un partage musical avec trois cantates, particulièrement dédiées à la trinité. C’est également un événement que nous ne raterons pas, convaincus que nous sommes depuis l’audition du premier disque du banquet céleste consacré à J. S. Bach et son extraordinaire interprétation de la cantate « Ich habe genuck ». Un joli moment gravé dans l’histoire musicale de Rennes. Toujours avec Bach, Damien Guillon nous invitera à découvrir l’oratorio de Pâques et celui de l’ascension, injustement occultés par celui de Noël, ô combien fameux, mais qui méritent notre curiosité. Entre la gaieté communicative de l’un et la gravité méditative de l’autre, c’est tout un univers du Cantor qui s’ouvre à nous. C’est à l’église Saint Germain, écrin idéal pour cette musique, que le banquet céleste nous fixe rendez-vous les mardi 30 et mercredi 31 mars. La partie vocale sera assurée par l’ensemble Mélismes, sous la direction de Gildas Pungier, ce qui devrait nous inciter plus encore à faire votre réservation dés le 12 décembre. Ultime intervention à signaler, celle du 20 mai qui nous proposera une promenade vénitienne au travers de la musique de deux compositeurs majeurs en la personne de Giovanni Gabrieli et plus fameux encore, Claudio Monteverdi qu’il n’est pas besoin de nommer.
Mais revenons à Gildas Pungier et à Mélismes. Si, comme chaque année ils constituent le chœur de l’opéra de Rennes ils n’en sont pas moins une entité indépendante, et c’est dans ce cadre qu’ils nous proposent pour cette prochaine saison le très étonnant Requiem allemand de Johannes Brahms pour soliste chœur et deux pianos. Jamais messe des morts n’a autant célébré la vie, c’est ce qui en fait en même temps la difficulté et l’originalité. Mais nous n’avons aucun doute et l’ensemble Mélismes, comme son chef, ne manquerons pas de nous offrir une interprétation de grande qualité.
Récital de Stéphanie d’Oustrac. Accompagnée de l’orchestre national de Bretagne, la mezzo soprano rennaise, de retour sur sa terre natale, nous convie à une rencontre intimiste grâce aux très belles pages d’auteurs comme Hector Berlioz et ses nuits d’été, ou celles de Gustav Malher avec l’inoubliable Adagietto de la cinquième symphonie, offert au grand public avec le film « La mort à Venise » de Luccino Visconti. Richard Wagner ne sera pas en reste avec les mélodies profondes et sublimes de Siegfried Idyll. Cette rencontre est prévue les mercredi 7 et jeudi 8 octobre, ne pas répondre à cette invitation relèverait presque de la faute de goût.
Dans le domaine vocal, ne manquez pas de noter sur vos tablettes un autre retour à ses sources bretonnes, celui de la chanteuse Sabine Devieilhe. Issue des chœurs de l’opéra de Rennes où elle fait ses débuts en 2004. Elle a depuis gravi bien des échelons et suite à son succès aux victoires de la musique en 2013, elle n’a cessé de s’affirmer comme une véritable promesse de la scène lyrique française. À l’occasion de ce programme intitulé « lorsque Richard rencontre Amadeus », elle interprétera les beaux moments de deux œuvres dans lesquelles elle a récemment brillé, la Flûte enchantée et Ariane à Naxos. Pour cette rencontre du 20 février, elle sera accompagnée par le pianiste Matthieu Portoy.
Complice de toujours, l’orchestre national de Bretagne sera souvent présent dans la fosse de notre opéra Breton. Il nous invite pour une soirée de célébration particulière, tant par la date que par le choix de l’œuvre, puisque la veillée du 31 décembre proposera sous la forme d’un ciné concert « Singing in the rain » de Stanley Donen et Gene Kelly. L’orchestre jouera, mais c’est bien l’inoubliable Gene Kelly qui, à l’écran, dansera au rythme de ces mélodies joyeuses et chargées de souvenirs. « I am singing in the rain ». Cela promet une belle Saint Sylvestre. Pour ceux, nombreux, qui seraient pris ce jour-là, sachez qu’il sera possible d’aller danser sous la pluie le mercredi 30 et également les 1er et 2 janvier. Ne vous en privez pas.
Voilà, le tour des événements importants est fait, mais le programme réserve bien d’autres surprises, particulièrement pour les enfants qui n’ont pas été oubliés. À vous de le découvrir et après cet été un peu particulier, nous attendons tous le plaisir de retrouver l’opéra de Rennes et toute son équipe pour une nouvelle aventure lyrique.