Le rapport de Nicolas Perruchot, courageux député Nouveau Centre, a été rejeté mercredi par les députés PS et UMP et ne sera donc pas publié… Pourquoi ? Tout simplement, car ce rapport de la commission d’enquête parlementaire sur le financement des organisations patronales et syndicales a mis en valeur ce que tout le monde sait depuis des lustres mais que personne n’ose dire en raison d’une omerta qui perdure depuis des décennies : « mécanismes de financement structurellement opaques », « absence de prise en considération (…) des mises à disposition de personnels et de locaux », « dérives », opacité dans l’utilisation des fonds des syndicats, en particulier au sein des comités d’entreprise (CE). Décriée dès sa création en juin par les barons des syndicats et du patronat, la commission a réussi tout de même à entendre une centaine de personnes. Dans ces temps de crise et de chasse aux abus, la classe politique française s’attache à démontrer son allergie aux notions de décence morale, de justice sociale, d’honnêteté intellectuelle et de transparence politique.
« En France, il est impossible de parler du travail des syndicats”, affirme Nicolas Perruchot, alors que, contrairement à leurs affirmations, “les syndicats ne sont pas financés par leurs adhérents” mais par la collectivité. Le coût : 3 milliards par an pour 8 % de syndiqués, le Figaro-Magazine parlant même de 4 milliards dans son édition de samedi. Presque l’équivalent du budget de l’Enseignement supérieur…
Rien que pour les syndicats de la fonction publique, si l’en croit une estimation de 2010 fondée sur un rapport dans deux départements, les moyens seraient de 250 euros par an et par agent. Rapportée à l’ensemble, l’enveloppe atteindrait 1,5 milliard d’euros. « De nombreux agents publics, intégralement déchargés de service, sont de fait à la disposition des organisations en tant que permanents sans cadre de droit le prévoyant », relève le rapport.
Il fait état de personnels « assez voire très nombreux mis à temps plein à la disposition des syndicats, CE et des fédérations professionnelles (près de 200 à la SNCF, 35 permanents et 47 personnels de secrétariat à EDF) ». En outre, « soumis à des règles de transparence minimalistes », les CE bénéficient de versements financiers « considérables » difficilement traçables, notamment à la SNCF.
Outre le CE de la SNCF qui constitue un exemple d’impunité scandaleuse en France, les CE d’Air France, de la RATP et d’EDF ont vu leur gestion critiquée. Mais, il faut souligner que ce sont des cas toutefois rares proportionnellement au nombre de CE en France.
Les syndicats disposent de patrimoines « considérables » (plus de 500 M€ de trésorerie pour l’UIMM, le patronat de la métallurgie) ; leurs ressources annuelles représentent au moins « 500 millions d’euros, sans doute un milliard ».
Nicolas Perruchot proposait d’imposer une obligation de transparence et de certification des comptes et de procéder à des appels d’offres pour leurs achats. Autrement dit, ce qui est en principe en vigueur pour toutes collectivités, entreprises et une bonne partie des associations en France. Il suggérait aussi que les employeurs ou salariés puissent solliciter l’Inspection du travail pour des contrôles. Mais ces propositions visant à un fonctionnement un soupçon plus transparent a été rejeté par ses collègues de la députation. Quelle honte !