Fruit d’une collaboration entre la Fnac et le Ministère de l’Éducation Nationale, Le Prix Goncourt des Lycéens existe depuis 1988. Depuis, chaque année au début du mois de septembre, ce sont 14 romans, sélectionnés par l’Académie Goncourt, qui sont proposés aux lycéens. Pour devenir membre du jury, les classes de lycéens, représentées par un professeur référent, doivent s’inscrire auprès de l’Académie Goncourt. Pour cette 32e édition, une cinquantaine de classes à travers la France se sont prêtées au jeu. Unidivers est allé à la rencontre de l’une d’elle afin de comprendre comment ces jeunes férus de littérature se préparent pour le vote du 14 novembre prochain.
Au lycée Saint-Vincent Providence de Rennes, 31 élèves en classe de 1ère qui suivent l’enseignement de spécialité : « Humanités, Littérature et Philosophie » ont la chance de faire partie du jury pour le Prix Goncourt des Lycéens 2019. Encadrés par leur professeur de Lettres, monsieur Aurélien Lévêque, ils s’attellent scrupuleusement aux différents missions qui leur sont confiées. D’après les directives de leur professeur, ils se doivent de lire, selon leurs préférences, au moins 3 des 14 ouvrages sélectionnés, afin de pouvoir constituer le tiercé favori des romans de la classe d’ici la première semaine de novembre.
Cette année, les 14 romans en compétition pour le Prix Goncourt des Lycéens sont :
Santiago H. Amigorena, Le ghetto intérieur — P.O.L
Nathacha Appanah, Le ciel par-dessus le toit — Gallimard
Dominique Barberis, Un dimanche à Ville-d’Avray – Arléa
Jean-Luc Coatalem, Le pari du fils — Stock
Louis-Philippe Dalembert, Mur Méditerranée — Sabine Wespieser
Jean-Paul Dubois, Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon —L’Olivier
Hélène Gaudy, Un monde sans rivage — Actes Sud
Hubert Mingarelli, La terre invisible — Buchet Chastel
Amélie Nothomb, Soif — Albin Michel
Anne Pauly, Avant que j’oublie — Verdier
Abel Quentin, Soeur —L’Observatoire
Olivier Rolin, Extérieur monde – Gallimard
Sébastien Spitzer, Le cœur battant du monde– Albin Michel
Karine Tuil, Les choses humaines — Gallimard
Le mercredi 16 octobre, Aurélien Lévêque avait plusieurs sujets à aborder avec la classe de jeunes jurys. Tout d’abord, la veille, une rencontre avec 8 de 14 auteurs de la sélection avait été organisée au lycée Victor et Hélène Basch de Rennes. Pendant celle-ci, les lycéens de Saint-Vincent Providence et sept autres classes de lycée et BTS de l’Ouest ont pu échanger et débattre avec les auteurs présents. En amont de cette journée, des questions précises avaient été préparées en classe puis attribuées à chaque élève. Par exemple, Emma avait pour mission de questionner Hélène Gaudy, concernant son ouvrage Un monde sans rivage : « Les descriptions sont assez précises. Êtes-vous déjà allée au Pôle Nord ? » Ou encore, Annabelle avait prévu de demander à Abel Quentin, auteur de Soeur : « Est-ce que votre métier d’avocat vous a inspiré pour ce roman ? » Nécessité absolue, donc, pour le professeur de débriefer avec ses élèves après cet événement assez exceptionnel.
Les réactions fusent. Les élèves ont exprimé tour à tour leurs ressentis concernant cette journée. Dans l’ensemble, ils ont regretté de ne pas avoir eu la possibilité de poser toutes les questions prévues, mais ils paraissaient ravis d’avoir eu la chance de discuter avec les différents auteurs. « Discuter avec Louis-Philippe Dalembert, m’a trop donné envie de lire Mur Méditerranée », s’exclame Alexandre avec engouement, avant qu’Annabelle souligne :
C’était vraiment génial de pouvoir échanger de vive voix avec les écrivains, mais je pense que lorsque l’on va voter, il faudra faire attention à ne pas favoriser tel auteur parce que nous l’avons trouvé sympathique. Nous devons rester lucides quant au fait que nous votons pour un livre et non pour une personne.
Monsieur Lévêque les a ensuite informés de la prochaine rencontre nationale. Celle-ci se déroulera le 14 novembre à l’Hôtel de ville de la capitale bretonne (Rennes) et sera le lieu de l’annonce du lauréat du Prix Goncourt des Lycéens 2019. Pour l’occasion, chaque région (déterminée autour des villes de Lyon, Nantes, Metz, Paris, Marseille et Rennes) sera représentée par 2 élèves qui devront défendre trois romans, sélectionnés en amont avec les autres lycéens de leur territoire. Ces 2 élèves seront eux-mêmes choisis lors des rencontres régionales qui se dérouleront en simultané dans les 6 villes le 12 novembre. À Rennes, celle-ci prendra place au restaurant La Chope de 13h à 16h. Les 7 lycées de l’Ouest participant à ce concours y enverront un représentant chargé de défendre les trois romans retenus par sa classe.
Pour le lycée Saint-Vincent, Félicie s’est proposée pour devenir cette représentante. « Félicie devra mettre en retrait ses opinions pour défendre ceux de la classe lorsque vous aurez déterminé vos trois romans préférés après les vacances de la Toussaint », précise monsieur Lévêque.
Puis, l’heure était à la distribution des tâches pour les différentes activités mises en place lors de la rencontre nationale le 14 novembre à Rennes. Première activité qui nécessite des volontaires : une mise en scène (à voix haute et en ayant appris le texte par cœur) d’un extrait d’une trentaine de lignes d’un roman apprécié. Amélie et Annabelle se manifestent, partantes pour se prêter à cet exercice ! En revanche, l’extrait retenu ne fait pas encore consensus. Amélie aimerait s’approprier des lignes de Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon, écrit par Jean-Paul Dubois, tandis qu’Annabelle a quant à elle préféré Sœur d’Abel Quentin. Le prof intervient dans leur recherche d’entente en suggérant que mettre en scène Sœur pourrait s’avérer très intéressant puisqu’il s’agit du premier roman d’Abel Quentin : « Ceci pourrait être un moyen pour l’encourager et de lui démontrer votre soutien », déclare-t-il. Marie et Sasha se sont également proposées pour s’essayer à cette activité. Cette fois-ci, pas de doutes : elles se pencheront sur Soif, écrit par la célèbre Amélie Nothomb.
Dans l’optique d’aiguiller les élèves dans leur choix de romans à emprunter pour les vacances, monsieur Lévêque a ensuite proposé aux élèves de lire des critiques rédigées par certains d’entre eux, à propos des romans sélectionnés. Il a alors projeté celle de La terre invisible d’Hubert Mingarelli, rédigée par Sixtine et Guillaume, tout en vantant le modèle de construction de cette dernière qui propose un regard subjectif de l’ouvrage, tout en se basant sur des critères d’analyse objectif, comme le style, le niveau de langage utilisé,… Puis la lecture d’Emmanuel et Alexandre à propos d’Un monde sans rivage, rédigé par Hélène Gaudy semble avoir porté ses fruits puisqu’à l’issue de celle-ci, Amélie s’est vivement exclamée : « Ah, ce livre ne me faisait pas du tout envie, mais maintenant que je lis cet avis, je vais m’y pencher plus sérieusement ! »
Avant de courir au CDI pour saisir leurs lectures à venir, les lycéens ont démontré à Unidivers leur vivre satisfaction concernant leur rôle de membres du jury :
« C’est une vraie chance pour approfondir notre culture littéraire. Ce concours nous permet de nous ouvrir à des auteurs que nous ne connaissions pas forcément », Marie.
« Les ouvrages sélectionnés nous sensibilisent à des sujets sur lesquels nous ne nous serions sûrement pas penchés tout seul.» Mélyne.
« Être membres du jury nous confère une véritable responsabilité. C’est grâce à nos votes qu’un auteur va recevoir un prix et gagner en visibilité. Par exemple, si un jeune auteur parvient à se faire connaître grâce à ce prix, on pourra être fiers et se dire que c’est un peu grâce à nous », Annabelle.
« Peu de lycées ont la chance de vivre cette expérience. Nous nous investissons au maximum parce que nous savons qu’il s’agit d’une réelle chance ! », Irène.
Enfin, Félicie, l’élève qui va certainement représenter la classe lors de la rencontre régionale (elle n’a pas encore été élue, mais elle est pour l’instant la seule à s’être présentée), a confié ses préférences à Unidivers. « Pour le moment, j’ai lu Mur Méditerranée et Extérieur monde. L’histoire de Mur Méditerranée est très touchante, mais j’ai eu du mal à finir le livre, le sujet abordé ne m’a pas passionnée. J’ai bien aimé Extérieur monde, mais c’est un roman qui ressemble à un documentaire Arte. Je n’ai pas ressenti de sensations fortes en le lisant, l’intrigue est très plate. Je pense que ce livre est plus destiné aux adultes, car il n’est pas plein de rêves. Pendant les vacances je vais lire Un monde sans rivage parce que la présentation qu’en a fait Hélène Gaudy lors de la rencontre m’a donné envie. Avant de l’entendre parler, je n’avais pas compris qu’il s’agissait d’un livre qui relate une histoire mystérieuse. Les aventures emplies de mystères me passionnent ! En plus, il y a de vrais polaroïds qui ponctuent le récit. J’ai hâte de les découvrir et de me plonger dans cette histoire tirée de faits réels : la vie de deux explorateurs qui se sont perdus en partant découvrir une île dans l’océan Arctique en ballon. Ils ont été retrouvés des années plus tard avec leur Polaroïd.»
En novembre dernier, David Diop a remporté le Prix Goncourt des Lycéens 2018 pour son roman Frère d’âme. Un récit qui met en lumière l’histoire de deux amis d’enfance : Alfa Ndiaye et Mademba Diop, des tirailleurs sénégalais qui se battent sous le drapeau français pendant la Grande Guerre. Un jour, Mademba est tué sous les yeux d’Alfa, ce qui le plonge dans une folie noire.
Résumés des romans en compétition pour le Prix Goncourt des Lycéens 2019 : ici
Page Fnac pour le Prix Goncourt Lycéens
Page Ministère de l’Éducation nationale pour le Prix Goncourt Lycéens
Lycée Saint-Vincent Providence – 57 rue de Paris – 35000 Rennes