Rendez-vous sous la couette, invitation à la rêverie au cœur de Mettre en scène

Les Rendez-vous sous la couette ont eu lieu au TNB, dans le cadre de Mettre en scène  jusqu’au 23 novembre 2013. Leur présence dans la programmation est plus que justifiée. De fait, elle renvoie aux racines mêmes du festival tant la mise en scène proposée est originale. Elle questionne la place du spectateur dans une pièce de manière intelligente. Pas d’applaudissements, pas de séparation entre les acteurs et le public sont les ingrédients d’une recette qui désarçonne et fonctionne.

L’idée des deux compères de la compagnie théâtrale A l’envers, Benoît Gasnier, metteur en scène, et Julie Seiller, comédienne, est de renverser un certain nombre des codes. Dans leurs pièces le spectateur n’existe pas, il est remplacé par l’Imaginant. De même, il n’y a pas d’acteurs, mais des Habitants. La terminologie rendez-vous sous la couette, tnb, mettre en scène, théâtre, rennes.choisie peut paraître anecdotique, mais elle est révélatrice de leur manière d’aborder l’art théâtral : « Notre objectif, c’est de renverser ce rapport qui existe entre les acteurs et les spectateurs. Derrière la définition du mot spectateur se cache l’idée qu’il subit ce qu’il voit. En le renommant imaginant, on le replace dans l’action. Il doit pouvoir agir avec son esprit, son imaginaire, sa mémoire… » Benoît Gasnier cite aussi Platon pour évoquer la notion d’habitant : « Le poète n’est qu’un médium pour que le poème surgisse. Le poème n’apparaît pas si le poète ne sait pas disparaître. » Pour lui, il faut habiter l’espace pour inviter les imaginants à faire apparaître leur propre partition, mais sans être en démonstration.

Le concept est original, mais fonctionne-t-il ? Les différentes parties du spectacle sont plus ou moins réussies. Certaines traînent un peu en longueur, au risque de provoquer l’endormissement. D’autres sont très efficaces, et réveillent l’endormi sous la couette… Pour Mettre en scène, des invités font leur apparition. En plus des deux membres de la compagnie, le marionnettiste Paulo Duarte et la comédienne Atsama Lafosse se prêtent au jeu. Ils ont permis d’étoffer la création originale, réalisée au moment d’une résidence à Guy Ropartz, au printemps dernier.

Du fait d’une mise en scène très particulière, certains spectateurs se sont réellement endormis durant les représentations. Cela ne dérange absolument pas Benoît Gasnier, qui fidèle à son principe de théâtre d’expérience, confie : « Si les gens s’endorment c’est bien, ils construisent leur propre expérience, c’est ce que l’on recherche. »

Le jeu fait appel à tous les sens du public, on est très loin du théâtre classique. Le goût, le toucher et l’odorat sont sollicités pour apprécier la pièce. Même l’ouïe et la vue – deux sens requis par le genre théâtral – se trouvent réinventées. Les jeux de lumière et la bande-son, qui occupent une place centrale dans le spectacle, rendez-vous sous la couette, tnb, mettre en scène, théâtre, rennes.sont réussis. Comme le laisse supposer le titre, le thème de la pièce tourne autour de l’univers des rêves. Les songes présentés tournent parfois au cauchemardesque. Une large part d’imaginaire est laissée à celui qui sait rêver tout éveillé. La frontière entre le rêve et son mauvais pendant, le cauchemar, est mince. L’interprétation de celui qui regarde est essentielle. Entre des monstres qui surgissent des ténèbres et des voix maternelles qui chuchotent à votre oreille, le voyage est avant tout sensoriel et expérimental. Les individus composant le public sont placés eux-mêmes en situation d’action : « Le fait d’enlever ses chaussures au début est très important, cela transmet un message aux personnes, elles se dénudent, elles savent que nous allons les mener vers une intimité. »

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La compagnie A l’envers décline sa manière d’aborder le théâtre à travers d’autres créations. Ils seront présents durant le festival Mythos, pour une promenade sonore les 19 et 20 avril 2013 : « Promenons-nous vers où ? ». La ballade aura lieu dans la forêt de Liffré. Le public est, là encore, placé en situation d’action : munis d’une carte, d’une boussole et de quelques autres objets en kit, ils sont amenés à déambuler le long d’un itinéraire tracé par une plasticienne américaine, Kathryn Kenworth, et Julie Seiller. Le tout sur un texte de Thoreau : « Je rêve d’un peuple qui brûlerait les clôtures et laisserait croître les forêts… »

Ils sont aussi les créateurs du Bureau des utopies, lequel récolte en ce moment dans la Métropole rennaise des paysages sonores afin de constituer un répertoire. À l’horizon 2015, ils ont pour projet d’aller monter au Québec une nouvelle pièce : Habitant(s) spectacle pour un paysage. On y retrouve le même concept qui prévaut à chaque fois dans leurs créations : replacer le public au cœur de la démarche artistique.

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