Dans le cadre de la 33e édition du festival Travelling, du 1er au 8 février 2022, la Maison des Asso fait voyager son public le temps de l’exposition Prague 68. Coupures de journaux, tracts politiques et photographies à l’appui, le public sera plongé dans le contexte brûlant du Printemps de Prague du 1er février au 2 avril 2022.
Que sait-on réellement du Printemps de Prague ? Quelques lignes, tout au plus, dans le manuel scolaire du lycée… La maison des Asso s’ouvre à la nouveauté dans le cadre de son fidèle partenariat avec le festival de cinéma Travelling, organisé par l’association Clair/Obscur. Cette année, la ville de Prague (République tchèque) est mise à l’honneur et la’espace d’exposition de la maison des asso sera habité, du 1er février au 2 avril 2022, par Prague 68, une exposition didactique où les archives rencontrent la photographie afin de dresser le tableau de cette période que l’on appelle le Printemps de Prague.
Pas d’exposition monographique pour cette nouvelle proposition dans le cadre du Festival de cinéma Travelling. La chargée des expositions de la maison des asso, Leïla Drissi, s’oriente cette fois dans la conception d’exposition. « La scène photographique tchèque est vaste, mais ne répondait pas forcément au sujet de travelling qui se focalise sur une ville », commence-t-elle. L’impressionnant travail de reportage sur le Printemps de Prague du photographe Koudelka va lui donner l’idée d’une exposition centrée sur cette période. Ayant eu lieu la même année que Mai 68, la période qui désigne le Printemps de Prague a quelque peu été balayée par l’actualité française de l’époque, ne laissant en souvenir que ce grand rassemblement tchèque et slovaque qui symbolise l’invasion soviétique. Mais le Printemps de Prague n’est pas que cela et définit cette courte période de libération du peuple tchécoslovaque. « À l’arrivée au pouvoir d’Alexander Dubček, il a décidé de s’éloigner de Moscou et de pousser les libertés de la presse, d’expression et de réunion le plus loin possible de ce que lui permettait le pacte de Varsovie alors que la Tchécoslovaquie était encore liée à l’URSS. »
Entre janvier et août 1968, Alexander Dubček, élu premier secrétaire du Parti communiste tchécoslovaque en janvier 1968, tente de réformer le pays en introduisant le socialisme à visage humain, une réforme économique et démocratique du communisme en place. Vu d’un mauvais œil par l’URSS, le bloc soviétique va s’organiser pour y mettre un terme. Léonid Brejnev, le secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique, met au point la doctrine Brejnev qui limite l’autonomie des États soviétiques. Après plusieurs mois, les armées du Pacte de Varsovie (l’URSS, la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie et la RDA) font irruption en Tchécoslovaquie dans la nuit du 20 au 21 août 1968, ce qui signe la fin du Printemps de Prague.
Quel était le contexte politique et social avant l’arrivée d’Alexander Dubček au pouvoir ? De quelle manière le bloc soviétique a-t-il réagi face aux réformes du nouveau secrétaire d’État ? Comment le Printemps de Prague a-t-il été perçu dans le monde ? Quel était le contexte artistique en Tchécoslovaquie à cette période ? De quelle manière l’URSS a-t-elle envahi l’actuelle République tchèque au printemps 1968 ? « Globalement la République tchèque est connue pour son militantisme et son engagement », précise-t-elle. « En faisant des recherches dans les Archives de la critique d’art, on a décidé d’élargir le thème, car le pays était riche culturellement. » Appuyant son propos sur des archives de périodiques, des courriers ou encore des photographies issus du fonds ASP, du Grand Palais et de la galerie nationale slovaque à Bratislava, l’exposition Prague 68 se veut didactique et tend à faire découvrir un pays et, au-delà de l’invasion soviétique en elle-même, cette période si particulière.
L’exposition crée différents ponts entre l’effervescence artistique et culturelle, et la réaction de la presse artistique et de la critique d’art, certains artistes ayant tenté de représenter cette époque-là. « Certaines archives sont postérieures au rassemblement du Printemps de Prague et tendent vers les années 70, car il y a un retour en arrière de ces libertés-là », explique-t-elle. « Pendant la période de normalisation, le bloc soviétique va annuler les réformes en cours, censurer les libertés fondamentales et en l’occurrence les libertés artistiques. » Interdiction pour certains artistes de quitter le territoire, arrestation, censure et répression furent leur quotidien. Une police secrète fut réinstallée et des événements culturels annulés donnant naissance à nombre d’expositions clandestines. « Mais au-delà de cette répression, on voit au travers des archives que les Tchèques étaient plein d’espoir. Ils avaient vraiment envie que ça s’arrête. »
Pour éviter toute annulation en raison du contexte sanitaire, seules des visites commentées sont prévues les mercredis 9 février, 23 février et 16 mars, à 16 h 30. Parmi elles, une visite sur la culture tchèque sera réalisée par la directrice de l’association Franco-Tchèque en Bretagne et une visite sur la scénographie sera présentée par Valérie Soriano, la graphiste qui se cache derrière le blog Rennes c’est bien. Viens Cousin. « Toute une partie de l’exposition est consacrée à la représentation multiple lors d’évènements politiques. J’ai trouvé, dans le fonds de la Contemporaine, anciennement la BDIC, des tracts politiques que je soupçonne avoir été réalisés en sérigraphie vu la peinture utilisée. » Du matériel sera ramené pour que les participant. e. s puissent se projeter et visualisent ce processus qui permet de reproduire de manière rapide et multiple n’importe quel support de communication. Une table thématique autour de la musique tchécoslovaque est organisée à la BU de musique de Rennes 2, au Tambour est également prévue.
Les propositions touchent tous les pans de la culture tchèque dans une programmation culturelle transversale et sont révélatrices de la volonté du lieu de faire venir de nouveaux publics et de se démarquer au milieu de tous ces lieux dédiés à la photo qui fleurissent un peu partout dans Rennes. « Le public de la maison des asso est très spécifique. Cette approche différente me permet de faire une programmation un peu plus riche qu’habituellement », informe-t-elle. « Pour l’édition de l’année prochaine, j’aimerais faire appel à la librairie L’Établi des mots pour proposer des livres en lien avec la thématique. Et pourquoi un partenariat avec le centre culinaire pour faire une visite de goût autour des saveurs de la ville à l’affiche l’année prochaine », conclut-elle la tête pleine d’idées à développer.
Du 1er février au 2 avril 2022, exposition Prague 68, Maison des associations, Rennes.
6 Cours des Alliés, 35 000 Rennes.
02 23 40 02 50
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