L’Étoile qui file est la marque de mode de la Rennaise Gwendoline Gautier-Després. Dans son atelier-boutique sis rue de Nantes à Rennes, elle confectionne accessoires, bijoux et collections capsules aux couleurs principalement naturelles – des créations empreints de douceur et sérénité. Désormais, elle propose un nouveau concept : redonner vie aux tissus des personnes disparues en les transformant en accessoire.
« L’Étoile qui file » est un très beau poème de Sophie d’Arbouville, mais c’est aussi le nom de la marque de mode de la Rennaise Gwendoline Gautier-Desprès. C’est un pur hasard, mais il fait écho avec sa propre histoire. La créatrice s’est mise à la couture pendant sa première grossesse en 2011 pour coudre le trousseau de naissance. « Ma grand-mère en fait et même si elle ne m’a pas transmis la pratique, j’ai toujours trouvé chouette de voir qu’on pouvait créer à partir de pas grand-chose », raconte-elle. « Elle me disait « on est des chiffonnières, on part de rien et on en fait quelque chose ». » Véritable révélation, Gwendoline ne pensait pas qu’elle aimerait autant. Deux ans plus tard, elle perd son deuxième enfant in utero un mois et demi avant le terme. La couture lui permet de s’évader et de prendre du temps pour elle. « Des copines ont vu que ça m’aidait, elles ont commencé à me passer des petits commandes pour des cadeaux », partage la couturière. Elle explique parvenir, grâce à la couture, à tisser d’autres liens pour ne pas rester enfermée dans cette douleur. Ce sont elles qui lui donnent l’envie de coudre pour d’autres, mais elle ne s’autorise pas pour autant à envisager une potentielle carrière de créatrice.
Ce n’est qu’en 2019 qu’elle décide de se lancer. « Je revenais toujours à la couture, j’y pensais de plus en plus ». À cette période, elle est de retour depuis quelques années à Rennes avec son mari, tous deux étant professeurs et mutés dans la capitale bretonne, leur ville d’origine. Elle se lance finalement après que son conjoint ait réussi l’agrégation d’anglais. « On s’était mis d’accord que s‘il réussissait son Agreg d’anglais, je lançais aussi mon projet », sourit-elle. La marque L’Étoile qui file naît et quelques années plus tard, devant la multiplication des commandes, elle laisse derrière elle son poste de professeure d’espagnol au collège Anne de Bretagne.
La ligne de L’Étoile qui file est empreinte de douceur, faite de couleurs naturelles et apaisantes, très souvent en demi-teintes et pastels : blanc, caramel, ivoire, rose poudré, etc. Les tissus unis en côtoient d’autres à motifs, pour les doublures notamment, comme le liberty, les carreaux ou encore le cachemire. En plus des gilets de bûcheron (taille enfant et adulte) et une blouse pour enfant qui forment sa collection du moment, elle crée des accessoires (chouchous, pochettes à livre, bananes, trousses à crayons, etc.) et des bijoux fins en cuir. À l’avenir, elle souhaite proposer de petites collections capsules avec des associations de tissus qui vont bien ensemble et, pourquoi pas aussi, des associations entre les membres de la famille.
Influencée par sa grand-mère et particulièrement touchée par le documentaire Demain de Cyril Dion et Mélanie Laurent, Gwendoline a voulu donner une dimension écologique à sa marque. Elle utilise des draps anciens de sa grand-mère, des jacquards et velours de tapissières pour les doublures de sac et des chutes de cuir pour ses bijoux. La demande s’intensifiant, cela devient plus difficile, mais elle continue d’aller à Emmaüs et dans les ressourceries. À cette revalorisation textile elle ajoute de beaux tissus neufs (du liberty, des jolis doubles gazes) qu’elle met un point d’honneur à acheter local. Depuis six mois, elle travaille notamment avec la Bettonnaise Ophélie de Joli.e Boho, créatrice de tissus, patrons boutons et étiquettes. Des particuliers la contactent aussi pour lui proposer de récupérer des tissus et/ou vêtements quand des maisons sont vidées, souvent après le décès d’une personne.
Dans ces tissus chargés d’histoire, Gwendoline confectionne de petits accessoires pour remercier les donneurs et qu’ils puissent garder un souvenir. Mais c’est quand elle a transformé des chemises pour un ami qui avait perdu son père, en accessoires pour toute la famille – pour lui, ça a été une banane afin qu’il le porte toujours près de son cœur – qu’elle pense un nouveau projet. « J’ai besoin que mon activité ait du sens. De par mon histoire, j’ai côtoyé la mort assez jeune et je voyais à quel point c’était important que le souvenir reste. Porter un vêtement ou un accessoire peut permettre de conserver le lien avec les personnes disparues », exprime-t-elle. Ces petites histoires qui révèlent la dimension humaine que la styliste souhaite insuffler à sa marque ont donné naissance à un service que l’on peut trouver particulier vu les sus et coutumes occidentales : elle propose de redonner vie aux tissus ayant appartenu aux défunts en confectionnant pour eux des accessoires (porte-monnaies, housse de coussin, chouchou, nœud papillon, grande couverture ou banane, etc.). « J’échange avec les personnes pour voir ce qui peut les intéresser et les toucher, et comment elles vont les utiliser. » Gwendoline prend le temps de préparer le projet avec ses clients. « Les prix varient, mais ce n’est pas beaucoup plus cher que les tarifs de mes créations. »
La couturière a été rejointe depuis peu par Céline et, dans son atelier boutique ouvert depuis fin 2024, elle accueille aussi des stagiaires pour les initier à la couture. Son goût de la transmission, héritée de son métier de prof, se matérialise aussi dans les réguliers ateliers en petit comité (4 à 5) qu’elle organise : pour les enfants à partir de 7 ans, les adultes, mais aussi les parents-enfants. Au prix de 45€, ils comprennent la mise à disposition des machines, le pré-découpage des tissus et l’achat de la mercerie par Gwendoline. Dans ces ateliers, elle propose un temps privilégié dans lequel la création et l’échange se mêlent. Pour la première fois, la couturière propose un « atelier maternité » pour les futures mamans, vendredi 7 février de 14h à 16h30, afin de les aider à coudre leur trousseau de naissance. Elle sera accompagnée de Sarah Dupont, doula (personne qui accompagne et soutient les femmes et leur entourage pendant leur grossesse)
Elle pense aussi ouvrir un « atelier souvenir » dans le prolongement du nouveau projet qu’elle développe. L’idée est que les participants et participantes viennent avec des tissus ou vêtements d’une personne disparue afin de réaliser un accessoire dans le tissu en question. « On a besoin de temps, mais quand les personnes seront prêtes, j’ai envie de leur laisser la possibilité de pouvoir se retrouver en famille ou entre amis, pour créer quelque chose avec un tissu qui leur rappelle cette personne », dans la même dynamique de El dia de los muertos, fête mexicaine où l’on se retrouve pour partager le repas qu’aimait le défunt afin de le célébrer. Avec ce pan de son activité, elle propose de célébrer la vie des personnes chères que nous avons perdues, en étant dans une certaine paix.
La couturière aimerait aussi se rapprocher de la Coopérative Funéraire de Rennes. Fondée en 2018, elle propose des funérailles différentes et des ateliers autour de la thématique de la mort comme les Cafés mortels pour une nouvelle vision de la mort, qu’elle ne soit plus un tabou.
L’Étoile qui file participera prochainement à la 10e édition du Brunch des créateurs le samedi 22 et le dimanche 23 mars 2025 au Couvent des Jacobins à Rennes.
Atelier-boutique : 143 rue de Nantes, 35 000 Rennes
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