Rennes. Le Carnaval Baroque à l’Opéra, un moment de fête en poésie

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Carnaval Baroque Opéra de Rennes Cécile Roussart Vincent Dumestre
Le Carnaval Baroque © Aleksey Gushchin

L’Opéra de Rennes, en partenariat avec Ay-Roop, se propose de vous faire passer les fêtes de fin d’année dans l’univers fantasque, joyeux et pluridisciplinaire du Carnaval Baroque. Du 30 décembre 2023 au 3 janvier 2024, Cécile Roussat metteuse en scène et Vincent Dumestre, directeur du Poème Harmonique, débute une nouvelle tournée. Entretien avec la metteuse en scène.

Unidivers – Pouvez-vous vous présenter et me présenter votre projet ? 

Cécile Roussat – Je suis comédienne et metteuse en scène formée aux mimes, aux danses anciennes, à la gym et à l’acrobatie. J’ai mis en scène ce spectacle avec le Poème Harmonique et Vincent Dumestre ainsi qu’avec la collaboration artistique de Julien Lubek. On l’a créé en 2006, il a déjà une très belle vie. On retravaille ce spectacle avec une nouvelle équipe de chanteurs, des nouveautés scénographiques, deux nouveaux acrobates, des nouveaux costumes. Ce spectacle a envie de tourner donc on souhaitait continuer l’aventure avec encore plus de poésie, de fastes et lui donner encore quelques belles années de tournée. 

Unidivers – Vous me dites que vous êtes comédienne, jouez-vous dans le spectacle ? 

Cécile Roussat – Là non, mais nous avons une compagnie avec Julien Lubek, les Âmes nocturnes, dans laquelle on joue. On a trois duo en tournée en ce moment. Notre fils de 10 ans a aussi rejoint le Carnaval Baroque, il nous suit depuis trois ans dans nos tournées. Il sera sur scène à l’Opéra de Rennes aux côtés de son papa en tant que mime. 

Le Carnaval Baroque Opéra Vincent Dumestre Cécile Roussart
Le Carnaval Baroque © Aleksey Gushchin

Unidivers – Comment avez-vous retravaillé le spectacle qui date de plus de 10 ans ? 

Cécile Roussat – En réintégrant des nouvelles personnes, de nouveaux chanteurs, de nouveaux acrobates, fatalement le spectacle change. Dans l’écriture, je travaille beaucoup avec la personnalité des interprètes. Il y a également de nouvelles scènes qu’on avait envie d’intégrer, de faire évoluer. On a pu créer avec Vincent et son poème harmonique un travail commun, la musique va s’écrire avec le théâtre. C’était un peu comme à l’époque, il n’y avait pas de tradition écrite et les musiciens se trouvaient à côté de la pièce, en direct. C’est alors tout naturellement qu’on arrive à réécrire et réintégrer des scènes qu’on voulait un peu plus carnavalesques, un peu plus folles. Par exemple, on a intégré des masques plus fantasques et une dimension plus cruelle qui n’existait pas au départ. Du truculent est en train de se mettre en place. 

Unidivers – Vous parlez d’évolution, pas de modernisation ? Ne reprenez-vous pas de codes actuels ? 

Cécile Roussat – La proposition n’est pas forcément moderne dans le sens où nos costumes sont très inspirés des gravures ou des peintures, ce qui donne une esthétique « un peu historique ». Mais je pense que l’actualité de cette mise en scène est bien au-delà de la modernité. Il y a plusieurs forces qui font que le spectateur aujourd’hui est entraîné et touché, qu’il soit mélomane ou pas, qu’il soit jeune ou moins jeune. C’est pour moi la force de la musique, finalement très actuelle, car les musiques populaires qu’on utilise ont des sonorités qu’on a souvent dans les oreilles. L’Ostinato [motif mélodique ou rythmique répété obstinément, généralement à la basse d’une œuvre], notamment, est présent dans de la musique pop actuelle.

Selon moi, l’art du mime touche toutes les époques, les codes sociaux et théâtraux. Finalement, la modernité de ce spectacle, c’est de faire du neuf avec du vieux et de s’inscrire dans un théâtre populaire au sens noble du terme. Il fait ses preuves en durant et en étant dans une modernité de cour, qui touche les spectateurs et qui propose un moment de partage. C’est un moment de lâché prise, de liesse collective, qui peut d’ailleurs avoir des côtés négatifs, des débordements qu’on illustre aussi dans ce spectacle. 

Unidivers – Est-ce idéal de présenter le spectacle pour les fêtes de fin d’année à Rennes ? 

Cécile Roussat – Le spectacle est très généreux, fédère et émerveille, grâce aux artistes exceptionnels sur scène. Ce n’est pas un Opéra, c’est un objet atypique, un spectacle musical à partager, à découvrir. Il permet de parcourir des émotions très variées, beaucoup d’humour, de tendresse, de mélancolie, de rêve. On peut partager ce spectacle avec beaucoup de liberté, se sentir libre de franchir la porte du théâtre ou de l’Opéra avec enthousiasme et je pense que ça se prête à ces fêtes de fin d’année. La liberté et la légèreté sont des sentiments qu’on a envie d’avoir à cette période parfois un peu mélancolique pour certains, d’autant plus avec une actualité un peu sombre. C’est une façon de communier ensemble avec poésie. 

Il montre aussi que l’homme a toujours les mêmes aspirations de communion, de liberté. Cela donne de la force pour changer un peu les choses. 

Le Carnaval Baroque © Aleksey Gushchin

Unidivers – Comment avez-vous travaillé les parties Opéra en italien pour un public français ? 

Cécile Roussat – C’est une langue très jolie. Personnellement, j’ai déjà monté avec Julien d’autres spectacles en italien, on s’est familiarisé avec la langue. C’est intéressant, car ce sont des œuvres du XVIIe  siècle qui sont poétiques, des poèmes en chanson. Ce n’est pas forcément nécessaire de comprendre chaque mot pour profiter du spectacle, ce n’est pas comme un opéra avec une intrigue à comprendre. Le carnaval italien n’est pas une histoire, mais un état d’esprit, un souffle. C’est un moment de vie et de poésie collective, il n’y a pas besoin de comprendre la langue pour le spectateur. On peut en profiter avec beaucoup d’humour visuel. 

Unidivers – La diversité des disciplines dans le spectacle complique-t-elle ou facilite-t-elle la mise en scène ? 

Cécile Roussat – Dans notre compagnie (Âmes nocturnes), nous travaillons beaucoup sur la pluridisciplinarité de nos interprètes, c’est ce qui nous porte. Donner le sentiment que tout est possible, ça nous donne la liberté de pouvoir proposer un monde où tout se mélange. Ça me plait aussi de donner cette sensation on ne peut plus vraiment savoir qui est chanteur et qui est acrobate. Sortir du carcan, des cases. 

Unidivers – C’est vous qui avez créé la synergie entre les disciplines ou elles se sont associées naturellement ? 

Cécile Roussat – C’est vraiment là que réside notre recherche théâtrale, ça se prêtait à l’univers du carnaval baroque. Le carnaval, c’est justement ça : le mélange des genres, les frontières qui s’abattent qui font qu’on ne sait plus qui est noble ou qui est saltimbanque. C’est pour cette raison qu’on cherche aussi des interprètes qui partagent cette recherche. C’est un travail de troupe, on reconnaît chacun, mais c’est avant tout l’énergie du groupe qui fait la force du spectacle. On travaille avec de très bons solistes qui aiment aussi être en chœur, qui mettent leur talent au service d’une oeuvre et d’un souffle collectif. 

Poème Harmonique Carnaval Baroque Vincent Dumestre
Vincent Dumestre, directeur du Poème Harmonique © Philippe Delval

Unidivers – Pouvez-vous me parler de Vincent Dumestre

Cécile Roussat – Oui bien sûr. Je le connais depuis 2004, on avait monté Le bourgeois gentilhomme, mis en scène par Benjamin Lazarre, j’étais aux chorégraphies. Ce spectacle a donné une énergie aux poèmes qui a monté de très belles choses par la suite.

Vincent a à cœur de travailler sur des œuvres musicales, mais aussi sur le spectacle dans sa globalité, sur des collaborations très variées, car il a cette intelligence de savoir que la musique s’écoute, mais se regarde aussi. Par rapport à la modernité, c’est un ensemble musical qui dure aussi depuis très longtemps, créé avant 2004 il me semble. Vincent touche par sa recherche d’authenticité, la façon dont il arrive à recréer des sonorités et à être dans des recherches à la fois sur des musiques savante, populaires, française, mais aussi espagnoles et italiennes. C’est une personne qui ne s’arrête pas aux projets faciles. Le Carnaval baroque, c’est le poème qui le porte depuis de nombreuses années et une telle fidélité à un projet est très rare.

C’est dans le temps que les choses se travaillent, il y a beaucoup de spectacles qui ne durent que deux saisons. Pourtant, il y a la sincérité du travail qui fait qu’on sait que si on travaille longtemps, les choses se bonifient. 

Unidivers – Je vous remercie Cécile Roussat.

Le Carnaval baroque est proposition généreuse qui reprend avec force les codes carnavalesques fantasques et festifs. Une scénographie travaillée, des costumes abracadabrants, un tout « truculent » à ne pas manquer.

INFOS PRATIQUES

Le Carnaval Baroque à L’Opéra de Rennes les 30 et 31 décembre 2023 puis les 2 et 3 janvier 2024
+ d’infos

En partenariat avec Ay-Roop

Les Âmes nocturnes (Cécile Roussart et Julien Lebek)

Le Poème Harmonique (Vincent Dumestre)

Instagram : Poème HarmoniqueOpéra de RennesAy-Roop

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