Dans Luanda-Kinshasa, l’artiste, photographe et cinéaste canadien Stan Douglas invite à plonger dans la reconstitution du célèbre studio d’enregistrement de la Columbia Records à New York à travers un véritable métissage musical. Pour les Champs Libres, l’exposition – qui débute le 10 octobre 2017 et se termine le 7 janvier 2018 – s’inscrit dans une année à la programmation riche (voir notre article). Venez danser aux Champs libres…
Immersion dans l’obscurité au cœur de la salle Anita Conti des Champs libres. Le son et la lumière viennent uniquement de la projection d’un film contre l’un des murs : la reconstitution d’un enregistrement de 6 heures au sein du mythique studio de la Columbia Records, apprécié par tant de musiciens des années 70 : Leonard Bernstein, Johnny Cash, Aretha Franklin, Miles Davis… Cet enregistrement a été coordonné et mis en scène par l’artiste canadien Stan Douglas, internationalement reconnu pour ses installations vidéo autour des utopies du 20e siècle. Et il donne sacrément envie de bouger sur place !
De fait, dans Luanda-Kinshasa, le public est en prise avec un montage d’une durée de 6 heures. Une séquence qui se combine et se recombine afin d’offrir de nouvelles alternances musicales. Pour ce faire, l’artiste a fait appel à des artistes de la scène actuelle, choisis par le pianiste et compositeur de jazz Jason Moran. Les producteurs Christopher Martini et Trivium Films, le producteur et arrangeur Scotty Hard, le chef opérateur Sam Chase et la décoratrice Kelly McGehee ont également contribué à rendre le tout convaincant : tout y est, l’espace, les costumes, les accessoires… Il faut saluer l’effort de reconstitution de la part du photographe qui n’hésite pas à combiner différentes variations musicales comme le jazz, le funk ou la soul. Les morceaux s’enchaînent et le spectateur se retrouve immergé dans un enregistrement sans début ni fin. On s’imagine assister à l’enregistrement d’un album de Miles Davis, compositeur et trompettiste de jazz américain, qui, dans les années 70, s’amusait à mélanger les genres, notamment le jazz et le son électrique.
Luanda-Kinshasa s’inscrit également dans la volonté de Stan Douglas de porter un regard sur l’effondrement des grandes utopies du 20e siècle, en mettant en relation deux éléments distincts. Le nom de l’exposition est d’ailleurs assez révélateur, Luanda, capitale de l’Angola, ayant proclamé en 1975 son indépendance alors que Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo, est, dans les mêmes années, sous le régime dictatorial de la seconde République de Mutubu.
L’exposition Luanda-Kinshasa jette également un coup de projecteur sur une représentation de la musique noire à une époque où elle était considérée comme moins digne que la musique blanche. Elle fait appel à des influences musicales étrangères, notamment africaines, une thématique qui tient à cœur à l’artiste.
Ce « installation-exposition-reportage » suggère au spectateur de mettre en relation des faits de différentes périodes (comme par exemple le mouvement de protestation du monde du sport états-unien contre les violences raciales ou les mouvements anti-ségrégationniste). Pour Stan Douglas, une situation passée fait souvent écho à des situations plus actuelles…