Les Rennais ont répondu en masse à l’appel des syndicats et des partis jeudi 19 janvier 2023. Des milliers de personnes (17 000 selon la Préfecture, 25 000 selon les syndicats) se sont mobilisés à Rennes pour exprimer leur opposition à l’actuelle réforme des retraites portée par le gouvernement en une période de crise et de transformation en cours de la France, de l’Europe et du monde. Le froid saillant n’aura pas eu raison d’une contestation volontaire soutenue par un sentiment diffus et épuisant d’un cumul de mauvaises nouvelles. Retour sur un mouvement populaire qui semble n’avoir pas dit son dernier mot.
Les espoirs du gouvernement d’Élisabeth Borne ont été douchés. Malgré les conditions difficiles (ou peut-être grâce à), la réponse à l’appel à la grève du jeudi 19 janvier 2023 a été massive. Autour de 300.000 manifestants à Paris et 1 million en région (selon les syndicats, 3 fois moins selon la police) ont battu le pavé, élevé leurs voix, exprimé leur désaccord : « La Réforme, faisons la battre en retraite ! ». Autre slogan qui résumait bien le sentiment partagé de ras-le-bol : « Moi, je ne veux pas mourir sur scène devant mon directeur », pouvait-on lire parmi les diverses pancartes et banderoles qui traduisaient avec imagination un refus de travailler jusqu’à l’épuisement.
« Métro, boulot, caveau »
Étudiants, lycéens, salariés, retraités, familles se sont retrouvés à 11 h esplanade Charles de Gaulle dans le centre de Rennes. Chacun a ses raisons pour refuser de digérer cette réforme des retraites, mais le pivot commun tient dans le fait de repousser l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans. Indignés de constater une nouvelle remise en cause de leurs acquis sociaux, les manifestants ont souligné combien ils trouvaient l’actuel gouvernement et la présidence d’Emmanuelle Macron loin, très loin, de leurs existences, de leurs conditions de vie, de leurs fardeaux. C’est sans doute l’aspect le plus saillant de ce mouvement : la conviction que la société politique s’est définitivement clivée à leur détriment pour le profit de quelques autres.
Aux manifestants et manifestantes se sont joints plusieurs élus de la majorité municipaux, la maire et présidente de Rennes Métropole, Nathalie Appéré, ainsi que l’ancien maire et sénateur Edmond Hervé, lequel a de nouveau taxé la réforme en cours de « projet profondément injuste ». Si cette dernière constitue l’un des enjeux majeurs du second quinquennat d’Emmanuel Macron qui aspire à réussir à clore un dossier ouvert depuis les années 1990, tout est dans la manière… Et la manière paraît rude et, surtout, survenue à un fort mauvais moment eu égard aux constantes adaptations, si ce n’est métamorphoses, auxquelles nous confronte cette nouvelle ère de la crise permanente.
Comme de coutume, les chiffres de la préfecture et des syndicats ne correspondent pas. Selon le comptage de la préfecture, 17 000 manifestants se sont mobilisés. Les syndicats en ont dénombré quant à eux plus de 25 000… Qui croire ? En fait, ça n’a aucune d’importance. L’important, c’est de sans faillir se tenir debout, digne et libre, au profit d’une société juste, aimante et protectrice. Autrement, c’est simplement l’âme de notre culture qui se trouvera réformée.
Photographies : Emmanuelle Volage
Texte : Nicolas Roberti