Depuis février 2025, le Mur Habité de Rennes abrite le foyer d’Oneïros, artisan maquettiste. Adrien Rey crée des lampes habitées par des mondes féeriques faits de bois et de végétaux séchés. Le Rennais nous a ouvert la porte de son atelier pour nous parler de ses créations et de ses univers…
Adrien Rey
En face des Ateliers du vent, le Mur Habité abrite plusieurs cocons créatifs dans lesquels s’épanouissent des artistes du cru aux talents divers. Unidivers pousse la porte de l’un d’entre eux : une ribambelle d’outils est suspendue au mur, sur des étagères des caisses abritent une multitude de bois et dans des casiers sont soigneusement rangés des fleurs séchées. Sur un plan de travail trône une miniature en bois sous cloche du château de Jonzac, une des dernières créations d’Oneïros, Adrien Rey de son nom de naissance. Originaire de Charente Maritime, la propriétaire de ce monde cristallisé l’offrira prochainement à son père, fasciné par le château depuis toujours.
Depuis deux ans, le maquettiste rennais transforme le bois en de véritables univers imaginaires qui appellent à l’évasion. «Je travaille avec trois matériaux : la lumière, le bois et les histoires. » On ajouterait à cela l’humain et le foyer. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’architecte de formation, après 8 ans en tant que professionnel, s’est réorienté. «La maison est une thématique qui me touche beaucoup pour toutes les histoires qui se passent à l’intérieur », introduit Adrien Rey. Quand l’exercice de son métier d’architecte n’a plus été au niveau de ses espérances, il a pris son envol pour reconstruire branche après branche son propre foyer artistique. «Dans ma tête, j’ai commencé à quitter l’architecture à partir du moment où des clients venaient me voir non plus pour construire des maisons, mais des opérations. »
Bricoleur autodidacte, Adrien a touché du doigt ses réelles aspirations dans la conception de maisons miniatures en bois. « Mon père était menuisier et m’a appris les prémices. » C’est dans la création de lampes et de veilleuses qu’il réunit aujourd’hui ses sensibilités : « Je peux parler aux gens, les aider à créer leur foyer et raconter leurs histoires en les retranscrivant en lampe », confie-t-il avant d’ajouter : « La lumière projette dans l’espace les émotions qu’on y met. C’est quand on commence à éclairer l’intérieur par soi-même qu’il devient notre foyer. »
Comme son nom l’indique, Oneïros, en référence au dieu des songes de la mythologie grecque, convoque la rêverie et l’imaginaire. Ses lampes ne sont pas seulement des objets, ces bulles intemporelles s’illuminent dans un entrelacs d’histoires et de sentiments. Si Adrien possède une création personnelle, les commandes personnalisées sont un des aspects les plus importants de son activité. À chaque création, le maquettiste crée du lien avec ses clients dans la confiance. « Quand on laisse un peu de place aux gens, ils la prennent. Je suis toujours très surpris de ce que les gens me confient de leur histoire. »
Dans une grande liberté de création, l’artisan part de leur histoire et bâtit des mondes bercés d’onirisme et de fantastique. Il aime particulièrement mélanger les échelles. « On ne sait pas si c’est la maison qui est petite ou le champignon à côté qui est gigantesque », s’amuse-t-il. « Ça rappelle l’univers de Claude Ponti, ils sont de ceux qui forgent une personnalité quand on est enfant. »
Sous ses doigts, les bâtonnets de glace, les chutes de bois et la matière qu’il récupère en forêt (traitée avant emploi) prennent forme. Oneïros valorise la matière brute et n’utilise aucun matériel artificiel : « Les matériaux que j’utilise sont bruts et donnent à voir ce qu’ils sont ». Dans une vision d’honnêteté constructive, il imite les textures en sculptant, mais n’est pas dans l’imitation d’une matière. « Le bois brut permet de créer un espace pour accrocher l’imaginaire d’une personne », précise-t-il. « J’ai déjà un univers maximaliste, avec beaucoup d’éléments, donc c’est important de laisser cette place à l’imagination. C’est le fondement de mes créations. »
« Chaque pièce est unique, car aucune branche ne se ressemble. Je construis en fonction de chacune d’entre elles. »
Village sur poutreBaby Yaga
Alors qu’il travaillait exclusivement le bois à ses débuts, la matière végétale est par la suite venue apporter du relief et de la couleur, et ce grâce à sa compagne fleuriste. « La fleur est un objet très culturel, les gens sont attachés à elle. » Il réalise par exemple beaucoup de veilleuses à partir de bouquets de mariage. Dans une volonté de réemploi, il récupère les fleurs auprès de deux fleuristes, la boutique de sa compagne à Toulouse et Maison Tulipe à Rennes. « Des têtes se brisent parfois quand on confectionne un bouquet. Comme cette matière n’est plus utilisable, elles la stockent et me la remettent. » Il revalorise une matière précieuse, tout en évitant la surconsommation.
Ses étagères abritent une grande variété florale, avec quelques fleurs françaises comme la lavande ou l’hortensia breton et l’achillée qu’il cueille lui-même en bord de chemin avant de les faire sécher. « Toutes les fleurs ne sèchent pas ou ne se stabilisent pas », informe-t-il. « La stabilisation est un procédé assez simple : la fleur est mise dans un bain de glycérine naturelle, elle va remplacer l’eau et ne va pas s’évaporer, ce qui fait que la fleur reste fraîche. » Le seul végétal qu’il achète est la mousse de forêt qu’il utilise en grande quantité.
Village Arbre
Oneïros dessine très peu : il part d’un gros élément, une branche ou une fleur, et adapte sa conception en fonction de la matière. « Une fois que j’ai le support, je crée les détails au fur et à mesure. » Dans une boîte, ses petites maisons sculptées en avance attendent de trouver leur terrain. L’artisan met entre 2 et 4h pour la réalisation d’une petite cloche, entre 4 et 8h pour une moyenne et les grandes se réalisent souvent en une journée.
Adrien puise dans les souvenirs un point d’approche qui va lui permettre de concevoir une œuvre unique et personnalisée. « Je demande pour qui est la lampe, quelles intentions ils souhaitent mettre derrière, quel est leur rapport à la personne, ce qu’ils veulent dire. » Les objets sont aussi habités d’autres histoires invisibles à l’œil nu. « Je cache des détails qu’on ne voit pas une fois la lampe finie, mais ils racontent une histoire de plus. » Un chat s’est par exemple réfugié à l’intérieur d’un grenier, en référence au premier animal du client ; derrière une porte, des initiales du premier amoureux embrassé, mais que personne ne voit, car c’est un secret… « À la livraison, il y a beaucoup d’émotions. J’ai l’impression, pendant un bref instant, de faire partie d’une expérience de vie. »
« Le projet n’est pas seulement unique dans la forme, mais aussi parce qu’il se rattache à des éléments de leur histoire. »
Atelier août 2024
Le deuxième aspect de son travail est la transmission de son savoir-faire avec les ateliers qu’il anime régulièrement. Il prolonge ainsi la dimension humaine déjà présente dans ses créations. Au prix de 70 € par personne, l’atelier d’initiation est à partir de 11 ans et dure 3h. Sous le regard d’Adrien, les participants construisent leur monde lumineux. Deux nouveaux ateliers sont désormais disponibles : un “atelier parent-enfant”, à partir de 8 ans et au prix de 120€, pour une veilleuse et un “atelier pour les entreprises”, prix adapté au nombre de personnes, pour les groupes de 15 à 20 personnes où chacun pose la pierre d’un édifice collectif.
L’atelier d’Oneïros se situe au Mur Habité, 3 rue Gisèle Freund, Rennes. Contact : 06 51 55 92 58 Instagram
Où trouver les créations d’Oneïros :
– La boutique L’Étoile – objets magiques, 17 rue de Bertrand – Rennes (voir article) – Marché de Trinqu’Art à Corps Nuds, samedi 24 mai 2025