Tout l’été, l’Office de Tourisme de Rennes propose des visites originales afin de découvrir (ou redécouvrir pour certains) les histoires qui se cachent derrière le patrimoine rennais. Premier volet de cette série estivale : deux cours intérieures dans le centre historique…
Pour être surpris, il ne faut pas grand-chose. Parfois, il suffit de pousser une porte. Certaines du centre-ville rennais réservent d’ailleurs bien des surprises. Gilles Brohan, animateur de l’architecture et du patrimoine à l’Office de Tourisme de Rennes et guide du jour, l’affirme : « L’architecture rennaise est tellement diversifiée que derrière chaque porte se cache une histoire. »
Il est 12h30. Un rayon de soleil pointe entre les nuages menaçants, ravivant les conversations des terrasses clairsemées. Les effluves de la gastronomie bretonne se font sentir au-delà des cuisines. Mais malgré l’horaire propice, le déjeuner sera architectural et historique.
Premier arrêt : 7 rue Château Renard, entre Sainte-Anne et République. Une porte grinçante laisse apparaitre un couloir étriqué. Au fond du couloir, une cour intérieure étroite, ne laissant entrer que peu de lumière avec ce ciel gris. Pourtant, c’est le Siècle des Lumières qui va inspirer la plupart de ces immeubles de la vieille ville. Comprendre le vécu que transmettent ce bois, ces pierres et ces murs, nécessite un petit rappel historique.
Décembre 1720 : un incendie ravage pendant six jours et six nuits une grande partie du centre-ville de Rennes. Frappée par ces brûlures, la ville doit se reconstruire. Débutée par Isaac Robelin, la reconstruction va se faire principalement sous la houlette de Jacques V Gabriel, l’un des architectes du roi Louis XV. Célèbre ici pour être à l’origine de l’hôtel de ville, Jacques V Gabriel est aussi le père de ces nombreux immeubles du centre-ville qui ont fleuri à la fin du XVIIIe siècle.
« Sous les pavés, la plage ! », pouvait-on entendre au cœur des manifestations de mai 68. Ici, ce serait plutôt « Sous les pierres, le bois ! » Les pierres calcaires, marquées par le temps, font office de témoignage du Siècle des Lumières. Mais comme l’ancienne génération d’aujourd’hui avec Internet, les architectes ont dû s’adapter à leur époque. Il a fallu donc, aux XVIIIe et XIXe siècles, solidifier et consolider ces structures au fil du temps. Le travail témoigne d’un certain héritage des pères fondateurs, mais les techniques et les moyens ont changé. C’est ainsi que le bois fait son apparition dans l’architecture de cette cour. La symétrie précise des coursives, taillées dans le rondin, donne une impression de grandeur à vous casser le cou. Cette nouvelle approche par le bois n’a pourtant pas tué l’ancienne. Au contraire. « Le bois utilisé pour les coursives et les charpentes, dans la manière où il a été traité et exploité, a permis – précise Gilles Brohan – de rendre pérenne l’approche initiale qu’avaient les architectes des Lumières ».
Le voyage continue. Rendez-vous un peu plus bas, au 1er de la rue Duguesclin. Reconstruite également après l’incendie de 1720, cette cour transmet une ambiance totalement différente de la précédente. Là où l’ancien et le moderne se côtoyaient principalement à travers les pierres et les fondations ; ici, le saut dans le temps saute aux yeux.
Dès la porte ouverte, les sabots de chevaux tapant le pavé viennent vous frotter les oreilles à la vue d’une grande porte-cochère et des arcades d’écuries. La cour, plus grande et plus vaste que la précédente, laisse place à l’étonnement et à la surprise. Comme ces « sortes d’ascenseurs » présents sur la façade et qui intriguent l’une des visiteuses. « Ces ascenseurs, précise Gilles Brohan, c’est ce qu’on appelle des latrines suspendues. » L’idée d’imaginer l’un de ces grands moments d’intimité perturbée par le vent frais breton à l’époque de Mozart provoque l’hilarité générale. Les anecdotes continuent, notamment la présence d’un puits, toujours en état ; toutes témoignent à travers de petites histoires de la vie aux XVIIIe et XIXe siècles. Le tout sous le regard des propriétaires des lieux, bien de notre époque.
De retour dehors, le bond en avant de 200 ans provoque la même sensation que celle d’un Marty McFLy, revenant tout droit de 1955 à bord de la DeLorean du Doc Brown. Nous sommes bien en 2014 ! Mais malgré l’éloge fait à la société de consommation le long des rues de la vieille ville, les vestiges d’une vie ancestrale font toujours trace. Et encore aujourd’hui. Dans ces cours, jeunes retraités revenant du marché des Lices croisent deux jeunes étudiantes partant en Vélib’. Un savant mélange de modernisme et d’ancienneté, à l’image de Rennes.
Gilles Brohan, animateur de l’architecture et du patrimoine à l’Office de Tourisme de Rennes, guide et conférencier.
« Ces visites, organisées par ‘Rennes, métropole d’art et d’histoire’, ont été mises en place grâce à la richesse qu’offre le patrimoine rennais. Le but est de sensibiliser touristes et Rennais de souche avec une série de rendez-vous estivaux. Les thématiques seront diversifiées, allant d’hôtels particuliers à l’ancien couvent Bon-Pasteur en passant par ces cours intérieures peu connues des Rennais. »
Infos et réservations :
11, rue Saint-Yves Rennes
02 99 67 11 66 / 02 99 67 11 11
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