Rennes. 32 000 visiteurs ont goûté aux douceurs techno-poétiques de l’expo PRISM de Yann Nguema

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Prism Gravity yann nguema
Gravity

L’exposition PRISM de l’artiste multimédia Yann Nguema explorait l’art sous de nouvelles dimensions dans la salle Anita Conti des Champs Libres jusqu’au 31 mars 2024. Aussi fabuleuse que délicate, la proposition sondait la façon de produire des images sur des écrans hybrides en matières transparentes afin de créer des formes inédites et poétiques. Plus de 32 000 visiteurs s’y sont plongés…

Plongée dans une pénombre presque totale, la salle Anita Conti du centre culturel Les Champs Libres s’illumine sous les quelques faisceaux émanant des œuvres de l’exposition PRISM de Yann Nguema. « On dirait des étoiles ! », s’exclame un enfant fasciné par le drapé de soie scintillant de Gravity, l’œuvre monumentale au centre de la pièce. Certains spectateurs, assis sur un banc, bercés par les sons d’eau et de vent, observent le mouvement délicat du tissu qui se colore de teintes vert d’eau. Le la de l’exposition est donné : ralentir, s’arrêter, contempler.

Yann Nguema
Yann Nguema (c) Studio Pierre 2 lune

Le créateur de PRISM, Yann Nguema, est artiste multimédia. Il fonde en 1992 son groupe de musique EZ3kiel, qu’il quitte en 2022, dans lequel il jouait de la basse et s’occupait de la scénographie. Mais depuis quelques années, son travail s’axe principalement sur la projection architecturale, milieu dans lequel il arrive par hasard en réalisant une projection pour la fête des Lumières de Lyon. « Du jour au lendemain, je me suis transformé en artiste qui produit des mappings. » Intéressé par la production d’images, il cherche des supports qui peuvent les enrichir et les augmenter. Cette investigation le pousse à travailler avec des écrans atypiques, tel que des cathédrales, des abbayes, etc. Mais après 5-6 ans de projection en milieu urbain, il souhaite utiliser les compétences qu’il a acquises afin de diversifier les supports d’écran et de projection. L’artiste se penche alors sur les matières transparentes : « Quand on crée une image, on veut qu’elle soit de la meilleure qualité. Ici, ce n’est pas le cas, je joue avec les propriétés optiques de certains matériaux comme le cristal pour compléter mon travail de production d’images ».

L’artiste multimédia part à la reconquête de l’espace muséal au sein de la salle Anita Conti, là même où il avait présenté l’exposition Les Mécaniques poétiques en 2013. « Travailler dans cette salle, avec sa qualité d’obscurité, son silence et son calme, c’est un confort que je n’ai jamais eu avec la projection architecturale », commente t-il. Les œuvres qu’il peut produire dans ce cadre lui permettent de créer une ambiance plus douce et lente afin d’inviter les spectateurs à contempler ce qui les entoure. « Il n’y a pas de règle : on peut créer une belle œuvre même avec un rythme très lent pour que les gens ne s’en aillent pas, sans avoir à susciter l’effet “wouah” », un effet justement attendu dans la projection urbaine. Un fond sonore, créé par Johan Guillon du groupe EZ3kiel, contribue également à l’ambiance paisible de la salle. 

Gravity PRISM yann nguema

PRISM constitue un laboratoire de recherche technologique et artistique : l’artiste y recrée des objets esthétiques et innovants à travers ces écrans transparents. « L’idée, c’est de transformer l’image plane en une forme plus complexe, de la déformer par les reflets et la réfraction en apportant, en plus, une dimension très esthétique. Celle-ci donne aux images une nouvelle dimension qu’un écran traditionnel ne permettrait pas », développe t-il. 

Toutes les œuvres ont été créées grâce à des langages de programmation informatique conçus par l’artiste, qui se définit aussi comme un technicien avec une sensibilité artistique. « J’exagère très peu quand je dis que ces œuvres représentent 99% de code informatique », explique t-il. « Le code est un langage mathématique sans réelle sensibilité et qu’on n’a généralement pas envie de faire, mais moi, je trouve mes idées en l’élaborant. Je réfléchis en même temps au second plan qui va le masquer et apporter une dimension plus organique à mon travail : les voiles, le sable, les cailloux… ». À l’image du pinceau qu’utilise le peintre, Yann Nguema use du code informatique pour recréer une réalité artistique et technologique. 

Lithos Ammos prism yann nguema
Lithos Ammos

Les œuvres du créateur de PRISM portent sa signature : elles évoquent autant des éléments naturels et traditionnels que la culture technologique à laquelle il appartient. « En général, un masque traditionnel africain n’est pas associé à de la projection numérique ou à de la gravure laser », commente t-il en se référant à l’œuvre Astérales. Dans un mélange entre modernité et patrimoine, l’exposition retranscrit avec subtilité une écriture propre à l’art de Yann Nguema.

L’artiste multimédia utilise plusieurs strates dans ses installations. « J’articule en général deux ou trois principes de création d’images », indique-t-il. « Dans Anato_Me, il y a de la projection, de la sculpture et une image derrière la sculpture qui vient compléter la gravure. Mais la gravure peut disparaître si j’arrête d’éclairer par en-dessous. Tous ces phénomènes s’articulent pour créer tout ce qu’on voit ». Cette façon de créer lui permet d’augmenter chaque image projetée en y ajoutant une dimension supplémentaire afin de jouer avec les informations transmises sur les écrans. 

Prism yann nguema Anato_me
ANATO_ME

Une salle immersive permet de découvrir, lunettes 3D sur les yeux et casque sur les oreilles, l’essentiel du projet ATOM. Le public est plongé dans la figure mathématique du polytope, une forme en 4 dimensions qui ne peut être appréhendée dans notre espace. « Au début, on voit le polytope avec une forme très mathématique, sa forme réelle. Mais en jouant avec divers paramètres, cette forme se transforme petit à petit en un objet plus esthétique, artistique et sensible. Ce qui était minéral et quadrillé devient à la fin biologique et floral », révèle t-il. 

En tant qu’artiste, Yann Nguema cherche à susciter une émotion chez son public, mais lui-même ne savait pas ce qu’il ressentirait face à l’exposition avant son installation. « Créer de l’émotion, ce n’est pas une science exacte. Il y a, derrière ce but, quelque chose d’impalpable, qu’on ne maîtrise pas ». Ce n’est que lorsqu’il a déambulé pour la première fois dans la salle qu’il s’est rendu compte du calme qui émane de PRISM. « Il y a une dimension que je n’avais pas soupçonnée avec Gravity par exemple, sa portée presque thérapeutique. Beaucoup de gens m’ont dit qu’ils revenaient la voir parce qu’après une journée de travail, le côté contemplatif et hypnotique leur faisait un bien fou », conclut-il. Comme une invitation à rompre avec l’empressement qui caractérise l’usage moderne des écrans, l’exposition propose un retour aux sources et au calme à travers le prisme de son créateur.

PRISM propose un écran atypique et moderne sur ce qu’il y a de fondamental dans la vie en proposant des créations technologiques, inédites et en fin de compte poétiques…

PRISM de Yann Nguema, aux Champs Libres du 19 octobre 2023 au 31 mars 2024

10 Cours des Alliés, 35000 Rennes. Gratuit.
Du mardi au vendredi de 12h à 19h (à partir de 10h durant les vacances scolaires)
Samedi et dimanche de 14h à 19h
Fermeture le lundi et les jours fériés

Site Internet Yann Nguema

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