Rennes : vives inquiétudes autour de l’avenir d’Envie 35

Envie

À Rennes, l’avenir du réseau Envie est sérieusement menacé. La décision récente de l’éco-organisme Écosystem de ne pas retenir la candidature du réseau Envie – et donc d’évincer Envie 35, acteur local historique de l’économie circulaire sociale et solidaire et de l’insertion – dans le cadre d’un appel d’offres logistique national pour la collecte des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) suscite une vague d’inquiétude dans la métropole bretonne.

Dans un communiqué unanime, les élus de Rennes Métropole dénoncent une décision aux conséquences sociales et environnementales « absurdes ». Enjeu principal : 230 emplois menacés, dont 150 emplois en insertion. Pour un territoire qui s’est engagé de longue date dans des politiques ambitieuses de réduction des déchets, de réemploi et de retour à l’emploi durable pour les personnes éloignées du marché du travail, cette mise à l’écart apparaît comme un brutal coup d’arrêt.

Envie 35 : une « pépite » du territoire fragilisée

Présente depuis plus de vingt ans sur le territoire rennais, Envie 35 est bien plus qu’un opérateur logistique : c’est un acteur structurant de l’économie sociale et solidaire, un levier d’insertion professionnelle, et un allié des politiques publiques locales dans la transition écologique.

Chaque année, environ 200 personnes en parcours d’insertion y sont accompagnées pour se former, retrouver confiance, et accéder à l’emploi. L’entreprise collecte, trie, répare et revend du matériel électroménager, participant ainsi à une logique vertueuse de réemploi. Labellisée QualiRépar, elle permet aussi aux habitants de bénéficier du bonus réparation pour faire durer leurs appareils, réduisant ainsi l’empreinte écologique de la consommation.

Une décision strictement économique, aux conséquences durables

C’est cette mission d’intérêt général que les élus de Rennes Métropole estiment aujourd’hui bafouée. Dans l’attribution du marché, Écosystem – l’un des quatre éco-organismes agréés par l’État pour gérer la filière DEEE – aurait privilégié un opérateur privé, selon les élus, en se basant uniquement sur des critères de rentabilité immédiate, au mépris des engagements environnementaux et sociaux que la loi impose à ces structures agréées.

« Cette décision est incompréhensible, d’autant qu’Envie 35 est une pépite de notre territoire qui mène une mission essentielle de gestion des déchets tournée vers le réemploi », déclare Laurent Hamon, vice-président en charge des déchets et de l’économie circulaire.

Appel au dialogue et à l’intervention de l’État

Les élus de la majorité appellent solennellement Écosystem à rouvrir le dialogue avec le réseau Envie, dans un esprit de concertation et de responsabilité. Ils soulignent que la mission des éco-organismes, bien que privée, s’inscrit dans une délégation de service public et suppose le respect de critères sociaux et environnementaux que le simple jeu de la concurrence économique ne peut balayer.

« Envie 35 est un pilier de l’insertion par l’activité économique, au savoir-faire industriel incontestable, avec qui nous travaillons en lien très étroit au service de l’emploi, de la solidarité et de la transition écologique », rappelle Sébastien Sémeril, vice-président en charge du développement économique.

Enfin, la métropole appelle l’État à jouer son rôle de garant de l’intérêt général dans cette filière. La protection et le soutien des structures d’insertion comme Envie sont perçus comme un test grandeur nature de la cohérence des politiques publiques dans la conduite de la transition écologique juste et solidaire.

Une onde de choc dans le réseau Envie

Ce qui se joue à Rennes dépasse le cas local. Le réseau Envie, fondé en 1984, compte une cinquantaine de structures en France, représentant environ 3000 salariés, dont une large part en insertion. La perte de plusieurs marchés logistiques sur le territoire national, dont celui de Rennes, pourrait déstabiliser l’ensemble du réseau, déjà confronté à une compétition accrue et à des logiques de concentration industrielle.

La décision d’Écosystem remet ainsi en cause un modèle alternatif fondé sur l’ancrage territorial, la formation par le travail et la revalorisation des déchets, au moment même où les discours politiques ne cessent de promouvoir les vertus de l’économie circulaire.

Une mobilisation qui s’organise

Alors que le soutien politique local est désormais affiché, une mobilisation plus large pourrait voir le jour dans les prochaines semaines, tant à l’échelle citoyenne que nationale. À Rennes comme ailleurs, c’est une vision de l’économie et de la société qui est défendue : celle d’une écologie populaire, d’une solidarité concrète, et d’un tissu économique fondé sur l’utilité sociale plutôt que sur la seule rentabilité.