SAINT-NAZAIRE. CETTE HEURE BLEUE QUI BASCULE NOTRE QUOTIDIEN DANS L’IRRÉEL

Jusqu’au 30 avril 2022, ce ne sont pas moins de dix artistes qui exposent au Grand Café pour « L’Heure bleue ». Le centre d’art de Saint-Nazaire, loin d’organiser une n-ième exposition tenant un propos écologiste ou documentaire sur notre environnement, propose une exposition poétique et intime sur nos rapports personnels à la nature.

L'heure bleue
Anne Laure Sacriste, Reverse Island, 2010

Au moment où les derniers rayons du soleil s’évanouissent derrière l’horizon arrive ce moment spécial qui a pour nom l’heure bleue. D’un point de vue scientifique, le crépuscule peut être divisé en trois cycles : un premier dit “civil”, un deuxième “nautique” et enfin le dernier “astronomique”. Quant à l’heure bleue, elle caractérise ce passage du crépuscule civil au crépuscule nautique durant une quarantaine de minutes. Un temps où le jour et la nuit ne se distinguent plus, où notre rapport au monde privé de certitudes devient plus subjectif. Les œuvres ici présentes rejouent cet entre-deux, proposant des perceptions hybrides et troublées, jouant avec la lumière naturelle comme le demi-jour dans lesquels elles sont données à voir.

L'heure bleue
Dove Allouche, série « Mycota », 2015-2016

Dans ces jeux d’éclairages, la lumière naturelle frappe les monumentales peintures de Jessica Warboys et Anne Laure Sacriste. Celle-ci par exemple s’est inspirée de L’Île des morts du peintre symboliste Arnold Böcklin pour réaliser son installation Reverse Island. Une série de paravents qui réinterprètent l’ancien tableau par leurs couleurs vibrantes et irisées. Plus expérimentale, Jessica Warboys met sa peinture directement aux prises avec la nature. Exposée en plein soleil et immergée en mer, la toile est balayée par vent et marée. Une série de Sea paintings qui paradoxalement, rappelle plus les fresques de l’art rupestre que des images issues d’un univers aquatique.

L'heure bleue
Célia Nkala, Vestiges n°3, 2018

C’est dans la pénombre que se poursuit la suite de la visite avec des œuvres comme celle d’Hicham Berrada. L’alchimiste manipule des substances chimiques et filme leurs réactions dans de petits aquariums. Les formes alors observées donnent naissance à des paysages à la fois aquatiques et minérales, oniriques et inquiétants. Des formes tout aussi indistinctes que celles des “vestiges” de Célia Nkala. C’est lors de ses randonnées que l’artiste ramasse ce qui semble être des restes de feux clandestins, de feux de joie, de feux de camp… Leurs origines incertaines ainsi que leurs formes d’ossements, d’outils occultes les nimbent de mystères. Disposés sur des plateaux de joaillier, le soin apporté aux “vestiges” leur confère une aura mystique, proche du fétiche. Des assemblages plus composites constituent le travail de Marguerite Bornhauser et Léa Dumayet. Intitulés Chimera, squelettes de fer et peaux de tissu tendent des photographies qui flottent au gré du passage des visiteurs.

L'heure bleue
Anne-Charlotte Finel, Triste champignonniste, 2017 (accompagné par la musique de Voiski)

Au rez-de-chaussée comme à l’étage, le travail d’Anne-Charlotte Finel brouille les fréquences et diffuse des images sous forme de crachin pixelisé. Proche du bruit blanc, ces images spectrales surgissent comme des images d’archives, des décors de film de science-fiction ou des images filmées au microscope : des zones de non-dits qui laissent à l’imagination le champ libre. Tout aussi indéfinie est L’heure de chien (entre chien et loup), le mobilier hybride conçu par Agata Ingarden, entre colonne au chapiteau d’huîtres et lampe-méduse. Ce sont les champignons et leurs spores qui, chez Dove Allouche, font les frais d’être encapsulés sous verre. Le rapprochement est joliment fait entre la pipette du scientifique qui met sous culture le champignon et le tube du souffleur de verre qui étend le verre de manière circulaire. Enfin l’exposition se termine, ou plutôt s’ouvre sur le travail de Sophie Whettnall. Cette dernière nous offre un triptyque de panneaux percés de minuscules trous comme autant d’invitations et d’obstructions à la lumière, à la manière d’un moucharabieh oriental. Entre ombre et lumière se dessinent alors des formes hasardeuses qui invitent à la méditation et à la rêverie.

L'heure bleue
Sophie Whettnall, Panneau d’ombres (détail), 2014

Le Grand Café est ouvert à tous les publics. Une visite commentée est prévue chaque samedi à 16h. Pour les familles ayant des enfants entre 3 et 7 ans, une visite contée est prévue le samedi 2 avril à 11h. Tandis qu’une visite en langue des signes française est prévue le jeudi 7 avril à 17h30. De plus, deux évènements accompagneront l’exposition. Pour le premier, le musicien Vincent Malassis performera Bruit Bleu, une interprétation sonore de l’exposition le jeudi 24 mars à 19h26, au moment précis de l’heure bleue. Pour le second, il s’agit de clôturer l’exposition par une visite cette fois olfactive et sensorielle, avec la parfumerie AB 1882. Une relecture odorifère qui se tiendra le samedi 30 avril à 17h. Bonne visite !

INFORMATIONS PRATIQUES

L’exposition L’Heure bleue est visible jusqu’au 30 avril 2022 au Grand Café, au 2 Place des Quatre Z’horloges, 44600 Saint-Nazaire

Ouvert du mardi au dimanche de 14h à 19h

Entrée libre

Contacts :

Tél : +33 (0)2 44 73 44 00

Le lien vers le site du Grand Café : https://www.grandcafe-saintnazaire.fr/

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Benjamin Julienne
Métal expérimental, littérature russe, art contemporain, chant bulgare et septième art tourbillonnent dans ma tête. J’écris principalement pour faire connaître les lieux d’exposition indépendants de Nantes.

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