C’est au lieu-dit “le Kernozet” aux portes du Parc régional d’Armorique sur la commune de Scrignac que la diaspora touarègue s’est donnée rendez-vous le jeudi 14 juillet.
En cette saison encore sous pandémie mais sans restriction, où la Bretagne connaît des températures exceptionnelles, l’ambiance de cette journée festive a été marquée par la chaleur des retrouvailles en présence d’amis bretons et de touristes.
Des artistes Kel tamasheq ont répondu à l’invitation, comme Rhissa Ag Wanagli du groupe Atri N’ Assouf et le groupe Tisdass qui joue sans relâche depuis son arrivée en France. La veille, Tisdass jouait dans l’emblématique bar Le Coota à Erdeven.
Une invitée surprise s’est jointe au programme déjà riche, Fadimata Walett Oumar alias Disco, co-fondatrice de Tartit. Autant dire une invitée de marque.
Tartit, groupe de la région de Tombouctou mondialement connu depuis les années 2000, avait été programmé par le Plancher à Kergrist-Moëlou en février 2014. La petite salle des fêtes était pleine à craquer. Emotion intense.
Suite à ce concert mémorable, difficile de ne pas répondre à l’appel du désert !
Grâce à cette rencontre en 2014 et d’autres qui ont suivi notamment à Paris, Unidivers a assisté à un autre instant fort en émotion ce jeudi, quand Disco a pu tenir entre ses mains pour la toute première fois un ouvrage édité en français où elle partage son histoire de femme du désert, ses multiples engagements et attachements, “Fadimata tan Timbuktu”.
A 60 ans, Disco reste une figure incontournable du paysage culturel africain pour comprendre la ténacité des femmes sahariennes et leur investissement pour faire rayonner à l’international un héritage trop souvent réduit à l’homme bleu, à son visage tanné et voilé, à la posture altière du chamelier sur sa monture adaptée aux longues traversées en milieu aride.
Il serait d’ailleurs intéressant de creuser cette invibilisation de la femme nomade dans l’imaginaire collectif occidental, sa persistance au XXIè siècle et ses effets.
Dans l’impossibilité de partager cette culture ancestrale liée à une vie pastorale via le tourisme et autres échanges économiques du fait de la situation toujours troublée et instable au Mali, les populations restées au Sahara ou confinées dans les camps de réfugiés aux frontières ont pour premiers ambassadeurs et ambassadrices les membres de la diaspora Kel Tamasheq éparpillée aux quatre coins du monde.
La communauté touarègue qui réside et entretient des liens en Bretagne est l’une des plus actives. Il convient aussi de saluer le travail des programmateurs et programmatrices culturelles qui mettent chaque années à l’affiche de leur salle ou de leur festival, des artistes du Sahara, comme le 9 mars dernier à l’Aire libre, à Saint-Jacques de la Lande, où s’est donné le premier concert de la tournée européenne d’un groupe de Tamanrasset, Imarhan, présent cinq ans plus tôt aux Transmusicales.
A Kernozet, si la musique était la reine de la fête, il n’y avait cependant pas que des musiciens parmi les artistes présents. Deux bijoutiers de Ménéka (Mali) exposaient leur fabrication. L’un vit à Rennes et sillonne les festivals, l’atelier de Mohamed Ag Ahmed se situe à Mordelles. L’autre retournera au Sahara une fois la saison estivale terminée.
A noter que les hôtes qui tiennent et aménagent un lieu de vie accueillant à Kernozet en Scrignac, dans une ancienne école de campagne désaffectée, sont deux jeunes couples fraichement arrivés de Genève pour vivre un quotidien plus en phase avec leurs aspirations.
Tartit en concert au Festival Banlieues bleues Bagnolet jeudi 21 juillet 2022 (unidivers.fr)