Rennes Métropole et le réseau rennais Star tenaient une conférence de presse sur la rentrée des transports le 29 août 2023. Au programme de la discussion : bilan moral et chiffré de l’ouverture de la ligne B du métro un an après sa mise en fonction, informations sur les projets de mobilité en cours de développement et sur les innovations de la Star. Autant d’éléments qui montrent que ça bouge dans les transports à Rennes !
Le rendez-vous était donné à la presse le 29 août 2023 au parc relais Saint-Jacques Gaîté. Au 6e étage, la maire de Rennes et présidente de Rennes Métropole, Nathalie Appéré, Matthieu Theurier, vice-président de Rennes Métropole délégué à la mobilité et aux transports et Ronan Kerloc’h, directeur général de Keolis, opérateur du réseau Star, nous attendent sur une terrasse avec vue sur la station de métro.
Ligne B, une révolution en marche ?
En guise d’introduction, Nathalie Appéré rappelle la fébrilité qui entourait l’ouverture de la ligne B du métro un an plus tôt, le 20 septembre 2022 à 5 h 15. Elle admet l’inquiétude qui régnait du côté de Rennes Métropole, attendue au tournant après d’interminables travaux et des difficultés dans les derniers réglages du nouvel équipement. Mais elle se félicite des premiers résultats. « Aujourd’hui, c’est avec beaucoup de satisfaction qu’on peut se dire collectivement que la révolution que nous avions prévue et engagée en termes de mobilité avec la mise en service de la ligne B a eu lieu véritablement. »
Avec 400 000 voyages par jour sur le réseau métropolitain, la fréquentation a augmenté de 20 %. 80 000 voyages par jour sont effectués sur la ligne B, pour 140 000 sur la ligne A et 180 000 en bus. Cette nouvelle ligne a permis des augmentations nettes de la fréquentation du réseau de transports en commun dans certaines communes de la métropole : 68 % à Chevaigné, 22 % à Bruz, 21 % à Cesson-Sévigné, 21 % à Saint-Jacques-de-la-Lande. Ces chiffres attestent, selon Nathalie Appéré, « des changements de comportement et notamment l’abandon de la voiture au profit des transports en commun du fait de la performance d’un réseau où les trois quarts des Rennais et un métropolitain sur trois habitent à moins de 600 m d’une station de métro ».
Même si elle est « douce et lente », on peut déjà se réjouir de cette évolution. D’autant plus que Nathalie Appéré ajoute : « il s’agissait d’une révolution, mais pas de la fin de l’histoire. Les innovations, les changements, les investissements en matière de transport vont se poursuivre ». La présidente de Rennes Métropole affirme l’engagement de la métropole pour intensifier le niveau de service avec deux lignes directrices : la décarbonation d’une part, la facilitation du quotidien des usagers d’autre part.
Décarbonation et apaisement de la ville
La parole est ensuite donnée à Matthieu Theurier, délégué à la mobilité et aux transports qui apporte des précisions quant aux innovations en cours de déploiement. Elles ont pour objectif de fond « l’apaisement de la ville ». « Il n’y a pas 36 000 solutions, on le sait. L’enjeu c’est de mettre la voiture à sa juste place et de mieux partager l’espace public au profit des autres modes de déplacement », affirme l’élu écologiste.
En ce sens, Matthieu Theurier annonce l’adoption de la limite de vitesse à 30 km/h dans les villes de Rennes, Saint-Jacques-de-la-Lande, Chantepie, Vezin-le-Coquet et Chavagne. Elles rejoignent les 12 autres villes de la métropole qui avaient déjà instauré la mesure. « L’accidentologie baisse énormément dès lors que vous réduisez la vitesse à 30 km/h », rappelle-t-il. Cette limitation a aussi l’avantage de rendre la ville plus sûre pour les enfants et de favoriser la marche. « Cellule souche des mobilités » selon le vice-président aux transports, cette dernière représente 35 % des mobilités dans la métropole, une part encore en augmentation depuis la mise en place la ligne B du métro.
Les aménagements cyclables se poursuivent aussi, avec notamment le Réseau express à vélo (REV), grand chantier cherchant à relier toutes les communes de la métropole. Un nouveau tronçon, Rennes-Vern-sur-Seiche est inauguré la même semaine, le 31 août 2023. « Au-delà du REV, nous entrons désormais dans la phase opérationnelle du schéma directeur vélo », annonce Matthieu Theurier. 200 km de pistes cyclables seront réalisés dans ce cadre. « On a élaboré les premières programmations, des budgets, des conducteurs d’opération et un certain nombre de liaisons sont déjà en cours de réalisation ou vont l’être prochainement. »
Matthieu Theurier évoque aussi le succès des vélos-cargos en location longue à la Maison du vélo. « C’est une vraie alternative à la voiture individuelle qui permet de se déplacer avec les enfants ou de pouvoir faire ses courses. » De nouveaux vélos-cargos ont été achetés, ainsi que des vélos long tail, un vélo avec un porte-bagage renforcé qui peut porter trois enfants de moins de 12 ans.
Un autre facteur de décarbonation est la mise en place de bus électriques, qui avance également. En 2018, Rennes Métropole avait affirmé sa volonté de commencer une transition de son parc de bus vers l’électrique, pour les déplacements intrarocade tout du moins (les lignes métropolitaines devraient fonctionner au gaz naturel d’ici à 2030). Aussi, en 2020 était validée l’acquisition de 92 autobus eCitaro électriques Mercedes-Benz. Actuellement, quatre de ces bus sont en rodage sur les lignes 12 et C6. Au-delà du changement de véhicule, la difficulté réside dans l’installation de nouvelles infrastructures pour que les bus se rechargent rapidement en fin de ligne.
Le dernier point sur lequel Matthieu Theurier veut insister est la grille tarifaire. Il mentionne notamment le vote, en juillet 2023, qui a fait passer le ticket unitaire de 1,50 € à 1,70 €. « Cette augmentation était voulue parce qu’elle permet à la fois de ne pas toucher au prix des abonnements dans un contexte d’inflation forte (qui pèse aussi sur la mise en œuvre du réseau Star), mais aussi parce qu’elle nous permet de continuer à investir sur les tarifs réduits », justifie-t-il. Aujourd’hui, 90 000 usagers bénéficient soit de la gratuité (dont 27 000 enfants de moins de 12 ans), soit d’une réduction de 85 % ou de 50 %. « En 2016, quand il n’y avait que la gratuité sociale, 36 000 usagers en bénéficiaient, les autres payaient le plein tarif », précise Matthieu Theurier.
Nouveautés de la Star
Représentant de Keolis, Ronan Kerloc’h prend finalement la parole pour exposer les nouveautés du côté de la Star. L’an dernier, une des principales inquiétudes portait sur les difficultés de recrutement de conducteurs et de mécaniciens. La Star a donc travaillé avec Pôle Emploi pour développer des formations destinées à des personnes sans permis de conduire. De cette façon, 50 conducteurs ont déjà été engagés en 2023, une trentaine de plus devraient l’être d’ici la fin d’année et une centaine en 2024. De même, la Star accueille désormais des alternants mécaniciens, « ce qui nous garantit les recrutements de demain », affirme Ronan Kerloc’h. Une trentaine sont désormais en poste et il reste des places.
Les autres nouveautés de la Star sont des ajouts ou des améliorations de services proposés sur le site Internet ou l’application mobile. L’achat de titres et d’abonnements en prélèvement automatique est élargi. Le service Star nous guide, destiné aux personnes qui ont besoin d’un accompagnement pour prendre les transports en commun, fait dorénavant quasiment du porte à porte. Sur l’application mobile, le calculateur d’itinéraire a été affiné pour les déplacements à vélo, de façon à proposer davantage d’options. Enfin, la Star travaille désormais avec Handimap, un calculateur d’itinéraire développé par l’agence rennaise Someware pour conseiller des parcours piétons adaptés aux différents handicaps.
Un bilan à nuancer
À la suite de ces bilans à la fois réjouissants et prometteurs, c’est aux journalistes de prendre la parole. Une question qui revient est celle de la fiabilité de la nouvelle ligne de métro. Les usagers se plaignent de pannes non seulement fréquentes, mais surtout longues. À cela, Ronan Kerloc’h répond : « On a eu certes quelques grosses pannes, mais lorsqu’on regarde la fiabilité, le taux de disponibilité complet, qu’on compare à la ligne A ou à d’autres métros, la ligne B se trouve d’office dans le top 10 des métros mondiaux ». Une bien maigre consolation quand une nouvelle panne vous met une fois de plus en retard pour aller au boulot.
Mais les élus appuient le discours du directeur général de Keolis. « Sur du nouveau matériel, de nouveaux services, il faut plus d’une année pour arriver à un niveau maximal d’exploitation. Il n’est pas encore atteint, mais il est déjà très bon », affirme Matthieu Theurier. « C’est inespéré au regard des derniers mois de réglages avant la mise en service », ajoute Nathalie Appéré. Elle rappelle également que la ligne A a mis cinq ans avant d’arriver à son niveau de fiabilité actuel, jugé « exceptionnel, extraordinaire, quasi anormal au regard de l’ensemble des réseaux » par la maire de Rennes. Il n’empêche, dans un contexte où la décarbonation des transports est devenue une urgence, les équipements censés remplacer la voiture se doivent d’être irréprochables s’ils veulent convaincre sans hésitation. Pour reprendre les mots de Matthieu Theurier, ils doivent « donner des avantages compétitifs aux usagers ».
Pour passer de la voiture aux transports en commun, un autre facteur d’hésitation peut être le prix des abonnements. Il est certes réduit pour 90 000 usagers du réseau Star, « un tiers des voyages sur le réseau se font avec des tarifs réduits ou gratuits », rappelle Nathalie Appéré. Et Matthieu Theurier a bien raison d’inviter la presse à faire davantage connaître les tarifs réduits : « Beaucoup de personnes peuvent se dire “c’est cher pour moi”. Mais souvent, ils ont soit une prise en charge par l’employeur possible, qu’ils ne sollicitent pas toujours et que l’employeur ne déclenche pas, soit ils rentrent dans des grilles de revenus des tarifs réduits ». Il ajoute de plus, que, « la question tarifaire ne ressort jamais des enquêtes de satisfaction comme étant un frein à l’usage des transports en commun ».
Cela dit, combien d’individus préfèrent encore payer l’essence pour se rendre au travail plutôt qu’un abonnement plein tarif à 529,50 € par an pour les 27-64 ans ? Et que ce tarif soit dans la moyenne nationale n’est pas non plus une consolation pour le porte-monnaie. À une époque où le prix de l’essence et celui du train impactent grandement la liberté de mouvement des individus, et d’autant plus dans un contexte d’inflation généralisée, la question du prix des transports en commun au niveau local, voire de leur gratuité, se pose plus que jamais.
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