Ses dons de danseuse séduisirent Gene Kelly et Fred Astaire, mais ce furent Minnelli et Renoir qui permirent à Leslie Caron, la plus célèbre petite Française d’Hollywood, d’affirmer son talent d’actrice.
À 85 ans, elle imite encore Jean Renoir qui, l’ayant prise sous son aile, la recevait régulièrement dans sa villa de Beverly Hills, havre des exilés français à Los Angeles durant les années 1950 : « Leslie, je ne sais pas si vous êtes une bonne danseuse, mais ce que je sais, c’est que vous êtes une bonne actrice ! » C’est néanmoins la danseuse de 16 ans, membre des Ballets des Champs-Élysées sous la direction du très novateur Roland Petit, que remarque Gene Kelly, en 1948. Un an plus tard, il fait passer un essai à cette jeune Parisienne, dont la mère est une ex-danseuse américaine nommée, curieuse coïncidence, Margaret Petit. Dirigé par Vincente Minnelli, chorégraphié par Gene Kelly, Un Américain à Paris (1951) triomphe et Leslie Caron est propulsée au firmament d’Hollywood à 19 ans, un contrat avec la prestigieuse MGM à la clé. Ses entrechats gracieux, sa frimousse mutine et ses grands yeux bleus en amande illuminent ses prestations d’ingénues dans Lili, La pantoufle de verre et surtout Papa longues jambes (1955) où elle danse avec l’aérien Fred Astaire. Mais celle qui a côtoyé les plus grands danseurs de son temps, y compris Rudolf Noureev dans Valentino (1977) et même Mikhaïl Barychnikov le temps d’un gala donné avec Noureev à New York en 1988, nourrit aussi de réelles ambitions dramatiques.
Une étoile est née
Si son tout premier essai – pour Juliette ou la clef des songes de Marcel Carné – se révèle un complet fiasco, Leslie Caron ne désarme pas et prend aux États-Unis des cours d’art dramatique. Jean Renoir, à défaut de la filmer, écrit pour elle Orvet, une pièce dans laquelle il la dirige au Théâtre de la Renaissance en 1955. Ce sera aussi par Renoir qu’elle rencontrera François Truffaut, qui lui offrira plus tard un rôle dans L’homme qui aimait les femmes (1977). Volontaire, la jeune comédienne initie le projet d’adaptation au cinéma de la nouvelle de Colette, Gigi. Tourné à Paris par Minnelli, un de ses réalisateurs préférés, ce joyau de la comédie musicale marque l’apogée de sa carrière hollywoodienne. Réfractaire aux règles du star-system, elle part pour Londres, épouse Peter Hall, le jeune directeur de la Royal Shakespeare Company, et gagne ses galons d’actrice dramatique avec La chambre indiscrète de Bryan Forbes (1962). Elle tourne aussi avec Cary Grant et Warren Beatty, dont elle partage la vie durant deux ans. Quand elle lui présente Truffaut, ce dernier lui recommande le scénario de Bonnie and Clyde. Faye Dunaway connaît la suite… Après un troisième mariage avec Michael Laughlin, producteur du film devenu culte Macadam à deux voies (1971),Leslie Caron ne parvient plus à donner à sa carrière son lustre d’antan. Mais ses apparitions chez Louis Malle ou James Ivory, à la télévision ou sur scène, comme au Châtelet en 2010 dans A little night music, témoignent de son inaltérable enthousiasme pour son art.
Gigi
Les aventures de Gigi, jeune demi-mondaine, dans le Paris de la Belle Époque. Une fastueuse comédie musicale signée Minnelli, avec Leslie Caron et Maurice Chevalier.
Leslie Caron
Révélée encore adolescente par Un Américain à Paris, la danseuse qui a incarné à Hollywood le charme de Paname raconte un certain âge d’or du cinéma, et sa part d’ombre.
Elle est l’une des dernières légendes vivantes de l’âge d’or hollywoodien, mais rien ne prédestinait cette petite Parisienne à tenir le haut de l’affiche, sinon les froides ambitions d’une mère américaine, son joli minois et son talent de danseuse. Au lendemain d’une enfance heureuse, interrompue brutalement par l’Occupation, Leslie Caron est repérée sur scène par Gene Kelly, qui lui propose de tourner dans ce qui sera l’un de ses films les plus célèbres : Un Américain à Paris. Sans connaître un mot d’anglais, elle s’envole, à seulement 17 ans, pour Los Angeles, et signe un contrat de sept ans avec la Metro-Goldwyn-Mayer. De Fred Astaire (Papa longues jambes) à Vincente Minnelli (Gigi), le succès, immédiat, lui ouvre le tourbillon de la gloire, puis des désillusions.
Extraits de films cultes et archives rares, dont beaucoup de personnelles apportées par l’actrice, photos de plateau et de presse, retour sur des lieux de tournage mythiques… : ce portrait émouvant, porté par le témoignage d’une octogénaire à l’élégance intacte, évoque aussi bien le glamour d’Hollywood que sa part d’ombre, notamment à travers la face cachée de la MGM. Pétillant comme une comédie musicale, il fait revivre les grandes heures du cinéma américain.
https://youtu.be/cqzzcE7b52Q
Texte : Marie Gérard (Arte magazine)
Photo : Schuchprod